YEGG Magazine

Revue féministe en révolution

Mars 2019

Coup de cœur

Les justicières masquées de la Bibliothèque universitaire

Depuis le 18 février, les justiciers masqués envahissent le hall de la bibliothèque universitaire de Rennes, à l’occasion de l’exposition Masques, costumes et pouvoirs – Super-héro-ïne-s en bande dessinée française. 

De par l’utilisation de l’écriture inclusive – dont l’usage n’est malheureusement toujours pas si banale (si l’Académie française daigne enfin procéder à la féminisation des noms de métier, elle refuse catégoriquement en revanche l’écriture inclusive) – l’événement Facebook avait attiré notre attention et titillé notre curiosité.

Car les justicières masquées ne sont pas légion, comme le souligne l’encadré en début d’exposition, en en présentant une autre, Héro(ïne)s, réalisée par Lyon festival BD et Jc Deveney : « À plus de 70%, les modèles d’identification proposés aux lecteurs et lectrices sont des figures masculines. »

Tout en soulignant que lorsque l’on peut arguer que les femmes sont présentes dans les BD, « leur représentation reste minoritaire et très souvent liée à des stéréotypes convenus : les femmes ont leur place en BD… au côté du héros, prêtes à l’épauler ou à le soigner en cas de coup dur. Elles peuvent également constituer de très bons éléments à séduire, à sauver du danger et parfois même à instruire. »

On se régale alors d’affiches faisant la part belle à Supermeuf, aux Marvelles Avengeuses, à Vulverine, à The Spiritueuse, à Hellgirl ou encore à Babe Sapienne. Difficile néanmoins de trouver des personnages féminins badass dans le reste des planches présentées dans le cadre du Festival « Serial Cultures, édition super-héroïque »…

Coup de gueule

Quand est-ce qu'on va la fermer ?

La France a encore manqué une belle occasion de fermer sa gueule en février. Il a suffit que certain-e-s l’ouvre bien grande pour protester contre la commercialisation du hijab de running annoncé par Decathlon pour que l’entreprise suspende son projet. « Pour garantir la sécurité de nos collaborateurs en France », peut-on lire sur Twitter.

La polémique est lancée et chacun-e y va de son avis fort inintéressant puisque les personnes qui occupent le débat ne sont pas concernées par le voile. Le 1ermars, Libération publie alors une tribune rédigée par un collectif de femmes musulmanes dénonçant l’islamophobie quotidienne à laquelle elles sont confrontées :

« Plaquer sur les femmes portant le voile tous les préjugés et toutes les généralisations ouvre la porte à tous les abus. On nous demande d’être discrètes, de respecter la culture du pays qui nous accueille. On nous soupçonne de ne pas être livres de choisir nos vêtements nous-mêmes. Et ce soupçon entraine des interdictions qui sont censées nous libérer. Mais nous ne sommes ni soumises ni inconscientes, nous sommes fières de notre foi et fières de nos choix. En assumant nos croyances, notre voile, nous réclamons la liberté d’être femmes et musulmanes en France. Nous exerçons notre liberté de conscience. Nous dénonçons les détournements de la laïcité pour mieux nous opprimer. La laïcité de la loi 1905, c’est la liberté. »

Le texte est puissant. Mais pourquoi a-t-il fallu quatre jours avant d’interroger les concernées ? Et pourquoi en 2019 hommes blancs en première ligne, femmes blanches en seconde, s’agitent-ils/elles toujours autant autour du voile ?