Célian Ramis

Mathilde Seigner, dans la peau d'une mauvaise mère ?

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Cinéma Gaumont, Rennes
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Une mère peut-elle et doit-elle aimer son enfant de manière inconditionnelle, même quand ce dernier dévoile « défaillances » et violence ? C’est la question que pose la réalisatrice Christine Carrière dans son film, Une mère.
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Une mère peut-elle et doit-elle aimer son enfant de manière inconditionnelle, même quand ce dernier dévoile « défaillances » et violence ? C’est la question que pose la réalisatrice Christine Carrière dans son nouveau film Une mère, qu’elle présentait mardi 16 juin, accompagnée de Mathilde Seigner, en avant-première au cinéma Gaumont de Rennes.

« Il est mauvais fils, elle sera mauvaise mère ». Le synopsis est intriguant, la problématique posée. Qui de la mère ou de l’enfant influe sur l’autre ? Doit-on forcément et entièrement blâmer les parents pour la mauvaise éducation de leurs enfants ? Avec Une mère, Christine Carrière ne prétend pas répondre aux questions soulevées, simplement à présenter une certaine réalité à travers un rapport mère/fils.

« Je suis passionnée par les ados et par le rapport parents/enfants. J’ai rencontré pas mal de femmes seules face à la violence de leurs enfants et je crois qu’en France c’est un sujet tabou. J’ai voulu crever les abcès et déculpabiliser les mamans. »
explique Christine Carrière, avant la projection. 

Elle installe la caméra au cœur du conflit qui oppose Marie à son fils, Guillaume, un adolescent de 16 ans, sans se retrancher derrière une facilité narrative qui nous dévoilerait grossièrement les événements antérieurs, justifiant cette incapacité commune à communiquer l’un avec l’autre.

Elle parsème au fil de l’histoire des informations sur les « défaillances » de Guillaume, relevées par des médecins, sans en préciser la nature, et nous fait comprendre qu’il est un habitué, avec ses ami-e-s, du poste de police. Entre protection, épuisement et lassitude de ne pouvoir vivre sa vie, la figure de la mère prête à tout pour son enfant est esquintée pour présenter une autre réalité : celle d’une femme à bout, en prise à son rôle maternel et à son ressenti face à cet être, victime d’un coup d’un soir, qu’elle rêve par moment de n’avoir jamais mis au monde.

Une facette réaliste et intéressante qui nous plonge au cœur d’un sujet de société complexe dont on ne perçoit encore que la partie émergée de l’iceberg. Toutefois, on regrette que la question de l’amour inconditionnel ne soit pas portée à son paroxysme, comme si la réalisatrice n’assumait pas entièrement sa volonté de déculpabiliser les femmes, étouffant légèrement la violence qui se dégage de cette situation délicate et anxiogène.

RÔLE NUANCÉ ET FÉMININ

Pour Mathilde Seigner, mère d’un petit garçon de 8 ans, le sujet de l’adolescence ne lui est pas encore familier mais s’est glissé sans difficultés particulières dans la peau de cette mère désabusée et désillusionnée. Et elle l’incarne avec le talent et le naturel qu’on lui connaît, embarquant le spectateur dans une sorte de huis clos avec ses émotions et ses entraves, entre nostalgie, inquiétude et désir de liberté. Et ce soir-là, l’actrice témoigne également d’un besoin de se frotter à un rôle plus nuancé que ceux proposés par le registre des comédies.

Vingt ans avant Une mère, Mathilde Seigner interprétait son premier rôle au cinéma. Dans Rosine, signé Christine Carrière. L’histoire d’une adolescente en admiration face à sa mère. Deux décennies sont passées. Mathilde Seigner s’est affirmée en tant qu’actrice et s’est imposée dans le cinéma français, imprimant noir sur blanc son franc parler et sa gouaille. Aujourd’hui, elle interprète un rôle sur mesure, écrit pour elle, par celle qui a lancé sa carrière. Un rôle qui lui va bien mais aussi qui lui fait du bien, ravivant son inspiration pour les personnages dramatiques, plus intéressants selon la comédienne, qui ne renie pas complétement le plaisir de jouer dans une comédie.

« Les comédies offrent des rôles sympathiques mais la palette est plus limitée. Et ce n’est pas ce qu’il y a de plus valorisant pour une comédienne. Et il faut dire que dans les comédies populaires, ce sont souvent les hommes qui font rire et qui ont les beaux rôles. »
dénonce Mathilde Seigner avec parcimonie.

Elle a pourtant joué dans des films au casting féminin, dans Vénus beauté, Tout pour plaire, ou encore Bowling… Aucun n’aura le succès des Ch’tis, ni de Camping dans lequel elle joue « mais encore une fois, c’est le personnage masculin, celui de Franck Dubosc, qui fait rire ».

Toutefois, les deux professionnelles n’en restent pas à ce constat et font le pari d’aborder un sujet de fond et de le proposer au grand public sans l’appâter via les grands noms bankable du cinéma français, comme Kad Merad, Dany Boon ou encore Omar Sy. La réalisatrice - qui n’avait pas présenté de nouvel opus depuis Darling en 2007 (avec Marina Foïs et Guillaume Canet, livrant l’histoire forte d’une femme luttant pour sa dignité) - n’hésite pas à prendre le public à partie afin de le sensibiliser aux difficultés actuelles de produire un film de ce type (peu de noms connus, sujet sensible…), les financeurs restreignant les budgets dans ces cas-là.

Main dans la main pour alerter des problématiques actuelles qui envahissent le 7e art depuis plusieurs années, Christine Carrière et Mathilde Seigner savourent néanmoins leurs retrouvailles et la lumière donnée à Une mère, qui sera diffusé dans les salles obscures dès le 24 juin.

Célian Ramis

Vers une nouvelle pédagogie à l'école ?

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Maison de quartier de Villejean, Rennes
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Ancienne institutrice et directrice d'école maternelle, Françoise Ancquetil parle de ses luttes menées contre les réformes scolaires, qu'elle juge inégalitaires, formatées et élitistes.
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Le 27 février dernier, le collectif Université Populaire Gesticulante a invité la conférencière Françoise Ancquetil, à la Maison de Quartier de Villejean, sur le thème « L'école est finie ? ». Ancienne institutrice et directrice d'école maternelle, elle est intervenue pour parler de ses luttes menées depuis 2001 contre les réformes scolaires, qu'elle juge inégalitaires, formatées et élitistes.

L'école, Françoise Ancquetil la connaît bien. « Il y a la grande Histoire, moi j'ai ma petite histoire avec l'école, confie-t-elle, au début de sa conférence « L'école est finie ? ». Je suis arrivée à 14 mois dans la cour d'école. » Orpheline, elle a été adoptée par un couple, tous les deux directeurs d'école ; sa mère dirigeait l'école des filles d'un village proche de Rennes et son père, l'école des garçons, au même endroit.

Après ses études dans le secondaire, Françoise se destine à son tour à l'enseignement. Elle passe le concours de l’Éducation nationale et devient enseignante dans une école maternelle, puis directrice de cette même école, située à l'ouest de Rennes. Trente-sept ans plus tard, Françoise Ancquetil a pris sa retraite en septembre 2013. Désormais, elle partage son expérience. Dans les mois qui ont suivi, Françoise s'est formée en tant que conférencière gesticulante à la Scop brétillienne Le Pavé, dissoute le 15 décembre dernier. Une nouvelle Scop, Le Contre Pied, l'a remplacée.

« UN POINT DE VUE : LE MIEN »

De cette formation, « L'école est finie ? » est née. Un titre, quelque peu provocateur, qui interpelle. Pour preuve, ce vendredi 27 février, à la Maison de quartier de Villejean, la salle est presque pleine. Une soixantaine de personnes est venue assister à cette conférence organisée par le collectif Université Populaire Gesticulante.

« Je n'y donne qu'un point de vue : le mien »
prévient dès le départ Françoise Ancquetil.

Pendant une heure et demi, l'ancienne institutrice a expliqué comment elle, son équipe pédagogique et les parents d'élèves sont entrés en résistance contre le système de l’Éducation nationale.

C'est en 2001 que tout a commencé. Confrontée à un problème, Françoise invite le public de la salle à le résoudre, sur un petit papier. Elle n'a pas oublié ses anciens réflexes, le public est redevenu sa classe. Sur un tableau d'école, elle écrit l'énoncé : sur cinq classes, deux maîtres sont en congés. Sachant que chaque classe contient 28 élèves, combien d'élèves seront répartis dans les deux classes restantes ? La réponse : 47, 47 et 46 élèves.

DÉSOBÉISSANCE COLLECTIVE

« Cela a été ma première réflexion collective de désobéissance car avec ces effectifs, on ne pouvait faire que de la garderie, se souvient Françoise. Les enfants étaient obligés de venir en classe mais aucun remplacement ne pouvait être fait... L'équipe pédagogique et moi avons informés les parents de la situation. Ces derniers ont fait signer une pétition, ils ont envoyé un courrier adressé à la mairie, à l'Inspecteur d'académie et aux députés. » Au final, une seule classe a été remplacée. Mais la situation était supportable, selon l'ancienne institutrice.

Autre exemple : en 2007 et 2008, lorsque Xavier Darcos était ministre de l’Éducation, Françoise Ancquetil et son équipe ont lutté contre des réformes scolaires jugées inégalitaires. Une action nationale avait été lancée pour « échanger sur l'école » lors d'une matinée « conviviale ». « Nous devions débattre ensemble du système français mais nous avons également parlé des dangers et des vices cachés de la réforme Darcos », développe-t-elle.

La mise en place des 4 jours par semaine et surtout de l'aide personnalisée obligatoire pour les enfants dits en difficulté inquiète l'équipe pédagogique de son école.

Ils décident de ne pas mettre le dispositif en place, qu'ils considèrent discriminant, contrairement à toutes les autres écoles d'Ille-et-Vilaine.

« Tous les enfants sont en difficulté, certains ont du mal à maîtriser la langue orale, d'autres l'écrit. Il faut tous les prendre »
a répliqué Françoise Ancquetil à l'Inspecteur d'académie.

FORMATAGE AU MONDE DU TRAVAIL

« Je me suis rendue compte qu'il y avait une crise de l'école », atteste Françoise. Cette crise, elle l'explique en partie par les réformes scolaires, impulsées par l'Organisation de Coopération et de Développement Économique (OCDE), depuis les années 90. Et les directives tendent, selon elle, vers une école compétitive et élitiste, loin de la visée émancipatrice et du slogan républicain écrit sur les façades des écoles :

« En 2002, l'OCDE a intégré ce que j'appelle des "gros mots" à l'école : compétences, évaluations, performances et résultats. »

Les réformes scolaires ont suivi ces indications. En maternelle, des fiches de compétences et des fichiers Base élèves, ce que Françoise Ancquetil appelle du « fichage », sont instaurés. Une personne dans le public, interloquée, chuchote : « Cela me fait penser au monde du travail. » L'usage de ce vocabulaire, utilisé dans des logiques d'entreprise, est problématique. L'ancienne directrice s'est opposé à tous ces changements à cause des problèmes éthiques qu'ils soulevaient.

CLASSES MULTI ÂGES

Et la jeune retraitée de l’Éducation nationale les a tous contournés. Au lieu de « livrets de compétences », elle a créé des « livrets de progrès », plus ludiques et accessibles, avec les mêmes données imposées par l'académie.

« Même dans une école traditionnelle, on peut créer, inventer des choses et s'opposer »
martèle-t-elle.

Son avancée la plus significative : les classes multi âges. Depuis 2007, Françoise Ancquetil et son équipe pédagogique ont travaillé pour regrouper les élèves, de petite, moyenne et grande sections, ensemble.

Malgré la réticence des parents au début, les résultats ont été très concluants au bout d'un an. L'apprentissage des élèves se fait plus rapidement. De leur côté, les instituteurs coopèrent entre eux dans un « climat de confiance ». « Avant, on faisait des projets chacun dans nos classes mais là, on se donnait même nos fiches ! », se rappelle Françoise.

 L'école est-elle alors vraiment finie ?

« Elle est quand même bien touchée et bien attaquée, répond l'ancienne directrice d'école maternelle. Une petite lueur d'espoir subsiste tout de même. »

Les attentats à Paris, en janvier dernier, ont renforcé le discours des politiques sur l'école. « J'ai senti qu'on la tenait responsable de ce qui s'était passé. Mais elle n'enferme pas tous les maux de la société », conclut Françoise Ancquetil.

MODÈLE PÉDAGOGIQUE ALTERNATIF

Les questions de religions et de différences culturelles ne sont pas abordées en classe. « Après les attentats, les instituteurs se sont mis à en parler aux élèves. Mais on devrait pourtant parler de ces sujets tous les jours ! Et également valoriser les différences, les cultures des autres. L'école ne joue plus son rôle d'intégration », regrette Françoise.

Désormais, ses collègues et d'autres prennent la relève. Mises en place depuis sept ans, les classes multi âges ont inspiré une autre école maternelle, située également dans l'ouest de Rennes. L'exemple de Françoise montre qu'une autre pédagogie est possible dans les établissements républicains : centrée sur l'élève, basée sur la coopération, la curiosité d'apprentissage et la tolérance de l'Autre.   

 

Célian Ramis

Éducation à l'égalité : L'enjeu de la transmission

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Rennes
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L'éducation à l'égalité, un enjeu majeur dans la question du rapport féminin/masculin.
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Rumeurs, journées de retrait de l’école, récupération politique, enterrement de l’ABCD de l’égalité fin juin – qui renaitra de ses cendres, début juillet, sous le nom de Plan d’action pour l’égalité entre les filles et les garçons à l’école – et on en passe… Côté éducation, le thème de l’égalité a été secoué au fil des différentes actualités qui ont bouleversé le 1er semestre 2014. La question du genre fait frémir quelques partisans de la Manif pour tous, emportés par Farida Belghoul et le sms terrifiant – qui ferait un bon titre de bouquin pour la littérature jeunesse – prédisant des cours de masturbation enseignés directement par les professeurs de l’Éducation nationale.

On aurait pu penser que le léger réaménagement des rythmes scolaires mis en place dès cette rentrée prendrait la relève, niveau polémique. Mais c’était sans compter les nouvelles péripéties de la fin août qui bousculent le gouvernement, qui nomme Najat Vallaud-Belkacem, jusqu’alors ministre des Droits des femmes, de la Ville, de la Jeunesse et des Sports, au ministère de l’Éducation nationale, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche.

Au royaume de l’Éducation, la nouvelle reine imposera-t-elle l’égalité comme priorité ? Une chose est sûre, les professionnels de la question n’ont pas attendu pour potasser leurs leçons et tenter de les appliquer concrètement au quotidien. Mais la prise de conscience, elle, est loin d’être généralisée. 

Finies les représentations de la petite fille en princesse esseulée et du petit garçon en sauveur de ces demoiselles en détresse. La cloche a sonné et avec elle, le temps de la prise de conscience concernant l’impérative éducation à l’égalité des sexes dès le plus jeune âge.

Les filles seraient plus littéraires et les garçons plus scientifiques. Les filles seraient guidées par leur intuition, les garçons par leur sens de l’orientation. Les filles seraient plus douées pour la gestion du foyer et des tâches ménagères, les garçons pour la vie professionnelle et les postes à responsabilité. C’est du moins ce que nous dictent l’Histoire et la Science. Foutaises ! Le cerveau n’a pas de sexe. C’est ce que démontre et défend la neurobiologiste et directrice de recherche de l’Institut Pasteur, Catherine Vidal, dans sa conférence « Le cerveau a-t-il un sexe ? ».

« Le bébé nait avec 100 milliards de neurones qui ne vont pas cesser de se multiplier. Mais il faut savoir qu’à la naissance, seulement 10% des neurones sont connectés entre eux », nous expliquait la neurobiologiste le 16 mai dernier, lors de la Biennale de l’égalité femmes-hommes organisée à Lorient. Ainsi, les 90% restants se fabriqueraient durant la petite enfance et tout au long de notre existence. Elle est catégorique :

« Hormis l’hypothalamus qui active chaque mois des neurones afin de déclencher l’ovulation chez la femme, il n’y a pas de différence entre les sexes pour les fonctions cognitives. »

Les connexions s’effectuent alors intrinsèquement en fonction de l’environnement, social et culturel, fréquenté. « Jusqu’à 2 ans et demi, l’enfant n’est pas capable de s’identifier au masculin ou au féminin. Il n’a pas conscience de son sexe », affirme Catherine Vidal. Dans ces années-là, l’enfant est donc inconsciemment formaté par les éléments qui l’entourent, que ce soit la décoration de sa chambre, les couleurs de ses habits ou encore les jouets qu’il manipule.

La neurobiologiste conclut alors sur l’importance de l’éducation et de l’apprentissage, ainsi que sur la nécessité pour les biologistes de s’engager auprès des sciences sociales « pour diffuser la culture de l’égalité entre les femmes et les hommes ».

NOURRIS AUX INÉGALITÉS

Les stéréotypes et les idées reçues sont donc ingérés par les tout-petits, avant même qu’ils n’aient conscience de leur sexe. « Entre 5 et 7 ans, on comprend la norme, et cela devient invariable », met en garde Rozenn Moro, co-formatrice, spécialiste techniques d’animation et éducation populaire auprès de l’association féministe Questions d’égalité, à Rennes.

La structure entre dans le vif du sujet et propose une formation « Mettre en place l’égalité filles-garçons dans le secteur de la petite enfance : pourquoi ? Comment ? », dont la première sera organisée les 8 et 9 décembre. La session de juin ayant été reportée faute de participants suffisamment nombreux : « Les professionnel-le-s de la petite enfance n’ont pas forcément connaissance de cette possibilité, n’ont pas conscience de véhiculer des inégalités ou encore sont formé-e-s par leurs employeur-e-s (lire notre encadré La ville forme ses agents) – et là c’est une bonne chose ».

Pourtant, nombreux sont les discours établissant la corrélation entre les adultes travaillant au contact des petits et la transmission de certaines idées reçues à l’enfant. L’objectif de l’association est alors de dresser un état des lieux des inégalités distinguées, de comprendre la reconstruction des rôles « traditionnellement masculins et féminins » dans les interactions adultes-enfants et d’établir des actions éducatives concrètes à mettre en place.

« On recueille les représentations que les un-e-s et les autres ont, on travaille sur les stéréotypes qui sont véhiculés dans l’univers de la petite enfance et on pointe du doigt les différences qui se révèlent très tôt et qui se nichent dans l’inconscient »,
Rozenn Moro, membre de l'association rennaise Questions d'égalité.

Sans chercher à culpabiliser les pros ou les familles, des phases d’observations, d’échanges et de travail sur divers supports vont s’alterner afin de comprendre la nature de ce qui nous conditionne en tant que femmes et hommes. La représentation de la figure maternelle, allouée aux tâches domestiques et quotidiennes, et de la figure paternelle, orientée vers le jeu et l’autorité, la construction de l’environnement avant la naissance du nourrisson, la manière de s’adresser aux petites filles et aux petits garçons… Les comportements diffèrent selon le sexe de l’individu.

Mi-mai, Questions d’égalité invitait Elsa Arvanitis et Sophie Collard, sociologues de formation qui ont fondé Artémisia à Toulouse dans l’optique d’analyser ces problématiques auprès des structures dédiées à la petite enfance et de sensibiliser les professionnel-le-s. « Elles sont parties d’un constat très parlant : Les petites filles sont souvent encouragées sur leur apparence, tandis que les petits garçons sont encouragés sur leurs performances, sachant qu’on leur accorde plus d’importance, on les réprimande davantage », résume Rozenn.

Lors de la Biennale, Nicole Abar, ancienne footballeuse internationale, chargée de l’animation de l’expérimentation ABCD de l’égalité en 2013/2014, orientait son discours dans la même direction :

« En me rendant dans les écoles, j’affichais une grande feuille blanche contre le mur et je demandais aux enfants d’aller dessiner ce qu’ils voulaient. Ce que je voyais était effarant. Les garçons se jetaient sur la feuille et prenaient un grand espace pour leurs dessins tandis que les filles attendaient qu’on les pousse à aller griffonner une toute petite fleur. C’est très révélateur. »

L’heure n’est donc plus au bilan mais bel et bien à la prise de conscience et à l’action.

LUTTER CONTRE LE SEXISME

Chez Questions d’égalité, on regrette qu’aucune crèche pilote en terme d’égalité des sexes n’existe. Une structure comme celle qui se développe à Saint-Ouen (93) depuis 2009, la crèche Bourdarias - établit sur le modèle suédois - qui lutte contre les stéréotypes de genre en adoptant une méthode éducative non-différenciée. Les enfants sont amenés à participer à des jeux, ateliers, lectures, etc. sans attribuer de sexe à l’objet ou à l’animation.

Pour remédier au manque de lieux expérimentaux et progressistes - qui sont pourtant recommandés par l’Inspection Générale des Affaires Sociales - l’association rennaise, qui serait alors formatrice et accompagnatrice, lance un appel à projets pour lancer une crèche pilote, la fiche informative étant à leur soumettre avant le 15 novembre.

De son côté, l’association féministe rennaise Mix-Cité dénonce le sexisme des jouets, dans un mini-catalogue intitulé « Pas de cadeaux pour le sexisme », et y décrypte les comportements forgés par les objets de loisirs. D’une part, des outils de bricolage, armes, jeux de guerre ou expériences scientifiques ; les garçons sont influencés par la virilité, la violence et la réflexion. De l’autre, des Barbies, des déguisements de princesse, des dinettes, des poupons et des tables de repassage ; les filles sont alors formées à la passivité et au rôle de femmes au foyer.

« Les jouets en eux-mêmes ne sont pas sexistes, ce sont leur utilisation et les représentations auxquelles nous les faisons correspondre qui sont sexistes », informe le dépliant, qui invite à être attentif à nos propres préjugés que l’on véhicule à nos petites têtes blondes. Des alternatives sont alors proposées sur les choix de jeux collectifs, de construction, de découverte et d’éveil ou encore de lectures. Ces dernières étant particulièrement décriées à l’heure actuelle par les spécialistes de la littérature jeunesse (lire notre interview).

Dans le même esprit, le 25 juin, à l’occasion de la conférence de l’auteure Jessie Magana à la MJC Bréquigny, la bibli Clôteaux-Bréquigny proposait une sélection d’albums, documentaires, romans et BD – empruntables dans toutes les bibliothèques de Rennes – recommandée en terme d’égalité filles-garçons. Un fascicule permettant ainsi de s’orienter vers des ouvrages ou supports qui bousculent les représentations de genre dans un domaine très impacté par le sexisme.

Un élément fondamental selon les spécialistes qui établissent indéniablement un lien entre ses fameuses représentations de genre – maman aux fourneaux, papa aux activités ludiques et pédagogiques, ou encore maman au foyer, papa médecin, pompier, directeur, etc. – et les orientations scolaires choisies selon le sexe, les filles osant moins se destiner à des carrières « prestigieuses », les laissant inconsciemment aux hommes.

OBJECTIF FORMATION ET APPRENTISSAGE

Nombreux sont celles et ceux qui prônent l’éducation à l’égalité. À tort ou à raison, le rôle de l’école et de l’apprentissage serait donc fondamental. Que ce soit au cours du premier ou du second degré, les alertes se sont multipliées pour sonner l’alarme et l’urgence de la mission, et le gouvernement s’est emparé du dossier. Tout d’abord, avec Najat Vallaud-Belkacem, ministre des Droits des femmes de mai 2012 à août 2014, qui avait alors fait de ce sujet un cheval de bataille en instaurant l’ABCD de l’égalité en expérimentation dans 10 académies françaises, soit 247 écoles, à la rentrée 2013.

Début 2014, les événements s’enchainent et se bousculent, le sms de Farida Belghoul embrasent les esprits échauffés et terrifiés à l’idée de soi-disants cours de masturbation dès 4 ans et autres rumeurs qui poussent certains parents à retirer leurs enfants des établissements scolaires à l’occasion des Journées de retrait de l’école. La machine est en route et la ministre, en lien avec Benoit Hamon, alors ministre de l’Éducation nationale, décident d’enterrer cet outil.

Ce dernier ne disparaît pas tout à fait et revient sous le nom de Plan d’action pour l’égalité entre les filles et les garçons à l’école. 4 axes se sont dégagés de l’ABCD de l’égalité, salué par l’inspection générale de l’Éducation nationale (IGEN), à la suite de son évaluation. Dans les mesures principales du Plan figurent la formation du personnel éducatif inscrite dorénavant dans les écoles supérieures du professorat - et du personnel déjà en activité - la mise en place d’une mallette pédagogique à destination des enseignants, l’information aux parents ou encore l’intégration de séquences pédagogiques dans les programmes (EPS, éducation morale et civique, français, géographie et histoire).

Un point qui ne devrait pas déplaire à Nicole Lucas, agrégée et docteure en histoire, licenciée en histoire de l’art, membre associée du laboratoire CERHIO/CNRS/UMR 6258 – Université Rennes 2, qui a orienté ses études, depuis plusieurs années, sur les manuels scolaires, l’enseignement de l’histoire et la place des femmes dans l’Histoire.

« Elles ne sont pas totalement absentes mais leur place est minime. En 2008, les manuels scolaires ont intégré les femmes médiévales, Emilie de Chatelet et les femmes dans la Première guerre mondiale. Sinon rien n’a bougé », scande-t-elle.

Mentionner Olympe de Gouges ou Simone Weil en quelques lignes dans les textes est bien loin d’être satisfaisant. Selon la spécialiste, l’espace accordé à la gente féminine dans les livres scolaires est dramatique. Quatre ou cinq textes de femmes sur une centaine, « c’est pire que de ne pas les voir apparaître ! » Indignée, elle nous montre les chiffres publiés, sous forme d’un tableau, dans son ouvrage Éducation des femmes – Héritages, expériences, identités, co-écrit avec Danielle Ohana : pour exemples, dans un manuel édité chez Magnard en 2010, pour une classe de 2nde, sur 20 auteurs, seulement 3 femmes ! Ou encore dans un manuel édité chez Hachette, la même année pour le même public, aucune bio de femmes sur 48.

« Pour que ce soit vendeur, les femmes se trouvent en couverture de livres. Mais pas trop dans les textes… Ou alors on fait un dossier sur elles. Ce n’est pas bon, il faut les intégrer dans le continuum de l’Histoire. Il y a plein de femmes dans l’Histoire ! », précise-t-elle. Le sujet est terrifiant, la conversation passionnante. Car c’est une passionnée Nicole Lucas, qui nous liste les femmes oubliées – volontairement ?! - des manuels : celles l’Antiquité, du Moyen-âge, les aristos, les abbesses (« qui avaient autant de pouvoir que les hommes »), les paysannes…

« Toutes avaient un rôle dans la société. On fait comme si elles n’apparaissaient qu’au XXe siècle ! Les manuels nous enseignent une histoire d’hommes… Ma formule, c’est : Une histoire mixte et équilibrée », rigole-t-elle.

L’auteure de Dire l’histoire des femmes à l’école reconnaît alors les défaillances des manuels scolaires, soumis à des programmes, les problèmes de formation des enseignant-e-s et la frilosité des professeur-e-s et des familles à s’attaquer à ce sujet. Toutefois, elle se ravit de voir que la question interroge et attise la curiosité des professionnel-le-s – Magali Hardouin, de l’Université Rennes 2 également, loin d’être la seule,  a publié, en 2012, un rapport sur la représentation des femmes dans les manuels de géographie – mais aussi des élèves.

La preuve avec la pétition d’Ariane Baillon, 17 ans, envoyée à Benoit Hamon – aujourd’hui sur le bureau de Najat Vallaud-Belkacem, par conséquent – s’indignant de constater qu’une seule femme figurait au programme de philosophie en terminale : Hannah Arendt. Mi-août, elle avait déjà récolté plus de 12 000 signatures.

Elle précise également, dans un article écrit pour Rue89 Bordeaux, son indignation face à la présentation des femmes, en lettres par exemple : à travers leurs liaisons avec les « grands hommes », et prend pour exemple George Sand, abordé dans sa relation avec Alfred de Musset seulement. La prise de conscience est initiée. Espérons qu’elle ne se perde pas en chemin. Une certitude pour Nicole Lucas :

« Il faut des outils multipolaires à l’école, pour les professeur-e-s et les élèves. Les manuels restent un support pour l’enseignant comme pour l’enfant. Des femmes, il faut en parler à tous les âges ! »

Parce que l’égalité des sexes n’est pas que dans les livres…

Quelle est la politique de la ville en matière d’égalité filles-garçons, femmes-hommes ? Quels sont les outils mis à disposition des fonctionnaires municipaux ? Quels sont les programmes établis par la ville ? Des interrogations que la rédaction de YEGG est allée soumettre aux élues de la ville de Rennes, en charge de ces questions, Lénaïc Briéro, adjointe déléguée à l’éducation et aux politiques mémorielles, et Geneviève Letourneux, chargée des droits des femmes et de l’égalité.

Récemment élues (début avril), elles n’avaient pas encore eu le temps, mi-juillet, de prendre pleinement connaissance de leurs nouveaux dossiers. De surcroît, leurs agendas ne leur laissent que peu de temps pour répondre aux journalistes. Néanmoins, elles ont rapidement rappelé que cette préoccupation n’est pas récente à Rennes, que l’égalité s’inscrit « dans l’ADN de la ville » et que la nouvelle municipalité « poursuit la dynamique impulsée il y a plusieurs années ».

Concrètement ? Côté éducation, Lénaïc Briéro annonce que :

« Nous commencerons par une sensibilisation de notre personnel dans les écoles aux luttes contre les discriminations filles-garçons. Cela devrait se poursuivre par des formations ».

Quand ? Bientôt sans doute… Côté droits des femmes, Geneviève Letourneux signale que « Pour ainsi dire, il y a la dimension de la formation du personnel d’accueil, qui est importante ». Elle ajoute « Nous avons entrepris un gros travail institutionnel, qui est fondamental pour faire la preuve par l’exemple, de sensibilisation des employés municipaux ». Un bon début. La promesse la plus notable concerne le personnel municipal de la Petite Enfance.

Ainsi, en mars dernier, lors de la journée pédagogique qui lui est consacrée, a été mise en place une formation continue sur l’égalité filles-garçons. « Cela devrait permettre de donner des habitudes de travail qui irriguent le quotidien », se félicite Geneviève Letourneux. Encourageant, certes. Reste à savoir si cela sera pérennisé et suivi d’effets.

 

 

En février dernier, la rédaction de YEGG contactait l’Inspection Académique dans le cadre d’un Décryptage sur l’ABCD de l’Égalité. À l’époque, de vilaines rumeurs se diffusaient via sms, prétendant que cet ABCD n’était rien d’autre qu’une théorie du genre, que les enseignants allaient dispenser des cours de masturbation aux enfants et faire d’eux des homosexuels… etc, et incitant les parents à des journées de retrait de l’école.

La droite extrême et la droite dure se sont empressées d’envenimer les choses. Face à cela, l’Inspection Académique a choisi de pratiquer la politique de l’autruche, pensant que moins on parlerait de l’ABCD de l’Egalité, plus les parents d’élèves oublieraient la rumeur. Elle a donc refusé de répondre à nos questions. Or, on sait que la communication sur des sujets aussi sensibles est toujours meilleure que le silence.

En outre, ce programme n’avait rien de révolutionnaire (cf. Décryptage – N°23) et il aurait été intelligent de mettre les points sur les « i » une bonne foi pour toutes. L’ABCD de l’Egalité abandonné par le ministre de l’Education Benoît Hamon en juin dernier, la rédaction a fait une nouvelle demande d’entretien à l’Académie, pour évoquer plus largement l’éducation à l’égalité à Rennes, connaître les dispositifs déjà mis en place dans la ville. Nouveau refus. Sans explication. Une attitude navrante dont les esprits malveillants à l’origine des rumeurs sur les conséquences potentielles de la théorie du genre se délectent et se réjouissent.

« Nous n’avons que très peu de temps pour faire de nos élèves des citoyens intelligents humainement », explique Ronan Chérel, professeur d’histoire-géographie au collège Rosa Parks, à Rennes. L’an dernier, il a participé avec un groupe 8 élèves – 6 filles et 2 garçons - de 3e, aux Olympes de la parole, un concours annuel organisé par l’Association françaises des femmes diplômées des universités, sur le thème suivant : « De nos jours, le sport est-il un facteur d'émancipation des filles et des femmes dans la société ? Tous les sports individuels ou collectifs sont-ils ouverts aux filles et aux femmes ? »

Pour le professeur rennais, le programme scolaire permet de canaliser les énergies vers du positif. C’est ensuite la sensibilité de l’enseignant qui mène à traiter le thème de l’égalité, dont l’égalité des sexes. Se saisir des opportunités offertes par l’Institution, comme le concours d’éloquence, est alors capital pour leur donner matière à « plaider des choses civiquement, démontrer une réflexion, une implication, un militantisme naissant, peu importe. Pour construire leur humanisme. »

Il reviendra plus tard dans la discussion sur les programmes scolaires :

« La présence des femmes y est encore sous évaluée. Personnellement, je suis pour saisir les situations exemplaires dans l’Histoire, à travers les hommes ou les femmes. Celui ou celle qui illustre le mieux notre propos. »

Il conclut alors sur la situation actuelle, celle d’une démarche personnelle de la part des enseignants qui souhaitent en apprendre davantage sur les sujets. « Nous n’avons pas une connaissance universelle des choses, les manuels n’enseignent pas tout. C’est donc à nous de nous renseigner. Mais notre enseignement mériterait que l’on nous y aide », précise-t-il.  

Rennaise d’adoption, éditrice et auteure, Jessie Magana a fait de l’égalité filles-garçons son cheval de bataille. Dans ses ouvrages – Comment parler de l’égalité filles/garçons aux enfants, Editions du Baron Perché et Les mots indispensables pour parler du sexisme aux Editions Syros, co-écrit avec Alexandre Messager - elle livre des pistes éducatives pour y parvenir. Rencontre.

YEGG : Pourquoi l’éducation à l’égalité vous tient-elle tant à cœur ?

Jessie Magana: Tout le monde pense que l’égalité des sexes est réalisée, mais non ! Elle n’existe pas dans les esprits. Et les chiffres le prouvent - 80 % des tâches ménagères exécutées par les femmes, 16 à 20 % d’écart de salaires, 14% de femmes maires en France…etc.

Depuis Olympe de Gouges et les suffragettes, les choses ont bougé. Il y a eu de gros jalons historiques, 1945, les années 1970, et ce qui en a découlé est fort. Juridiquement, il y a eu des leviers puissants, comme la loi sur la parité, mais ça n’a pas été suffisant pour que les mentalités évoluent. Les femmes elles-mêmes sont conditionnées.

Comment peut-on faire évoluer les mentalités ?

La société projette des rôles avant même la naissance, il faut donc commencer à travailler avec les parents et les professionnels de la petite enfance sur les représentations, en s’affranchissant des stéréotypes notamment, sans pour autant tomber dans la neutralité.

Mon travail consiste à clarifier les choses de façon raisonnée, expliquer que le sexe biologique, le sexe culturel et l’orientation sexuelle sont trois choses bien différentes. Et toutes les combinaisons sont possibles ! On peut être très féminine et chef de chantier. On peut être très féminin et hétéro !

Le débat dépassionné est donc essentiel ?

Oui ! La confusion totale liée à l’ignorance et la crainte pose problème aujourd’hui. Nous sommes là pour discuter, mettre en perspective les choses, mais c’est très dur dans ce monde de l’immédiateté où les médias jouent sur les effets d’annonce. Il faut donc faire un travail pédagogique, malheureusement contré par les groupuscules anti-genre (Alliance Vita…etc.) qui jouent sur l’affect et la passion, eux.

Le but ?

Aboutir à une société plus juste où chacun se respecte, s’épanouit indépendamment de son orientation sexuée, accepte l’autre, est ouvert. Cela permettrait aussi de faire baisser les violences faites aux femmes. Si on continue de voir la sexualité de l’homme comme un besoin que la femme doit assouvir, alors il y aura toujours autant de viols et d’agressions.

Quel est le meilleur âge pour cela ?

Tous ! C’est mieux si on intervient tôt. Jusqu’à 2 ans, l’enfant ne sait pas s’il est fille ou garçon. C’est son entourage qui agit en fonction de son sexe. Il faut alors déconditionner les adultes. De 2 à 5 ans, les enfants construisent leur identité sexuée, en imitant l’adulte. On doit les laisser faire, les laisser jouer ensemble, favoriser la mixité. À 6-7 ans, ils restent entre sexes, et entrent dans la représentation. Là, il faut travailler sur les images, répondre à leurs interrogations.

C’est l’âge où l’on prend conscience du jugement des autres. Les adultes ont alors peur du regard de la société sur l’enfant, il ne faut pas, il faut laisser ouvert le champ des possibles. C’est plus facile pour les filles, car elles sont déjà dévalorisées. Les revaloriser est primordial afin que les garçons acceptent et accèdent à leurs jeux, sans se sentir pour autant rabaissés, voire humiliés. Ils n’ont pas le droit de jouer à la poupée, de pleurer, d’être faible… Quelle ânerie !

Enfin, chez les adolescents, le sexe est la question centrale. Or l’éducation sexuelle n’est pas faite. À l’école, on n’évoque que la prévention et la reproduction, et les parents ont du mal à discuter sur le sujet. Jamais on ne parle aux ados du sexe sous son aspect plaisir, relation avec l’autre. Résultat, ils filent vers le porno. L’âge moyen du visionnage du premier film porno est 13 ans !

Quel est l’âge le plus critique ?

L’adolescence. S’il n’y a pas d’ouverture maximale, les ados restent sur le modèle ancestral qui prétend que le sexe est un besoin physique de l’homme comblé par la femme. On a noté que dès la classe de 3e les filles s’imposent elles-mêmes des limites. Elles choisissent, spontanément, des domaines d’études en sciences humaines, psycho… Se disant, à tort, que les matières scientifiques ne sont pas pour elles.

Comment détruit-on les stéréotypes ?

Je fais des parallèles avec le racisme ou je demande « tu n’as jamais été confronté à une injustice dans ta vie ? » Il faut aussi inverser les rôles, parler aux gens de leur enfance, faire émerger des choses de cette période, qu’ils se souviennent de ce qu’ils ont vécu, ressenti alors. Il faut questionner leurs représentations. Mais aborder l’identité sexuée c’est toucher au très intime, c’est donc très complexe.

Que pensez-vous de l’abandon de l’ABCD de l’Egalité ?

Quel dommage ! Car il y a là du boulot, les enseignants sont inconsciemment conditionnés, comme nous tous. ABCD ou pas, ce qui m’importe c’est la prise de conscience de l’égalité à tous les niveaux, de la crèche à la fac, qu’elle soit au cœur de l’éducation, de la société, des mentalités. Que tous les intervenants soient formés, que l’on travaille sur les stéréotypes, à des jeux sur les métiers avec les enfants, des jouets mixtes.

On doit former les enseignants et leur fournir des outils afin que cela fasse partie de leur quotidien, soit au centre de leur enseignement. Les manuels scolaires doivent être revus, mais aussi la littérature jeunesse, et toute la culture. L’effort doit être fait pour mettre en valeur des figures féminines en littérature, en histoire. Cette année, au brevet des collèges, les élèves ont eu un texte de Charlotte Delbo ! Ce sont les enseignants qui l’ont choisi, ce qui prouve qu’ils sont des têtes de pont. L’égalité des sexes est une fragile révolution, balbutiante et remise en cause. Il faut y travailler à tous les niveaux de la société, à tout instant.

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L'égalité, sur les bancs de l'éducation
Zéro pointé : la copie est à revoir
La ville forme ses agents
L'inspection académique fait l'autruche
L'égalité, pas que dans les livres
Jessie Magana, l'égalité à tout prix

Célian Ramis

YEGG fait sa BIennale de l'égalité : "Parler pour libérer les consciences" (4/5)

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Lors de la 4e Biennale de l’égalité femmes-hommes, la ministre des Droits des femmes, Najat Vallaud Belkacem a répondu à nos questions, samedi 17 mai.
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À l’occasion de la 4e Biennale de l’égalité femmes-hommes, la ministre des Droits des femmes, de la Ville, de la Jeunesse et des Sports, Najat Vallaud Belkacem était de passage à Lorient, samedi 17 mai. Elle a répondu à nos questions lors d’un point presse, à l’issue du débat auquel elle participait – en compagnie de Pierrick Massiot, président du Conseil régional de Bretagne – autour des politiques publiques d’égalité.

YEGG : La 4e Biennale de l’égalité se termine aujourd’hui en Bretagne, seule région à proposer ce type de manifestation (la ville de Reims organise également une Biennale de l’égalité). Pourrait-on imaginer que la Biennale de l’égalité soit imposée dans chaque région française, et chapotée par le ministère des Droits des femmes ?

Najat Vallaud Belkacem : C’est une très bonne idée ! Il faudrait en parler aux collègues des autres régions pour organiser tout ça. Ce que je peux dire de la Biennale de l’égalité en Bretagne, c’est que je trouve que c’est une initiative formidable. Deux jours pour mettre en lumière les inégalités et pour rassembler les acteurs autour d’un débat commun. C’est aussi l’occasion de découvrir des combats menés par d’autres structures.

J’aime aussi l’idée qu’elle tourne, qu’elle ne soit pas définie dans une ville en particulier (la Biennale a été organisée à Brest, Morlaix et Saint-Malo, ndlr). Aussi, la Biennale soulève des points cruciaux dont il est important de parler pour libérer les consciences. Car souvent les victimes n’ont même pas conscience d’en être ! Il faut leur faire prendre conscience de tout ça, c’est tout l’enjeu ici. Et ça passe par la communication…

YEGG : … et par la transversalité. On le sait, vous aimez jouer et agir avec tous vos domaines de compétence (droits des femmes, ville, jeunesse et sports). La preuve avec la récente nomination d’une ancienne athlète pour lutter contre l’homophobie dans le sport…

Najat Vallaud-Belkacem : Tout à fait ! J’ai le plaisir d’être en charge des Sports et de pouvoir agir pour sa féminisation. Je pense qu’il faut lutter contre toutes les discriminations. Et surtout lorsqu’elles sont subies en raison de son orientation sexuelle. J’ai nommé Maguy Nestoret-Ontanon pour être en charge de la lutte contre l’homophobie dans tous les sports. Je pense que quand on ne nomme pas le mal, on a du mal à le combattre. Pour l’homophobie, c’est la même chose. D’où la nomination de cette ancienne athlète pour lutter contre ça.

Média : La Biennale s’intéresse à l’égalité au quotidien. Alors qu’est-ce que l’égalité change au quotidien ?

Najat Vallaud-Belkacem : Aujourd’hui, nous n’avons pas l’égalité. Il faudrait donc se demander ce qu’elle changera quand on l’aura réalisée. L’égalité donne la liberté d’être soi. D’être une femme et être chef d’entreprise dans le BTP. D’être un homme et être assistant maternel. C’est génial comme projet de société et l’égalité est un élément essentiel dans tous les pays, nous l’avons encore dit lors du débat.

Média : Il y avait vendredi matin un débat intitulé « Éducation : faut-il avoir peur ? ». Qu’est-ce que vous en pensez ?

Najat Vallaud-Belkacem : Je suis ravie que la Biennale ait osée cet intitulé. Le droit des femmes ne doit pas se contenter de parler qu’aux initiés. Sinon, on avance très vite mais finalement on se rend compte que l’on est seul et que la société ne nous suit pas. Il faut acquérir le réflexe de l’égalité. Dans les médias, la télé, les pubs… tout dans la société nous pousse à exclure de notre champ d’horizon des rôles ou des métiers parce qu’ils sont attribués aux filles ou aux garçons.

L’éducation à l’égalité explique les différences qui existent mais explique aussi et surtout que nous aspirons aux mêmes choses. Il faut changer les mentalités, s’autoriser à ambitionner des choses. Et ça, ça se construit très jeune. Avoir accès à l’éducation à l’égalité, c’est ce que défendent les valeurs de la République.

Célian Ramis

YEGG fait sa BIennale de l'égalité : Le cerveau a-t-il un sexe ? (1/5)

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Lorient
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La neurobiologiste et directrice de recherche de l’Institut Pasteur, Catherine Vidal, présentait vendredi 16 mai sa conférence « Le cerveau a-t-il un sexe ? »
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À l’occasion de la 4e Biennale de l’égalité femmes-hommes, organisée par la région Bretagne au Palais des congrès de Lorient, la neurobiologiste et directrice de recherche de l’Institut Pasteur, Catherine Vidal, présentait vendredi 16 mai sa conférence « Le cerveau a-t-il un sexe ? »

Elle mène une double vie, Catherine Vidal, comme elle aime le dire au début de sa conférence. Dans sa première vie, elle est dans son labo et travaille sur la vie et la mort des neurones dans les maladies neuro-dégénératives. Et dans la seconde, elle s’intéresse aux stéréotypes et aux idées reçues qui concernent les femmes et les hommes.

Pas n’importe lesquels : ceux qui émanent de l’idéologie du déterminisme biologique. À savoir que les femmes et les hommes auraient un cerveau différent, d’où les inégalités entre les sexes. Pendant près d’une heure, la neurobiologiste va balayer les grandes idées reçues profondément gravées dans l’imagerie populaire. Le médecin, anatomiste et anthropologue Paul Broca défend, au XIXe siècle, l’idée d’une infériorité féminine due à la taille et au poids de leur cerveau, pesant environ 1,200 kg contre 1,350 kg en moyenne pour les hommes.

« Mais déjà à cette époque, on savait qu’il n’y avait pas de relation entre la taille et le poids du cerveau et l’intelligence. Par exemple, le cerveau d’Anatole France pesait 1 kg et celui d’Einstein 1,250 kg. On ne serait jamais allé dire qu’Einstein aurait pu être une femme… », démontre Catherine Vidal. Pour déconstruire les stéréotypes les plus ancrées dans l’opinion, elle se base alors sur plusieurs études et sondages menés d’abord dans les années 80 – le cerveau est découpé et placé dans le formol – puis dans les années 90 jusqu’à aujourd’hui – les études sont réalisées par IRM : « Ces dernières montrent que statistiquement, il n’y a pas de différences entre le cerveau d’une femme et le cerveau d’un homme. Avant, avec le formol, on tirait des conclusions à partir de probabilités. On disait alors que les femmes étaient plus douées en matière de communication car leur hémisphère gauche était plus développé et que les hommes étaient plus doués pour se repérer dans l’espace car leur hémisphère droit était plus développé. »

Plasticité cérébrale et théorie du genre

Mais le cerveau, et c’est là que réside toute la difficulté, est bien plus complexe. Catherine Vidal, elle, choisit de présenter et d’expliquer, simplement, le fonctionnement de la plasticité cérébrale, qui rejoint la théorie du genre « qui n’est pas une théorie mais un concept ».

C’est lors de la vie intra-utérine que se forment les organes et que se construit le cerveau : « Le bébé nait avec 100 milliards de neurones qui ne vont pas cesser de se multiplier. Mais il faut savoir qu’à la naissance, seulement 10% des neurones sont connectés entre eux ». 90% de nos milliards de synapses se fabriquent lors de la petite enfance et tout au long de notre existence. Si notre vision est très sommaire jusqu’à nos 5 ans – le temps que le nerf optique se développe intégralement jusqu’à la connexion au système nerveux – il en résulte que l’exposition de l’œil à la lumière est une condition obligatoire pour la connexion des neurones aux voies visuelles. Il en est alors de même pour toutes les connexions.

Pour la scientifique, pas de doute : « L’interaction avec l’environnement est indispensable à la construction du cerveau, sinon il ne peut pas se câbler. L’environnement et l’apprentissage jouent donc un rôle très important ». En effet, des études réalisées sur des pianistes, mathématiciens ou encore des jongleurs montrent que l’entrainement régulier, dès le plus jeune âge, amène l’épaississement de certaines zones nécessaires à la pratique choisie, et inversement, l’arrêt des exercices entraine un rétrécissement de ces zones.

D’autres cas école sont montrés ce vendredi à l’assemblée réunie dans l’Auditorium pour appuyer l’argument de la neurobiologiste : le cerveau est malléable – il est en effet plissé dans la boite crânienne – et peut s’adapter à certaines anomalies physiques sans les répercuter sur le mental – certaines personnes subissent des ablations d’un hémisphère du cerveau et récupèrent leurs capacités après rééducation de l’hémisphère restant. Seule compte la stimulation, l’interaction, avec son environnement social et culturel.

Interférence entre idéologie et pratique scientifique

« Hormis l’hypothalamus (dont une des fonctions est de réaliser la liaison entre le système nerveux et le système endocrinien, ndlr) qui active chaque mois des neurones afin de déclencher l’ovulation chez la femme et qui marque donc une différence associée à la reproduction, il n’y a pas de différence entre les sexes pour les fonctions cognitives », explique la conférencière.

Elle poursuit : « Jusqu’à 2 ans et demi, l’enfant n’est pas capable de s’identifier au masculin ou au féminin. Il n’a pas conscience de son sexe ». Par conséquent, ses goûts et sa personnalité sont forgés par son environnement, son éducation et sa culture – décor de la chambre, jouets, vêtements, etc. – « en fonction des normes de sexe ».

La plasticité cérébrale conforte donc la notion de sexe et de genre, conduisant inéluctablement à la théorie du genre, qui selon Catherine Vidal est une « réalité conceptuelle qui ne nie pas la réalité biologique, bien au contraire, elle l’intègre ». L’homme ne serait donc pas biologiquement programmé à mieux se repérer dans l’espace et la femme ne serait pas naturellement intuitive : « Les instincts sont ancrés dans la biologie mais leur expression est contrôlée par la culture ». Et donc par tous les stéréotypes véhiculés et transmis de génération en génération.

Pour Catherine Vidal, rien ne prouve que les cerveaux masculins et féminins sont diamétralement opposés, ni même légèrement différents mais tout converge vers la conclusion de la plasticité cérébrale : « Il n’y a pas de corrélation entre humeurs et fluctuations d’hormones. Chaque femme vit à sa façon son cycle mensuel, sa grossesse, sa ménopause… » En d’autres termes, chaque cerveau, féminin ou masculin, diffère en fonction de l’histoire de l’individu qui le porte, de son environnement et de ses interactions à l’extérieur au cours de son existence.

« Il y a une interférence entre l’idéologie et la pratique scientifique et l’idée d’un déterminisme biologique persiste toujours. Les biologistes doivent s’engager auprès des sciences sociales pour diffuser la culture de l’égalité entre les femmes et les hommes », conclut Catherine Vidal, fortement applaudie au terme de sa conférence.

Égalité des sexes : Le graal des chevalières de la table ronde

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Arvor, Rennes
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La réalisatrice finistérienne Marie Hélia présente son nouveau film à l’Arvor, du 27 novembre au 3 décembre : Les chevalières de la table ronde (« Liberté, Sexualités, Féminisme. 50 ans de luttes pour les droits des femmes »).
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La réalisatrice finistérienne Marie Hélia présente son nouveau film – produit par Paris Brest productions – à l’Arvor, du 27 novembre au 3 décembre : Les chevalières de la table ronde (« Liberté, Sexualités, Féminisme. 50 ans de luttes pour les droits des femmes »). Un documentaire  – centré sur 12 femmes qui ont milité au Planning familial et qui continuent de faire entendre leurs voies à travers leur quotidien et leur militantisme – qui flirte avec la fiction puisqu’en parallèle, le spectateur suit une Gorilla Girl dans sa traversée du Finistère à la recherche d’une pie noir, en l’honneur de Rosa Bonheur, une des premières femmes peintres du XIXe siècle à être reconnue internationalement. Interview de Marie Hélia.

YEGG : Pourquoi avoir choisi de centrer le film sur les militantes et créatrices du Planning familial ?

Marie Hélia : À l’origine, c’était une demande du Planning familial de Brest, qui réunissait les créatrices du PF Finistère. Elles ont des choses à dire et leurs mémoires sont précieuses. J’ai pu établir la liste et les rencontrer. Elles sont 8 à avoir participé à sa création, elles ont entre 86 et 90 ans.

Comment de temps cela vous a pris ?

Un an d’écriture et de rencontres environ. Mais au total, entre l’idée du film et la première projection, trois années se sont écoulées.

Pourquoi ce parallèle entre les créatrices du Planning familial et les chevaliers de la table ronde ?

C’est une lutte très épique. En plus, elles ont une classe incroyable. Elles étaient en lutte, en quête ! En quête de liberté. Le lien avec la table vient simplement de la référence à la table à repasser, avec évidemment une vague inspiration des légendes arthuriennes (la table ronde a été conçue pour que chacun siège à égalité, ndlr).

C’est d’ailleurs une artiste, Annelise Nguyên, qui a réalisé la table ronde. Pourquoi en faire construire une pour le film ?

Tout simplement parce que je ne voulais pas l’acheter chez Ikea. Et que je voulais vraiment inclure d’autres femmes artistes dans ce projet. Il n’y a pas qu’elle, il y a aussi Laetitia Sheriff.

Comment s’est passée la rencontre avec cette dernière ?

Je la connaissais déjà, de loin. J’étais persuadée que c’était elle qu’il fallait pour réaliser la bande originale du film. De la guitare et de la voix. Et c’est ce qu’elle fait. C’est une musique originale qu’elle propose ici. Quand elle a vu le film, elle a joué en direct avec la projection.

Est-ce que ce sera l’occasion d’organiser un ciné-concert avec cette auteure-compositeure-chanteuse ?

Ce serait bien. Pour l’instant, nous n’avons pas encore la version sans les paroles. Mais c’est une très belle collaboration.

Autre figure féminine importante dans le film : la Gorilla Girl, féministe américaine. Pourquoi l’inclure dans le scénario ?

Car elle représente la place des femmes dans la culture. Elle défend les femmes dans les arts. Elle symbolise le féminisme car c’est un personnage volontaire et libre. Et puis, c’est un personnage de fiction, ce qui vient perturbée le scénario du documentaire. C’est ça aussi que je trouvais intéressant. J’aime bien penser une forme pour chacun de mes films. C’est ce qui en fait leur force.

Et pourquoi Rosa Bonheur en particulier ?

Déjà, le nom Rosa Bonheur est magnifique. Je cherchais une peintre animalière, sans forcément que j’aime ses œuvres. Je trouve d’ailleurs sa peinture trop académique. Mais c’est aussi une femme qui ne se revendiquait pas féministe mais qui l’était par la force des choses.

Un peu comme vous…

C’est un féminisme instinctif. Moi, je me revendique féministe. Je pense d’ailleurs que quand on est une femme, c’est un pléonasme !

Vous avez rencontré les « anciennes » du Planning familial mais aussi les « nouvelles », la jeune génération de militantes. Avez-vous ressenti une différence dans la manière de militer ?

Non, vraiment pas. Elles militent toutes au PF et font preuve d’altruisme envers les autres femmes. Elles ne se battent pas simplement pour elles mais également pour les autres. Je les trouve pragmatiques. J’ai déjà réalisé un film sur les militants, qui s’appelle Dans la ville rouge, il s’agit là de militants perdus, paumés. Les féministes, elles se prennent en main au quotidien. Elles ne se laissent pas tomber dans les pièges de la télévision qui nous montre des femmes objets. On va bientôt nous dire de rentrer à la maison si ça continue !

Vous travaillez sur le territoire breton et avait réalisé le film dans le Finistère. Dans la région, le militantisme féministe est-il plus important qu’ailleurs selon vous ?

Je ne crois pas. Je ne crois pas à cette fumisterie du matriarcat breton, qui nous dit qu’en Bretagne, les femmes sont fortes et puissantes. Elles n’ont pas le pouvoir politique, pas le pouvoir économique et pas le pouvoir législatif. Tout ça, ça me gave grave ! Tout comme les bonnets rouges, je suis anti bonnets rouges de toute manière. Pour revenir à la question, je crois que le féminisme breton est le même qu’ailleurs. Il y a une légère baisse du militantisme, comme partout. Par exemple, au Planning, les bénévoles sont dures à trouver.

Le Planning familial parle aussi de réduction des moyens financiers. Est-ce que le film en profite pour aborder cette problématique ?

Je n’ai pas abordé l’aspect financier dans le film car je n’ai pas ressenti cette préoccupation dans le Finistère. Par contre, ce qui est dit et évoqué, c’est le manque de moyens et de temps mis à disposition. Comme par exemple l’accès à la sexualité dans les écoles. Ce n’est pas avec trois heures sur le sujet qu’on va les sensibiliser à la question. Il y a une vraie urgence de ce côté-là.

Qui sont les spectateurs qui viennent assister aux séances de projection ?

Le public est essentiellement féminin : 80% de femmes environ qui ont entre 40 et 65 ans. Mais on va aussi organiser des séances pour les scolaires, pour l’instant dans le Finistère dans les villes qui ont un Planning familial – Quimper, Brest, Douarnenez – puisque c’est la structure qui fera la sensibilisation.

Est-ce que la jeune génération est présente également ? Le féminisme peut parfois faire peur aux jeunes femmes…

C’est dommage, il n’est pas interdit de penser… La jeune génération a du mal à rentrer dans les salles pour voir un documentaire… Mais il y a quelques-unes quand même !

Par conséquent, le message de transmission est plus difficile à faire passer…

Le message se transmet mais c’est long, c’est normal. Nous n’avons pas les mêmes moyens de distribution que les blockbusters américains…. Le film est passé sur les chaines locales comme TBO, c’est positif, c’est comme ça que le message va passer. En tout cas, dans les salles, les spectateurs semblent ravis. Les chevalières de la table ronde ont une telle énergie ! Elles transmettent leur bonheur et leur joie de vivre. C’est super !

Merci Marie Hélia

Merci à vous.

Célian Ramis

Rentrée rennaise : Ambitions, attentes, actions

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Féminisme, politique, économie, vie quotidienne, culture… panorama de ce qui rythmera Rennes dans les mois à venir… Toujours au féminin !
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C’est la rentrée ! L’occasion pour YEGG de faire un point sur les grands chantiers de l’année 2013-2014. Féminisme, politique, économie, vie quotidienne, culture… panorama de ce qui rythmera Rennes dans les mois à venir… Toujours au féminin !

L’élue adjointe au maire de Rennes, déléguée aux droits des femmes, répond aux questions de YEGG concernant la politique menée par la ville pour l’égalité des sexes.

YEGG : Que pensez-vous de la loi-cadre pour l’égalité entre les femmes et les hommes, présentée en conseil des ministres le 3 juillet par Najat Vallaud-Belkacem ?

Jocelyne Bougeard : Je suis en contact permanent avec le ministère des Droits des femmes puisque je siège au Haut conseil à l’Egalité entre les femmes et les hommes. La loi proposée mérite toute notre attention puisqu’elle engage les collectivités, ce qui est assez nouveau. Ces dernières doivent travailler sur les droits des femmes ! Certaines dimensions de la loi vont encore être complétées, notamment en ce qui concerne les retraites, les gardes d’enfant, etc.

Vous parlez aussi de la dimension de l’égalité au travail ?

Le premier emploi des femmes est agent d’entretien. Scandaleux quand on sait qu’en réalité elles sont plus qualifiées et diplômées que les hommes. La ville de Rennes est le 3e employeur de la région avec près de 300 métiers et détient le label Egalité professionnelle. Aujourd’hui, notre objectif est de maintenir et/ou initier des actions spécifiques et des actions transversales.

D’où la signature de la charte européenne pour l’égalité entre les hommes et les femmes…

En effet, nous l’avons signée en 2006 et en juillet, le conseil municipal a signé un plan d’actions associé à cette charte, qui contient des actions déjà engagées dans notre politique, ainsi que nos objectifs. Nous avons défini 30 articles, à partir de nos constats et de l’identité de notre territoire.

Quels sont les points principaux de ce plan d’actions ?

Le principal axe de travail est de sensibiliser et d’informer la population tout au long de l’année. Et pas seulement de mettre en place des actions le 8 mars et le 25 novembre (journée internationale de lutte contre les violences faites aux femmes). Ensuite, la charte se concentre sur le travail des femmes dans sa globalité, c’est-à-dire qu’elle comprend les conditions des femmes au travail et l’égalité professionnelle. Car il faut savoir que, dans ce domaine, les lois ont 30 ans !

Peut-on vraiment « forcer » l’égalité professionnelle à travers une loi ?

Il est évident qu’il ne s’agit pas de licencier des hommes pour mettre des femmes à leur place. La loi n’est pas une option, ni une orientation, mais une mesure législative qui doit sécuriser les compétences de chacun et les mettre en avant. A compétences égales, les femmes doivent pouvoir accéder aux postes de cadres au même titre que les hommes. Nous avons un travail à fournir en amont pour proposer une éducation à l’égalité. Il est important de se reconnaître dans sa différence et sa richesse. Savoir que les hommes et les femmes ne sont pas complémentaires. Ils sont égaux.

Qu’en est-il de la défense des droits des femmes dans la campagne municipale ?

Le programme n’est pas définitif et officiel. La candidate socialiste Nathalie Appéré ne défendra pas simplement les femmes mais l’égalité entre les hommes et les femmes.

1 – Les chaises municipales : En 2014, les citoyens sont appelés aux urnes à l’occasion des élections municipales. Les 23 et 30 mars, les Rennais éliront un nouveau (une nouvelle ?) chef de file, Daniel Delaveau ayant annoncé en décembre dernier qu’il ne se présenterait pas pour un second mandat. C’est Nathalie Appéré, actuellement députée de la deuxième circonscription d’Ille-et-Vilaine et conseillère municipale déléguée au suivi du centre-ancien, qui a été désignée candidate du Parti Socialiste.

Elle s’opposera alors à Bruno Chavanat (UDI, ex-UMP), leader de l’opposition rennaise et conseiller municipal. Du côté d’Europe Ecologie Les Verts, une assemblée générale est organisée le 28 septembre afin de désigner le ou la candidate du parti, qui a d’ores et déjà annoncé qu’il présenterait une grande liste alternative. Cependant, aucune alliance avec les forces de gauche n’a pas été officialisée. En tête de liste du Front National se trouve Gérard de Mellon, dont l’objectif est de faire entrer son parti pour la première fois à la mairie de Rennes. Le Parti Pirate pourrait aussi se lancer dans la course aux Municipales en constituant une « liste citoyenne ». Rien n’a encore été officialisé depuis cette annonce en avril dernier. Les Français seront également sollicités le 25 mai 2014 pour les élections européennes.

2 – Pas de trêve : Selon le rapport 2013 de la Fondation Abbé Pierre sur l’état du mal-logement en France, il apparaît que 3,6 millions de personnes sont mal-logées, dont 685 000 sans domicile personnel, dans l’hexagone. À Rennes, la situation ne fait pas exception. Pour pallier aux difficultés de se loger, plusieurs associations se mobilisent tout au long de l’année. Comme le Droit Au Logement 35 ou encore Un Toit, c’est Un Droit qui réquisitionnent des lieux et accompagnent les sans-abris, majoritairement immigrés, en leur apportant une aide matérielle, juridique et/ou administrative.

Moins connue du grand public, l’association Foyer Saint-Benoit Labre, à Rennes, lutte contre le mal-logement au quotidien. Accueil, hébergement d’urgence et temporaire, accompagnement et insertion des personnes en difficulté sociale sont les principales missions du Foyer. En cette rentrée, l’association annonce sa collaboration avec d’autres structures, telles que le Service Intégré d’Accueil et d’Orientation 35, dépendant du ministère de l’Égalité des territoires et du Logement. Ensemble, ils développeront leur programme d’actions, le 10 septembre.

3 – Lien avec l’extérieur : Début septembre, la ville de Rennes a signé trois conventions de partenariat pour le renforcement de sa politique de prévention de la délinquance et de médiation, en privilégiant les liens entre les détenus et l’extérieur. Sont concernées l’association Enjeux d’enfants Grand Ouest, chargée d’accompagner et d’aider la relation entre un enfant et son parent incarcéré, Brin de Soleil Rennes, qui œuvre pour l’accueil et l’hébergement temporaire des proches des détenus en attente de parloir et SOS Victimes 35, accompagnant les victimes d’infractions pénales.

Elles ont reçu respectivement 9 000, 8 000 et 15 033 euros de subvention pour l’année 2013. Le partenariat, valable un an et renouvelable deux fois, se base évidemment sur un échange de bon procédé. De son côté, la ville de Rennes s’engage à transmettre les informations en lien avec les missions de ces associations et se doit d’apporter son soutien aux actions et manifestations organisées. En contrepartie, les trois structures éclaireront de leurs expertises des groupes de travail, des séminaires et des situations spécifiques organisés par la municipalité.

1 – Centre commercial recrute employés : Le centre Alma, en plein travaux depuis 17 mois, s’étend sur 30 000 m2 supplémentaires et se rénove pour accueillir 40 nouvelles boutiques qui seront dévoilées le 23 octobre prochain à l’occasion de l’inauguration de la nouvelle version. Gaëlle Aubrée, directrice depuis deux ans du centre commercial l’a annoncé en mai dernier : 200 nouveaux emplois seront créés dès la rentrée de septembre dans l’établissment qu’elle dirige.

Ces recrutements sont issus de la signature d’une convention entre le centre Alma et la Maison de l’emploi, de l’insertion et de la formation (Meif), présidée par Gwenaële Hamon (par ailleurs adjointe au Maire de Rennes). Le compromis favorise, entre autre, l’embauche de salariés issus des quartiers environnant au centre commercial (Brequigny, Le Blosne). L’objectif est de privilégier les recutements « de proximité » et de redynamiser le sud de Rennes. Ainsi, la plupart des candidatures ont été centralisées à la Meif ainsi qu’à Pôle emploi. L’essentiel des postes à pourvoir concernent des emplois liés à la vente ou au ménage.

2 – PSA se barre : L’industrie rennaise a-t-elle encore de l’avenir ? La situation de PSA-La Janais sera en tout cas observée de très près en ce dernier trimestre de l’année 2013. La direction du fabriquant automobile a d’ores et déjà fait savoir que sept à huit jours seraient chômés en septembre, dix en octobre et six en novembre. Le plan social validé en avril dernier par le Comité central d’entreprise de PSA prévoit la suppression de 1 400 postes sur les 5 500 que compte le site rennais. La Janais, située à Chartres-de-Bretagne, ne sera pas pour autant laissée à l’abandon.

La SNCF, le groupe Pigeon et l’entreprise B3Eco Design ont, en effet, fait savoir leur souhait de s’implanter sur les terres de Peugeot-Citroën. Des annonces qui laissent entrevoir la possibilité d’embauches pour les futurs-ex PSA, et ce, dès septembre pour un début d’activité en fin d’année. La désindustrialisation devrait toutefois toucher un autre lieu historique de la capitale bretonne puisque la direction de Cooper standard a annoncé le transfert des activités de la Barre Thomas, possiblement vers une future usine construite à Châteaubourg.

3 – Re-Retraites : Une nouvelle fois sur le devant de la scène médiatique et politique, la réforme des retraites risque de provoquer plus d’un mécontentement, voire un automne explosif, et pas seulement à Paris. À Rennes, les forces syndicales ont déjà appelé à manifester ce 10 septembre place de la Mairie contre le projet de loi engagé par le gouvernement de Jean-Marc Ayrault qui prévoit, entre autre, l’allongement à 43 annuités la durée de cotisation pour une retraite à taux plein. La pénibilité du travail devrait également être prise en compte dans le calcul des pensions.

La CGT, FO et Solidaires ont dénoncé, dans un communiqué unitaire, ces premières mesures ainsi que l’opposition entre le secteur public et le privé. Les syndicats soulignent la difficulté pour des jeunes, dont les études sont de plus en plus longues, à atteindre la durée de cotisation minimum. Ils réclament aussi la sortie « des logiques qui ont diminué le niveau des pensions et crée des inégalités entre les femmes et les hommes ».

1 – Qui a eu cette idée folle ? : Depuis le 3 septembre, plus de 13 000 petits rennais ont retrouvé les bancs de l’école et le lot de nouveautés qui les accompagnent. Désormais, pour les élèves des 81 établissements publics de primaire et maternelle, la classe c’est 4,5 jours par semaine. C’est en effet dès cette rentrée que la très discutée réforme des rythmes scolaires (voir notre Focus dans le n°14 de YEGG-Mai 2013) entre en application à Rennes.

Cette nouvelle organisation prévoit une concentration des matières fondamentales le matin, une pause méridienne allongée permetant la pratique d’activités encadrées, deux heures de cours l’après-midi puis la mise en place d’ateliers périscolaires en lien avec le tissu associatif local. L’enseignement privé appliquera ces nouveux horaires dès septembre 2014. Et la rentrée s’annonce particulièrement chargée pour les professionnels de l’Éducation de la capitale bretonne puisque la ville compte 600 écoliers de plus que l’année dernière. Une augmentation de la démographie compensée cette année par l’embauche de 65 professeurs des écoles supplémentaires dans l’Académie de Rennes.

2 – Souriez : Alors que Marseille a occupé une place de choix cet été dans les rubriques faits divers des journaux français, Rennes a décidé de jouer la carte de la sécurité. Ou en tout cas du sentiment de sécurité. Le conseil municipal du mois de juillet a permis d’acter l’installation de trois caméras de vidéo-surveillance supplémentaires, sous les arcades de la place de la République. Une décision qui porte à 28 le nombre d’outils aussi baptisés « vidéo-pro­tection » à Rennes.

Rappelons qu’en mars dernier, les élus rennais avaient voté l’implantation de quatre caméras dans le quartier du Gros-Chêne, au nord de Rennes. Mais c’est au sud de la ville que la mairie a du faire face à des difficultés cet été. Le Blosne a en effet été le théâtre de conflits communautaires et de vives tensions entre les policiers et certains habitants. Les questions liées à la protection de la personne seront sans nul doute au coeur des prochaines élections municipales. Bruno Chavanat, leader de l’opposition municipale et candidat de la droite à la mairie, a en effet interpellé plusieurs fois la majorité socialiste sur ces faits divers lors de conseils municipaux.

3 – Les grands travaux : Sensible au bruit ? Quittez Rennes ! C’est en 2014 que le gros des travaux commencera pour la construction de la ligne B du métro. Elle rejoindra le sud-ouest de la ville au nord-est en passant par la place Sainte-Anne, laquelle accueillera également le futur Centre des congrès en lieu et place de l’ancien couvent des Jacobins. Autres travaux importants dans le centre-ville, ceux destinés à transformer le mail François Mitterrand.

Ce qui était il y a quelques mois encore un parking pouvant accueillir 400 véhicules se transformera en un grand espace réservé aux piétons dans l’objectif de lier de façon plus fluide le centre-ville et l’ouest de Rennes. Les travaux autour de la gare se poursuivront aussi pour accueillir le futur quartier Eurorennes à l’horizon 2020. Au nord, c’est la zone Maurepas- Gayeulles qui entamera sa rénovation. Les premiers travaux débuteront au printemps 2014 et s’étenderont sur au moins… 15 ans ! Le projet de la mairie prévoit la construction d’environ 1 200 logements et la démolition de 366. Le centre commercial du Gast, implanté au coeur de Maurepas, qui accueillera une station de métro de la ligne B, sera également rénové.

1 – Les marquises de Sévigné : S’il y a une institution culturelle qui met les femmes à l’honneur, c’est bien le Carré Sévigné, à Cesson. Cette année encore, Carole Lardoux, directrice artistique du lieu, se démarque des autres salles de spectacles de Rennes et de ses alentours en proposant une programmation audacieuse que nous serions tentés de qualifier de « féministe », au pire féminine. Meriem Menant, qui inaugurera la saison 2013-2014 le 8 octobre prochain, enfilera, à trois reprises son costume d’Emma la clown.

Côté musique, on attend le trio vocal humoristique Les Amuses Girls, les chanteuses et musiciennes Claire Diterzi, Rokia Traoré, Brigitte Fontaine ou encore Suzy Firth et son spectacle « Women & Song » . On attend particulièrement Modèles, par la compagnie La part des Anges. Les neuf auteures de la pièce et six comédiennes tenteront de répondre à cette question : « Qu’est-ce qu’être une femme en 2013 ? » Côté danse, Passion simple, de la compagnie L’éolienne, explore les mécanismes de la passion à travers quatre solos féminins. Toute la programmation et les infos pratiques sur www.ville-cesson-sevigne.fr

2 – Toutes en Trans : C’est LE rendez-vous culturel de début décembre à Rennes. Les Trans musicales mettront à l’honneur du 5 au 7 décembre prochain les talents émergeants de la scène musiques actuelles. L’édition 2013 est particulièrement attendue puisque le festival fêtera ses 35 ans. Pour autant, Béatrice Macé et Jean-Louis Brossard, co-directeurs de l’ATM (association Trans musicales) ont d’ores et déjà fait savoir qu’il s’agirait d’un « non anniversaire » . On se consolera avec une prog’ dont, à l’heure où nous écrivons ces lignes, vingt-huit noms ont été dévoilés. YEGG attend avec impatience les canadiens de Chic Gamine (quatre chanteuses et un batteur percussionniste).

La formation d’outre Atlantique allie avec une certaine aisance r’n'b, pop et soul music recréant ainsi une ambiance de soirées entre bonnes copines qui donnent de la voix. Autre chanteuse attendue, La Yegros. Elle vient d’Argentine où elle est considérée comme « la reine de l’underground ». L’ATM nous promet « une fête totale » grâce à un mélange de musique traditionnelle de son pays et de danse africaine. Enfin, on garde bien évidemment un oeil sur les quatre rennais de Superets.

3 – Une bouffée d’Aire : Programmation culturelle particulièrement attendue en cette saison 2013-2014 : celle de L’Aire Libre. Le « théâtre pour une parole vivante » implanté à Saint-Jacques de la Lande et racheté en janvier dernier par Maël Le Goff et Émilie Audren, co-directeurs du festival Mythos, fera pour la première fois sa rentrée en même temps que les autres structures rennaises. Si, à l’heure où nous écrivons ces lignes, l’ensemble des rendez-vous n’ont pas été annoncés, on sait d’ores et déjà que cette fin d’année 2013 ne sera pas placée sous le signe de la féminité…

Sur les cinq noms dévoilés sur le site internet du théâtre (parmi lesquels Dominique A), presque pas de femme, hormis le trio allemand She she pop, qui présentera « Testament », du 14 au 16 novembre, dans le cadre du festival Mettre en scène. On compte donc sur l’année 2014 pour redresser la barre. Autre enjeux pour les programmateurs, faire cohabiter des propositions de lieu culturel avec celles de festival. L’Aire Libre deviendra-t-elle la vitrine de Mythos ? À moins que le rendez-vous annuel implanté dans le parc du Thabor permette à une salle de spectacles excentrée de se faire un nom… Réponse dans quelques mois.

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2013 - 2014 : Votre ville en mouvement
Féminisme : Jocelyne Bougeard
Politique : Élections, Engagement, Suivi
Économie : Emplois, Chômage, Retraites
Vie quotidienne : École, Sécurité, Travaux
Culture : Femmes en scène

Célian Ramis

L'éducation sur les bancs du conseil municipal

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La rentrée a animé le débat entre les élus de la ville de Rennes. Toujours en cause : l’application « précipitée » de la semaine de 4,5 jours en Ille-et-Vilaine.
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Le conseil municipal de Rennes a fait sa rentrée, lundi 9 septembre. Et la rentrée d’ailleurs a animé le débat entre les élus de la ville de Rennes. Toujours en cause : l’application « précipitée » de la semaine de 4,5 jours en Ille-et-Vilaine.

Après avoir rendu hommage à Anne Cogné, conseillère municipale de 1983 à 1995 et militante féministe importante – c’est elle qui créa la Journée des Femmes à Rennes mais aussi le Centre rennais d’information des femmes entre autre, le conseil municipal a démarré par un sujet épineux : la rentrée scolaire. En effet, la municipalité a choisi en début d’année d’appliquer la réforme des 4 jours et demi dès la rentrée de septembre. Un choix politique qui ne fait pas consensus.

Sans surprises, Bruno Chavanat, leader de l’opposition, souligne « l’incertitude sur le contenu des activités périscolaires » et s’interroge sur le « sérieux de l’encadrement » en employant des étudiants titulaires du BAFA, qui selon lui n’est pas la garantie d’une qualité éducative.

Du côté d’Alliance citoyenne, Rémy Lescure évoque les difficultés de cette nouvelle organisation en citant l’allongement de la pause méridienne qui « semble peu utilisée pour les ateliers périscolaires », les temps de garderie du matin entre 8h20 et 8h45 « avec des manques de personnel », ainsi que des problèmes de transfert des enfants vers les centres de loisirs le mercredi midi. Sans oublier de mentionner qu’Alliance citoyenne juge la réforme « bonne sur le fond ».

Pour Gwenaële Hamon, adjointe au maire de Rennes déléguée à l’Education, « nous pouvons nous féliciter ». Aussi bien au niveau national avec la création de 7 500 postes et « une formation des enseignants qui se reconstruit », qu’au niveau local avec l’ouverture de 18 classes – 10 en élémentaire et 8 en maternelle.

Célian Ramis

Elles veillent sur vous

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Quatre femmes, quatre personnalités, quatre lieux, quatre métiers. Un objectif : faire de la nuit un moment moins redouté.
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Quatre femmes, quatre personnalités, quatre lieux, quatre métiers. Un objectif : faire de la nuit un moment moins redouté.

Elles sont infirmière, conductrice de bus, bénévole pour le Samu social ou Noz’ambule, et elles protègent la population rennaise une fois le soleil couché. YEGG met en lumière quatre héroïnes du quotidien, qui, aux quatre coins de la capitale bretonne, veillent au bon déroulement de la nuit. Reportage en images.

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Elles éclairent vos nuits
Régine Boulé, 57 ans, bénévole au Samu social
Gaëlle Bourdeverre, 39 ans, infirmière aux urgences pédiatriques
Mélanie Durot, 27 ans, Noz’ambule
Khadija Bouvet, 42 ans, conductrice de bus
Nuit paisible

Célian Ramis

Rythmes scolaires : Rennes saute le pas

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La réforme des rythmes scolaires ne fait pas consensus et crée quelques débats houleux entre les élus, enseignants et parents. Reportage sur la situation dans les écoles rennaises.
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La ville de Rennes appliquera de nouveaux horaires dans les écoles maternelles et élémentaires dès septembre prochain. Enfants et enseignants se retrouveront tous les matins de la semaine de 8h45 à 12h, puis de 14h15 à 16h15 les lundis, mardis et jeudis. Vendredi, les cours s’achèveront à 16h. Le mercredi après-midi, repos. Objectif : une meilleure prise en compte des rythmes de l’enfant.

On pourrait se demander : qui a eu cette idée folle un jour de réformer l’école ? Mais la liste serait longue. Nous n’en citerons que deux : Xavier Darcos et Vincent Peillon. Le premier, ancien ministre de l’Edu­cation, supprime en 2008 une demi-journée de classe, allégeant la semaine des enfants à 24 heures, au lieu de 26, sur 4 jours. Le second, en poste depuis mai 2012, rétablit aujourd’hui la semaine à 4,5 jours, dans l’intérêt de l’enfant qui devrait être moins fatigué et plus concen­tré.

Un point sur lequel il est approuvé par les chronobiologistes, et fervemment défendu par le célèbre pédopsychiatre Marcel Rufo. Le décret du 24 janvier 2013 - publié au Journal Officiel deux jours plus tard – relatif à l’orga­nisation du temps scolaire dans les écoles maternelles et élémentaires, prévoit pour la rentrée prochaine « la mise en place d’une se­maine de 24 heures d’enseignement réparties sur 9 demi-journées ». Néanmoins, le Ministre autorise les communes françaises à demander le report de la réforme à la rentrée 2014 – date à laquelle devront aussi s’aligner les écoles privées. En 2013, 25% des enfants de l’Hexa­gone seront concernés par la mesure, en Ille-et-Vilaine, ils seront 37% à fréquenter l’école le mercredi matin.

Seules 14% des com­munes du département ont décidé de mettre en place le dispositif dès la rentrée prochaine.

La capitale bretonne, qui pourtant connaît la semaine des 4 jours depuis plus de 20 ans, fi­gure parmi les bons élèves, comme la majorité des grandes villes de gauche, en choisissant d’appliquer les nouveaux rythmes scolaires dès 2013. Pour Gwenaële Hamon, adjointe au maire en charge de l’Education, la priorité est « de renforcer, en parallèle de l’aide aux de­voirs, les activités périscolaires ».

En effet, ce temps se verra fortement augmenté puisque les enfants bénéficieront d’une offre de 800 heures d’ateliers, au lieu de 300 actuellement, réparties entre les moments encadrés par les Educateurs territoriaux des activités physiques et sportives (ETAPS), par les associations de quartier et par les animateurs munici­paux. « Nous souhaitons aussi développer les activités culturelles mais aussi tout ce qui peut être en lien avec les questions de discriminations, la découverte de la culture scientifique, l’éducation au numérique et à l’image, la citoyenneté, l’environnement… », explique-t-elle, en précisant la nécessité d’un cadre ludique.

En théorie, 45 minutes seront consacrées tous les jours (excepté le mercredi) aux ateliers. Des temps périscolaires, a priori, non modulables « sauf si on me présente des propositions qui nécessitent une autre orga­nisation ». Malgré la satisfaction générale de l’expérimentation menée dans deux écoles rennaises – Sonia Delaunay et Trégain – la ré­forme ne fait pas consensus. Une application du texte trop rapide ? « Non le blocage est au niveau des horaires. Les questions auraient été les mêmes en 2014… », répond l’élue.

Concernant la rentrée prochaine, Fabrice Marzin, élu centriste du groupe Alliance Citoyenne à Rennes, avouait en conseil muni­cipal, le 15 avril dernier, craindre « un grand ca­fouillage ». Gwenaële Hamon, de son côté, veut rassurer tous les inquiets : « Nous serons prêts en septembre. Mais on ne fige pas les choses, c’est une mise en place progressive ». Donc cafouillage peut-être mais pas trop grand.

Située à Beauregard, quartier rennais en plein essor, l’école Sonia Delaunay est pilote en terme de rythmes scolaires. A 4,5 jours par semaine jusqu’en 2008, puis à 4 jours en horaires décalés, soit 9h-12h / 14h15-17h15, l’établissement se prépare aujourd’hui à de nouveaux changements. Immersion.

Jeudi 18 avril, 14h05. Les enfants se re­groupent dans la cour de l’école, qui accueille 453 élèves répartis entre la maternelle et l’élémentaire. L’établissement va devoir appliquer la réforme Peillon à la rentrée. « Des ateliers sont proposés, par les ani­mateurs ainsi que les associations de quartier, lors de la pause méridienne. Jamais le soir, cependant (à partir de 17h15 commence l’aide aux devoirs, ndlr). C’est ce qui va changer », explique la directrice, Dominique Dubray. Pour elle :

« C’est une amélioration du dispositif existant. Il faut maintenant bien penser le contenu de ces temps périscolaires ».

Olivier, animateur titulaire au centre de loisirs de l’école depuis 7 ans, est enthou­siaste à l’idée de ce changement : « Nous allons pou­voir mettre en place un vrai programme d’animation ».

QU'EN PENSENT LES ENFANTS ?

14h15 – Les écoliers s’installent à leurs bureaux. Le retour au calme est exigé avant d’entamer l’après-mi­di. Dans la classe de CE2/CM1 - de mesdames Bléas et Garnier - les élèves s’expriment sur la réforme. Les avis sont mitigés mais favorables dans l’ensemble. Pour certains, travailler le mercredi matin est positif car cela implique de fréquenter l’école, et retrouver leurs camarades, une demi journée supplémentaire.

« Nous pourrons apprendre plus de choses », déclare une élève. « Nous serons plus concentrés », dit son voisin. Pour d’autres, cela signifie se lever un matin de plus… « La coupure me faisait du bien », dit timidement un garçon. Au fond de la classe, un élève angoisse : « je suis souvent puni, je vais l’être encore plus ! » Un aveu qui fait bien évidemment rire tous ses copains. Un peu moins son enseignante.

Ce qui fait débat au sein du groupe, ce sont les activités périscolaires. Quelques uns craignent de ne plus pouvoir pratiquer de loisirs, ou d’avoir moins de temps. « Il suffira simplement de reporter à l’après-midi ou au soir », leur répondent les « pros réforme » !

15h30 – Lors du conseil d’école, qui réunit les délégués de chaque classe, du CP au CM2 pour améliorer la vie quotidienne, la directrice leur demande leur point de vue sur les rythmes scolaires. Même nombre d’heures mais mieux organisées, journées plus courtes, aug­mentation de la fatigue sans la coupure du milieu de semaine… En règle générale, les remarques font écho à celles des CE2/CM1.

QU'EN PENSE LE CORPS ENSEIGNANTS ?

16h - Pendant la récré, qui s’effectue sur plusieurs temps afin d’éviter le vacarme dans les couloirs et dans la cour, les enseignants veillent au bon déroule­ment de la pause. Pour Johan Beyney, professeur de maternelle (moyenne section), la réforme est incom­plète :

« Elle devrait penser les rythmes scolaires à l’année, non à la journée ».

Peu loquace sur le sujet, il confie que son avis n’est pas représentatif de ses collègues, cette école fonctionnant déjà sur un rythme particulier. Pour conclure, il reste évasif : « A priori, pour les enfants, c’est positif… »

Un point sur lequel le rejoint Fanny, employée de vie scolaire (EVS), qui pense que les élèves seront moins fatigués l’après-midi. Petits bémols : le manque de consultation des EVS et l’application précipitée des nouveaux rythmes.

QU'EN PENSENT LES PARENTS ?

17h – Dans les couloirs, le calme règne. Dans les classes, c’est moins sûr. Devant le portail, plusieurs parents attendent la sortie de leurs bambins. Deux mamans, dont les enfants sont en CM1, regrettent le manque d’information concernant la future rentrée 2013 et « la mise en place trop rapide ». Selon elles, les activités ne seront pas accessibles à tous les enfants, à cause de leur grand nombre.

Autre contrainte : la fin de la journée à 16h15. Si pour elles, le problème ne se pose pas, leurs garçons étant capables de rentrer seuls, qu’en sera-t-il pour les parents dont les enfants sont plus jeunes ? A quelques mètres de là, sous le préau, une mère attend ses jumeaux, scolarisés en CE1. Pour elle, les nouveaux rythmes scolaires sont positifs :

« Le mercredi matin, ils dorment et trainent devant la télé, alors ce n’est pas plus mal qu’ils soient à l’école ».

La réforme, sur son application, ne fait pas consensus. Que Vincent Peillon se rassure, sur le fond, personne ne demande son redoublement…

Gwenaële Hamon : « Sortez vos cahiers ! »

Depuis l’annonce des nouveaux rythmes scolaires à Rennes, Gwenaële Hamon, adjointe au maire chargée de l’Education et de la Jeunesse, est interpelée sur le « manque de concertation », d’après l’opposition municipale, et l’application rapide de la réforme. Depuis avril, une nouvelle phase est lancée : celle des réunions école par école « pour préparer un plan d’intervention avant le conseil d’école du 3e trimestre » avec les représentants du monde éducatif, sportif, culturel, associatif et les délégués de parents d’élèves de maternelle et d’élémentaire.

Au préalable, ont été recueillis les points de vue des directeurs d’établissements et des responsables de l’animation des écoles. En parallèle, des rencontres entre les maires d’Ille-et-Vilaine sont organisées « afin d’échanger sur les différentes pratiques et de partager les diverses expériences ». En ce qui concerne la décision d’appliquer la réforme en septembre 2013, l’élue explique « qu’en 2014, il n’y aurait pas eu plus de consensus, puisque le blocage est au niveau des horaires ».

Bruno Chavanat : « Zéro pointé »

Le 11 avril, Bruno Chavanat, leader de l’opposition à Rennes, organisait une table ronde, à la Maison de l’Agriculture, à laquelle il conviait parents, enseignants et représentants du monde associatif à prendre part à débat. Certains s’inquiètent quant à la formation des animateurs, employés par la municipalité, intervenant sur les temps périscolaires : « Est-ce que l’on souhaite laisser nos enfants avec des animateurs pas ou peu formés ? »

D’autres parents s’interrogent sur l’allongement de la pause méridienne qualifiée d’« accidentogène » et la mise en place d’activités sur ce même temps : « Il y a 30 ans, on bossait à l’école. Maintenant, on fait de la peinture… La réforme devrait prévoir d’agrandir la place des enseignements fondamentaux », déclare une mère de famille.  A l’issue de la réunion, Bruno Chavanat prend en compte les diverses réflexions. « Les choix ont déjà été faits. Le but maintenant est de savoir sur quels points nous pouvons peser », explique-t-il. Quatre jours plus tard, il interpelle ses collègues de la majorité lors du conseil municipal, sur l’intérêt de l’enfant dans cette réforme et sur le manque de structures à disposition de la Ville… Il est inquiet quant à la réalisation des activités périscolaires.

CGT 35 : « Et moi m’dame ? »

Alors pourquoi tant de précipitations ? ». Cette question, la CGT la pose dans une lettre adressée aux maires et conseillers municipaux d’Ille-et-Vilaine, ren­due publique le 17 avril dernier. Depuis l’annonce de Vincent Peillon de mettre en oeuvre la réforme, celui qui se revendique syndicat majoritaire chez les enseignants n’a cessé de faire entendre sa voix. Manifestations, tracts, grèves... la CGT cherche avant tout à entrer et/ou rester dans le débat. Si la confédération ne s’oppose pas fondamentalement à ces changements prévus dans l’Education, elle reproche néanmoins aux élus en charge du dossier le manque de concertation avec les partenaires sociaux.

Selon Loïc Morel, secrétaire général CGT 35, qui signe la lettre, tous les aspects de la réforme n’ont pas été pris en compte. Le syndicat s’interroge : « Comment prétendre modifier le rythme de vie des élèves sans avoir une réflexion globale sur celui des parents? ». La CGT pointe aussi du doigt l’ab­sence de « vraie réflexion » sur le volume du programme scolaire et sur la qualité de l’accueil périscolaire dans un contexte économique difficile pour les collectivités locales. La CGT 35 conclut : « Personne n’est prêt ! »

Sylvie Epaud : maire (PS) de Noyal-Châtillon-sur-Seiche (440 élèves en écoles primaire et maternelle publiques)

« En début d’année, lors des voeux à la population, l’équipe municipale souhaitait vraiment travailler pour 2013. On ne part pas de rien, notre structure enfant-jeunesse est solide avec l’Union sportive et l’antenne locale des Cadets de Bretagne. Mais nous avons une école en reconstruction. Maternelles et primaires se regrouperont dans les mêmes locaux en septembre 2013. Les 17 enseignants du public ont estimé ne pas avoir le temps de s’adapter à ces changements et d’appliquer la réforme.

Le regroupement est un gros dossier.[...] C’est une déception pour moi, mais cela nous permettra peut-être d’avoir un projet plus abouti, notamment avec le monde associatif qui doit lui aussi s’adapter. Et il ne va pas se réorganiser en 4 mois. [...]Il est évident que cette réforme est un surcoût mais je souhaite que le fond d’amorçage se pérennise aussi. Nous n’avons pas de problèmes de locaux. Les coûts concernent principalement la masse salariale et les intervenants pédagogiques.»

Depuis 9 ans, Nicole D. compte parmi les 32 psychologues scolaires d’Ille-et-Vilaine et intervient auprès de 10 groupes scolaires. Elle nous donne son avis personnel sur la réforme Peillon, qui la pousse à s’interroger sur l’objectif premier : l’intérêt de l’enfant. Pourtant, elle avoue ne pas avoir de réponses.

Elle n’est pas syndiquée à l’Association française des psychologues de l’éducation nationale mais elle a tout de même un point de vue bien défini sur l’Ecole. Ne pas forcer les choses, c’est un peu sa devise. « Dans mon travail, je m’entretiens avec l’enfant sur demande des parents, enseignants ou directeurs. L’élève n’est pas obligé d’accepter. S’il refuse que je le reçoive, c’est qu’il a une bonne raison. Je ne le force pas », précise-t-elle. Concernant la réforme, elle s’interroge sur son sens.

« Qu’est-ce que c’est l’école aujourd’hui et qu’est-ce qu’une journée pour l’enfant ? », se demande-t-elle. Pour Nicole, l’école est un lieu de vie que l’enfant fréquente 24h par semaine. Enfin, en principe car certains élèves vont à la garderie. Ils arrivent avant 8h et partent après 18h. « Il est là le problème, pas sur les rythmes scolaires », s’exclame-t-elle.

Vivre 10h d’affilées en collectivité, cela lui paraît trop important, surtout pour les tout petits. Plus qu’une question de rythme biologique, ne serait-ce pas simplement une question d’exigences dues à une évolution de la société ?

« À FORCE DE TOUT CADRER, ON PERD CE QUI FAIT LA VIE »

 En 30 ans de carrière, elle a vu changer l’école. Une expérience d’institutrice dans le XXe arrondissement, à partir de 1982, puis à Josselin (56), elle se reconvertit en rééducatrice scolaire en 1996 à Ploërmel pour enfin préparer un DESS en 2003 afin de devenir psychologue scolaire.

« Aujourd’hui, les enfants sont sans cesse sollicités par des choses qui leur sont imposées. Avant, les classes étaient des espaces ludiques d’expression, de création… Maintenant, même en maternelle, ils sont assis à des bureaux »
regrette la psychologue scolaire.

Nourrir l’imaginaire, enrichir l’expression orale, mêler les enseignements fondamentaux aux disciplines artistiques… Voilà comment Nicole entend le métier d’instit’, devenu dans les années 2000 professeur des écoles. L’esprit de l’école a changé selon elle, transformé par les évaluations, « une véritable obsession à partir des années 90 ». Ce qui pourrait alors expliquer l’augmentation du stress : « ça, ça change le rythme de l’enfant ».

Et le lien avec la biologie et les avis des spécialistes sur l’intérêt de nos petites têtes blondes ? « A force de trop cadrer les choses avec la science, on perd ce qui fait la vie ! », répond Nicole, qui ajoute : « Il ne faut pas se braquer sur les rythmes mais prendre en compte la vie de groupe, les personnalités qu’il y a dedans et son fonctionnement. Alors comment faire ? ».

La réforme proposée pour la rentrée ne semble pas répondre aux attentes de Nicole, qui avoue « ne pas avoir de réponses à toutes ces questions ».

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