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Le Grand Soufflet : Le rock grisant d'Iva Nova

Célian Ramis

Les quatre musiciennes russes d’Iva Nova ont offert au Grand Soufflet une soirée de clôture dynamique et puissante. Leur énergie rock et girl power s’est propagée rapidement sous le chapiteau du festival, installé dans le parc du Thabor, samedi 15 octobre.

L’Argentine est le pays mis à l’honneur cette année mais ce sont les russes d’Iva Nova qui clôturent cette édition du Grand Soufflet. Mélange de rock, d’électro et de musiques slaves, c’est un spectacle psychédélique et festif que proposent Anastasia Postnikova (chant, clavier, percussions), Natalia Potapenko (accordéon, percussions), Galina Kiselesa (guitare, basse, percussions) et Ekaterina Fedorova (batterie, percussions).

Elles dégagent quelque chose de rock. Quelque chose de fort et de saisissant. Quelque chose qui s’apparente à de l’empowerment. La batterie cogne, les percussions accentuent la brutalité des sonorités et à cela s’ajoute la festivité du piano à bretelles.

Un joyeux mélange qui caractérise bien la proposition musicale de ces quatre musiciennes de St Pétersbourg, qui balancent une énergie viscérale et entrainante.

Le folklore de la musique slave s’exprime à travers le chant, la voix d’Anastasia Postnikova vibrant et résonnant dans l’ensemble du chapiteau. Les percussions marquent l’intensité des chansons influencées par des airs pop rock russes et sublimées par un univers novateur et futuriste, appuyé par l’harmonium et une modification vocale proche de celle d’un robot.

Chaque morceau est intense. Un grain de folie habite les musiciennes qui le partagent en toute générosité avec le public qui montre rapidement son enthousiasme. « Vous pouvez vous relaxer, on est russes mais pas des méchantes ! », plaisante la chanteuse en s’installant au clavier, pour y exécuter la partie calme du concert. Là encore, Iva Nova démontre sa capacité et son aisance à nous embarquer dans une aventure sensorielle incroyable.

Après plusieurs chansons dédiées à des femmes célèbres, ou non, elles nous content leurs vécus personnels. L’expérience de quatre musiciennes en tournée dans toute l’Europe. Et comme les paroles nous sont inaccessibles, elles nous invitent à laisser voguer notre imagination.

Guidé-e-s par les sons, les ambiances et les interprétations, festivaliers et festivalières se livrent à un lâcher prise réconfortant, suivant simplement les émotions délivrées par le spectacle.

Car il s’agit ici d’un véritable spectacle musical. Dans lequel chaque musicienne campe un rôle essentiel. Chacune se pare de son instrument mais aussi de percussions différentes. Et ensemble, elles recréent des mondes, des atmosphères et des histoires qu’elles interprètent sobrement devant les micros, qu’elles habitent par des danses sautillantes ou qu’elles théâtralisent avec intensité. Toujours avec des pointes d’humour qui apportent une habile légèreté.

Leur proposition est brillante, pleine de dynamisme et d’inventivité. Gratter les cordes de la basse avec une baguette de batterie instaure une ambiance imposante et quelque peu angoissante. Nous sommes dans un lit, endormi-e-s. « On ne vous promet pas d’être un bon rêve, peut-être un cauchemar… », murmure la chanteuse. Le rythme des instruments est plus lent, la voix de la chanteuse plus grave et son phrasé plus court, les sonorités plus psychédéliques.

Puis on se réveille, c’est le matin, « et le matin, c’est café, cigarette et exercices ! » Le tambourin résonne, l’accordéon se gonfle et se dégonfle à vive allure, les festivités joyeuses sont de retour. Avec leurs sourires s’entremêle un esprit sauvage et libre. Sans crier leur indépendance, celle-ci est flagrante et bouleversante.

Elles montrent, sans trop en faire, l’étendue de leurs talents et leur ingéniosité à s’emparer de tout ce qu’elles trouvent pour le transformer en arme musicale au service de leur univers et de leurs envies.

Elles puisent dans tout ce qu’elles sont et connaissent pour nous bringuebaler dans les contrées russes reculées, dans le bouillonnement de St Pétersbourg, sur les routes de l’Europe qu’elles traversent en bus avec leur équipe technique mais aussi dans l’intime et le quotidien.

« On dédie notre prochaine chanson à toutes les femmes ici, toutes les femmes dehors, toutes les femmes qui sont dans votre cœur messieurs, mais aussi toutes les femmes qui sont en vous si vous le sentez. La chansons s’appelle « The Witch » ! », scande Anastasia Postnikova avec ardeur. Si nous étions déjà convaincu-e-s par Iva Nova, le groupe finit de nous envouter par ce que les musiciennes transmettent avec poigne et sincérité.

Le Grand Soufflet boucle son édition 2016 sur un gros coup en présentant ces artistes complètes et détonantes dont on retient l’incroyable énergie communicative, la puissance musicale et la créativité artistique.