Célian Ramis
Mythos 2014 : Un road trip avec Moriarty


Jeudi soir, c’est le groupe franco-américain Moriarty qui se produisait sur la scène du Cabaret botanique, installé au Thabor dans le cadre du festival Mythos. Un voyage dans de lointaines contrées remplies de fugitifs.
C’est un road trip musical que nous propose Moriarty en cette 3e soirée de Mythos. Une virée apaisante et planante guidée par la voix pure de Rosemary Standley, dont les Rennaises et les Rennais se souviennent de son passage lors de l’édition précédente. Les arts de la parole, les membres du groupe les maitrisent.
Folk et blues se mélangent pour nous faire voyager sur les traces des grands noms de ces genres musicaux dont s’inspirent Moriarty. Tout est parti d’une commande passée par la Cité de la musique en 2012, à l’occasion de l’exposition sur Bob Dylan. Le quintet propose alors un concert reprenant non pas les chansons de ce monstre sacré qu’est Robert Zimmerman mais celles de ceux qui ont marqué sa musique et inspiré son imaginaire, qui se trouvent être également leurs influences.
De Woody Guthrie (chanteur et guitariste folk américain) à Hank Williams (compositeur américaine, icône de la musique country) en passant par Blind Willie McTell (chanteur et guitariste blues américain), ce sont les icônes de la première moitié du XXe siècle auxquelles la formation franco-américaine emboite le pas. Sur la route et en tournée, ils continuent de jouer leurs reprises et finissent par enregistrer Fugitives, leur troisième album, sorti au début de l’année, « entre deux concerts, dans des chambres d’hôtel… », précisait la chanteuse dans une interview accordée aux Inrocks, en janvier 2014.
Et pour aiguiser et étoffer cet opus empreint de souvenirs de leurs ancêtres spirituels et musicaux, ils s’entourent de fins connaisseurs comme Wayne Standley, Don Cavalli ou encore Mama Rosin qui apportent leur touche rock et leurs influences transcontinentales.
Fugitives, c’est donc un retour aux sources, un voyage dans le temps et l’espace. Sous le Magic Mirror ce soir-là, les spectateurs sont transportés loin de la capitale bretonne. En quelques minutes, la voix chaude et modulable de Rosemary Standley et les notes folk des différents instruments nous embarquent dans un road trip au cœur du désert américain.
On traverse les zones arides mais aussi les plaines verdoyantes qui s’etendent à perte de vue. On s’arrête dans des bars à première vue miteux dans lesquels s’adonnent des bandes de potes réunis pour taper un bœuf. On reprend les routes escarpées, étriquées et tournicotantes qui semblent n’en plus finir. Tout cela au son des instruments à cordes – guitare électrique, guitare acoustique, basse, violoncelle – des percussions – batterie modifiée, maracas – et de la guimbarde.
En chemin, on croise des fugitifs, des personnages en fuite, des amants assassins, des bandits de grand chemin, des mères abandonnées par des hommes accros au jeu, des cowboys exploités ou encore des femmes adultères… Les fantômes du passé ressurgissent, les incontournables des histoires fantastiques répondent présents, et ensemble, viennent envahir le Thabor. Les esprits vagabondent.
On se surprend à imaginer la rencontre entre Moriarty et Fabrice Murgia, auteur et metteur en scène de Ghost Road qui nous plonge dans un périple aux Etats-Unis le long de la route 66. Quand on revient à la réalité et à l’instant présent, on se laisse tantôt bercer par les chansons plutôt calmes qui appellent à la quiétude et tantôt emporter par les chansons plus rythmées et entrainantes.
La chaleur de la musique monte dans le Cabaret botanique. Allié à la douceur des mélodies, c’est une ambiance enivrante qui se dégage de ce concert. Toutefois, 1h30 suffisent à nous rassasier et si les festivaliers réclament encore quelques prolongations, on éprouve le sentiment d’avoir atteint les limites de cet univers pourtant si riche. Moriarty réussit tout de même le pari de marcher dans les pas de grands pontes du blues et de la folk américains et confirme son talent de narrateur d’histoires nourries d’imaginaire et de passé réinventé.

Jeanne Cherhal est accompagnée pour ce nouveau spectacle de plusieurs musiciens: un batteur, un guitariste et un bassiste avec lesquels elle a enregistré l’album Histoire de J., sorti le 10 mars dernier. Ils se connaissent bien et cela s’entend. Lorsqu’un imprévu vient perturber la chanteuse, ils savent rebondir sur les notes qu’elle égraine joyeusement.
Histoire de J., comme Histoire de Jeanne. C’est un album autobiographique ?
Quelques minutes avant le début de la lecture, la metteure en scène, Enora Boëlle, est tendue, stressée. Pour cette représentation unique au cours du festival, ils ont eu 5 jours de répétition, dans une école maternelle. L’objectif étant de présenter, sous la forme d’une lecture théâtrale, la première partie de l’histoire Moi, Canard, librement inspirée du conte de Hans Christian Andersen, Le vilain petit canard.
« Une histoire qui parle de la manière de transmettre le fait de grandir », analyse la co-directrice artistique du Théâtre de Poche. Plusieurs interrogations l’ont poussé à s’orienter vers ce texte : « Qu’est-ce qui fait que l’on existe ? Qu’on a sa place ? Qu’on est un individu unique ? Le Vilain petit canard pose la question : Comment chaque individu trouve sa place dans le monde ? »
Elle insiste néanmoins sur sa détermination à ne pas victimiser le protagoniste du conte car « on est tous un peu canard, à des degrés différents ». Pendant près de 30 minutes, les spectateurs sont suspendus aux lèvres de la comédienne, attentifs aux mots prononcés, au sens donné, tout en ne manquant pas de jeter un œil sur le rôle de Gregaldur, « issu de la scène impro-underground-punk » qui se tient assis sur la scène à deux pas d’Abigail.
« Comment les gens vont-ils comprendre ce spectacle ? » fût la principale interrogation de l’artiste avant de monter sur scène. L’artiste raconte avoir puisé son inspiration au travers de l’œuvre écrite par le sociologue Jacques Salomé, L’effet source, paru en France il y a deux ans, retranscrivant quelques 300 témoignages de femmes qui osent parler librement de sexualité, et plus précisément des femmes fontaines.
On connaît la compagnie des Becs Verseurs pour leurs indétrônables visites décalées au sein d’expositions – on se rappelle notamment de leur prestation aux Champs Libres lors de l’exposition Rennes en chanson, présentée de novembre 2010 à mars 2011 – ou de divers événements rennais. Ici, les deux conteuses se mettent à nue dans une création qui leur est propre.

L’album A new tango songbook n’était pas encore sorti (le 7 avril dernier) que Plaza Francia bénéficiait déjà d’un vent très favorable dans les médias. Et pour cause, cette nouvelle formation unit la voix mythique des Rita Mitsouko, Catherine Ringer, aux musiciens Eduardo Makaroff – à la guitare – et Christoph H. Müller – au synthé (connus pour être deux membres du groupe Gotan Project). À 22h30, les spectateurs se pressent et s’agglutinent à l’intérieur du Magic Mirror, dressé pour le festival Mythos.
On peut alors affirmer que Edouardo Makaroff et Christoph H. Müller aiment à rechercher et à combiner expérimentations musicales, personnalités déjantées et originalité. On assiste, ce mercredi soir, à un instant puissant et intense avec, au centre de la scène et de l’attention, une Catherine Ringer souriante, enthousiaste et tout en contrôle.
Elle danse, tout en retenue dans les premiers instants avant de se laisser submerger par le brin de folie qu’on lui connaît et embarque même Eduardo Makaroff dans un début de tango. Mais elle n’hésite pas non plus à se tapir dans l’ombre pour laisser la lumière éclairer les musiciens dont les notes produites par le quatuor envoûtent et embarquent les festivaliers qui commencent timidement à bouger les hanches et taper dans les mains.
Le spectacle se déroulait dans la salle du bas de l’Aire libre. Face aux spectateurs qui entraient et s’installaient peu à peu, une femme, seule, assise sur une chaise les jambes croisées, semble attendre un rendez-vous. Aucun décor n’a été mis en place. Elle laisse son regard se promener sur le public et la salle. Peu à peu, les murmures qui émanaient des gradins se turent. Lorsque le silence s’installe complètement, la comédienne commence la pièce.

« Un doux reniement » est une immersion théâtrale pour 1 personne, une pièce qui met le spectateur au centre de la représentation. Le principe est simple : équipé d’un casque audio, le participant prend le rôle de Paul Fradontal. Un jeune homme parti en train, à l’enterrement d’une vieille amie, Lucie Steiner. Sur son chemin, il croise des spectres, joués par 3 comédiens, dans 3 espaces différents et se laisse porter par ses souvenirs.


C’est dans l’ambiance intimiste du Magic Mirror que les festivaliers ont pu assister au concert de la jeune chanteuse, Cœur de Pirate. Pour sa tournée, au cours de laquelle elle présente son deuxième album, Blonde, elle a opté pour un duo piano/voix. Sur la scène, un décor très épuré. Deux instruments seulement. Et des guirlandes lumineuses. Béatrice Martin, de son vrai nom, nous transporte dans son univers qu’elle chante le sourire aux lèvres et la mine enjouée. Derrière son visage poupon et sa voix cristalline, Cœur de Pirate dévoile sa propre sensibilité et sa propre fragilité, à travers des textes orientés sur le thème de l’Amour. Des couples plus exactement.

Dans le théâtre de verdure, situé dans le parc du Thabor, tous les festivaliers, dont beaucoup sont venus en famille, sont assis dans l’herbe ce dimanche après-midi. Il fait beau, presque chaud (en tout cas, pas très froid). De 15h à 17h, plusieurs conteurs vont se succéder sur la scène, se passer le flambeau de la parole. Alain Le Goff, Achille Grimaud, Pépito Matéo, Gigi Bigot, Yannick Jaulin ou encore Nicolas Bonneau accompagné de la musicienne Fannytastic… ils sont bien connus du public de Mythos.