Timbuktu raconte le quotidien d’une ville africaine mythique aux confins du Sahara Occidentale aux mains des djihadistes. Comment concilier un rythme de vie ancestrale avec les nouvelles règles de vie des extrémistes religieux venant imposer leur charia et semer la terreur dans des bourgades n’aspirant qu’à vivre en paix ? Toute la beauté du film réside dans ce savant mélange entre horreur et beauté. La photographie superbe met à l’honneur un décor que le réalisateur a pu observer dans ce Mali qu’il connaît bien. Entre les paysages ocre filmés avec une patience infinie et la longue sérénade du fleuve qui traverse les plaines désertiques, Abderrahmane Sissako nous fait aimer ce cadre enchanteur. Pour autant, c’est avec la même énergie qu’il s’en prend aux salafistes, se postant au chevet des interdits, il filme l’oppresseur et le résistant avec distanciation, use de la rupture de tons et d’un humour osé et téméraire. Timbuktu rend grâce aux femmes, intrépides et premières victimes des djihadistes, en appelle à leur courage et à la course à la vie. La ville tombée en 2012 aux mains des intégristes puis reprise en janvier 2013 par les français et maliens est le théâtre d’une actualité brûlante très vite recyclée en sujet de film par le réalisateur mauritanien. Il reconstitue cette occupation pour le grand écran et il le fait avec une formidable liberté. Une narration libre, quasi chorégraphiée qui pousse le spectateur à s’éveiller et s’interroger.