YEGG Magazine

Revue féministe en révolution

Des abysses et elles : les créatures de Ouitisch

Célian Ramis

La semaine dernière, l’association Ouitisch plongeait la piscine des Gayeulles dans l’ambiance des abysses, transformant la fosse plongée en studio photo. Reportage au cœur des fonds marins, à la rencontre des quatre créatures « ouitischiennes » du projet.

Mercredi 14 août, 21h. Les derniers courageux effectuent des longueurs dans la piscine des Gayeulles, à quelques mètres de la fosse plongée dans laquelle est installé le studio photo de l’association Ouitisch. Le moment est venu, après deux ans de réflexion et de travail autour de leur projet !

Celui de réaliser et présenter une exposition subaquatique, sur le thème des abysses. Un milieu mystérieux et méconnu du grand public. Le livre de Claire Nouvian, Abysses, est leur Bible : « C’est notre coup de cœur. Nous sommes restés fidèles aux images du bouquin. Les dessins et créations d’Anna Le Reun sont très proches de celles-ci », explique Xavière Voisin, secrétaire de l’asso, en charge de l’administration et des relations partenaires.

Durant trois nuits, l’équipe de Ouitisch s’est dédiée à la réalisation des images de l’expo Des abysses et vous, qui sera présentée tour à tour dans les quatre piscines rennaises. « Une invitation à l’imaginaire », selon Xavière.

Une fois la nuit tombée, le shooting peut démarrer. Huit projecteurs sont installés à 6m de profondeur, l’appareil photo est déjà au fond de la fosse, une gueuse est mise en place pour une meilleure stabilité de la modèle, Jessica Josse… Cette dernière a enfilé son costume de méduse blanche, après avoir été maquillée par Vanessa Coupé, qui a en amont beaucoup collaboré avec Anna pour définir les différents maquillages.

« La texture des produits waterproof n’est pas du tout la même et je ne m’étais pas rendu compte de la difficulté au départ. On ne peut pas tirer la matière, la travailler… Et elle sèche aussitôt ! », confie Vanessa. Ce n’est pas pour autant que la jeune professionnelle se débine. Au contraire ! « Il suffit donc de travailler la base avec des produits gras, de faire le dégradé à ce moment-là et de rajouter la couche waterproof », explique-t-elle. Et le tour est joué pour un résultat impeccable, qui sera révélé dès le 15 novembre.

Dans l’univers abyssal

Il est temps pour Jessica de descendre sous l’eau. Doucement, un plongeur l’accompagne jusqu’au fond de la fosse. Anna est déjà dans l’eau, prête à réajuster le costume. L’équipe s’apprête à réaliser une séance de 20 à 30 minutes pendant laquelle Jessica alterne entre apnée et bouffée d’oxygène. Avec aisance, elle effectue des mouvements gracieux, en douceur. La jeune femme n’en est pas à son premier coup d’essai.

En effet, pendant 13 ans, elle a pratiqué la natation synchronisée et  participé à plusieurs courts-métrages en milieu aquatique, avec la réalisatrice Manon Le Roy. Son bonus : tenir en apnée pendant 2 minutes 30. Néanmoins, elle ne préfère pas tirer sur ses réserves pour cet exercice « déjà assez éprouvant ! ». Elle se souvient de la nuit précédente : « Au début, j’ai eu un moment d’angoisse : à 6 mètres de profondeur, dans le noir, il fait très froid, je portais un costume avec une grosse structure sur la tête… ». Après un temps d’adaptation, elle entre rapidement dans le personnage et renouvelle l’exercice à trois reprises dans la soirée.

Pour Anna, la satisfaction est grande. Après discussion autour de leurs envies, les membres de Ouitisch ont rapidement su ce qui ne voulaient pas niveau costumes : « Pas de rococo, d’angélique, de mousseux ou encore de fashion ». A la suite de nombreux tests effectués, la créatrice connaît les réactions des différentes matières au contact de l’eau et sait comment créer les trois créatures abyssales demandées.

« Je suis contente car le rendu durant le shooting est le même que sur les dessins. C’est cool ! », explique-t-elle. D’autres projets naissent dans les esprits « ouitischiens », « à force d’être ensemble et de discuter de nos envies, forcément c’est stimulant ». Mais avant tout il faudra présenter les 9 clichés grand format, placés dans des sarcophages en plexiglas, au fond des quatre piscines municipales. A vos masques et tubas, dès le 15 novembre, à la piscine Saint-Georges de Rennes.