Célian Ramis

8 mars : Aux USA, même ambivalence dans le sport et la culture

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Maison Internationale de Rennes
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Le 7 mars, l'Institut franco-américain de Rennes mettait sur la table la question de la promotion des femmes américaines à travers le sport et la culture, avec la venue d'Hélène Quanquin, spécialiste des mouvements féministes aux USA, à la Sorbonne.
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Elle n’est pas spécialiste du sport, a-t-elle précisé d’emblée, lors de la conférence qu’elle tenait le 7 mars, à l’Institut franco-américain. En revanche, la question des mouvements féministes aux Etats-Unis est le domaine de prédilection d’Hélène Quanquin, de Paris 3 – Sorbonne nouvelle.

La conférence ne pouvait pas mieux tomber. Le soir même, ou plutôt la nuit, la finale du championnat She Believes Cup (2e édition de la compétition visant à inciter les jeunes filles et les femmes à jouer au foot, réunissant les USA, la France, l’Allemagne et l’Angleterre) se déroulait à Washington et opposait l’équipe féminine de football des USA à celle de la France. Diffusée en direct sur C8, on pouvait assister à la victoire écrasante des Françaises, qui se sont imposées 3 à 0, face aux tenantes du titre.

Pour Hélène Quanquin, l’ascension des femmes dans le sport et la culture est due aux mouvements féministes. Parce que les femmes se sont battues pour se faire entendre et pour faire avancer leurs droits, vers l’égalité des sexes. Elles n’ont pas attendu la présidence de Donald Trump pour se mobiliser.

MOBILISATIONS FÉMINISTES

La marche du 21 janvier 2017, qui a réuni au lendemain de l’investiture plus de 4,5 millions de personnes aux USA – « la manifestation qui a réuni le plus de participant-e-s de toute l’histoire » - est en effet issue d’une tradition féministe basée sur le rassemblement.

Elles organisaient déjà des marches de femmes au début du XXe siècle, notamment en 1911 à New-York marquant leur volonté d’occuper l’espace ou encore en 1913 à Washington pour le droit de vote.

« Le mouvement féministe et suffragiste incorporait beaucoup d’éléments de la culture populaire, comme le théâtre, la chanson, les cartoons, la caricature… Toutefois, on voit que l’incorporation des revendications féminismes est graduelle. À cette époque, quand des femmes noires voulaient participer, certaines femmes blanches menaçaient de ne pas y participer. C’est l’époque de la ségrégation aux USA et le racisme est présent dans le féminisme. On parle alors pour ces marches de White women’s march. Pareil pour les revendications des femmes lesbiennes ! », développe la spécialiste des mouvements féministes américains.  

Elle poursuit :

« C’est là que l’on voit la différence avec janvier 2017. Dès novembre, dès l’élection, le comité d’organisation de la marche a voulu que l’événement réunisse tout le monde. Des blanches, des noires, des arabes, des latinas, des femmes voilées, des femmes trans, des hommes… ».

À quelques détails et années près, le féminisme américain connaît les mêmes vagues qu’en France et les années 60 et 70 représenteront également deux décennies importantes pour les droits des femmes, militant contre les discriminations liées au sexe, à la race et à l’ethnicité.

ÉGAL ACCÈS AUX SPORTS ET ACTIVITÉS

C’est dans ce contexte que sera adopté l’amendement Title IX qui protège les individus des discriminations basées sur le sexe dans les programmes éducatifs et activités recevant des fonds fédéraux (No person in the United States shall, on the basis of sex, be excluded from participation in, be denied the benefits of, or be subjected to discrimination under any education program or activity receiving Federal financial assistance.).

Un amendement qui enclenchera également une réflexion autour de la lutte contre le harcèlement sexuel dans les universités. Et qui empêchera, dans les écoles et facultés américaines, de restreindre la participation aux activités en raison de son sexe et de son genre. Et fera naitre également une loi imposant une réglementation de ce type dans les sports amateurs.

« Le sport fait partie intégrante de la vie des écoles et des universités américaines qui organisent beaucoup de compétitions. En 2002, 160 000 femmes y avaient participé. Maintenant, elles sont plus de 200 000. Il y a presque la parité. Et beaucoup de sportifs olympiques ont participé à ce type de compétition. Cela prouve l’incidence de certaines lois sur l’évolution du nombre de sportives de haut niveau », souligne Hélène Quanquin.

Et la dernière édition des JO, qui s’est déroulée à Rio en 2016, a mis en lumière plusieurs femmes athlètes, parmi lesquelles figurent l’équipe féminine de gymnastique – dont Simone Biles sera la plus médiatisée et mise en avant grâce à ses 4 médailles d’or -, Simone Manuel, première femme noire à remporter un titre olympique en natation ou encore Ibtihaj Muhammad, la première escrimeuse médaille à porter un voile lors de la compétition.

Pour les Etats-Unis, l’ensemble des performances les place au premier rang des JO de Rio avec 121 médailles. Dont 61 ont été gagnées par des femmes.

« Ce sont les deuxièmes Jeux olympiques qui marquent la supériorité des femmes aux USA, même si là c’est très léger. Elles ont remporté 27 médailles d’or, soit le même nombre que toute l’équipe britannique. »
indique la spécialiste.

POURTANT, LES HOMMES L’EMPORTENT…

Néanmoins, la promotion des femmes dans le sport interroge. Les performances prouvent leurs compétences et pourtant dans les médias quand Michael Phelps remporte l’argent, il remporte également le titre principal de Une, tandis que sur la même couverture, en plus petit, on inscrira la victoire de Katie Ledecky. Après tout, championne olympique à cinq reprises et championne du monde en grand bassin neuf fois, elle n’est que la détentrice des records du monde sur 400m, 800m et 1500m nage libre…

C’est ainsi que l’on constate l’ambivalence du domaine. D’un côté, le sport est un moyen pour promouvoir les droits des femmes. D’un autre, il est aussi un lieu d’inégalités subsistant entre les femmes et les hommes. Ces derniers gagnent plus d’argent, se réclamant d’un plus grand intérêt de la part des spectateurs/trices et par conséquent, des publicitaires et des sponsors.

Outre les mouvements féministes et les lois, les sportives doivent également se battre contre les préjugés, les idées reçues et les sportifs. À l’instar de Billie Jean King, grande joueuse de tennis, qui en 1973 a menacé de boycotter l’Open des Etats-Unis, revendiquant le droit des femmes à gagner le même salaire que les hommes en tournoi. La même année, elle crée une association de tennis féminin et bat Bobby Ricks – joueur réputé pour son machisme - en trois sets lors d’un match que ce dernier envisageait comme un moment voué à démontrer la supériorité masculine.

Pour Hélène Quanquin, « Billie Jean King a marqué l’histoire du tennis et l’évolution des droits des femmes dans ce sport. D’autant que c’est la première femme athlète à faire son coming-out. Ce qui lui coûtera plusieurs spots publicitaires, donc de l’argent. »

DANS LE CINÉMA, MÊME COMBAT

Les réflexions sexistes (des sportifs, des médias, des commentateurs sportifs…), la supériorité masculine très prégnante et les inégalités, notamment de salaires, se retrouvent également dans le domaine de la culture. En 2015 – 2016, cette problématique occupera une part importante du débat hollywoodien. Pour cause, l’affaire des piratages des mails de Sony qui fera découvrir à Jennifer Lawrence qu’elle était moins bien payée sur les pourcentages et les ventes du film.

Lors des cérémonies américaines, aux Oscars notamment, les voix féministes commencent à s’élever. Dans les discours de Patricia Arquette ou de Meryl Streep par exemple, l’égalité salariale est en première ligne des revendications. Suit ensuite le faible nombre de rôles principaux ou secondaires, mais importants, attribués aux femmes. Des messages que l’on entend également dans la bouche des anglaises Kate Winslet ou Emma Watson, et de plus en plus de la part des réalisatrices et actrices du cinéma français.

On notera alors que seules 28% environ des actrices obtiennent des rôles significatifs au cinéma et qu’aux Oscars seules 4 femmes ont été nominées dans la catégories des meilleur-e-s réalisateurs/trices dans l’histoire des récompenses. « Et les chiffres sont pires pour les femmes issues des minorités. On constate bien souvent que quand des femmes réalisent, il y a plus de rôles pour les femmes. », conclut Hélène Quanquin.

DANS LA MUSIQUE, PAREIL

Les chiffres sont révélateurs. Dans le secteur de la musique également. Moins de 5% des producteurs et ingénieurs sont des femmes, révèle la conférencière, qui enchaine immédiatement avec l’affaire Kesha. La chanteuse accuse son producteur, Dr Luke, de viol et demande alors à être libérée de son contrat, ce que le tribunal refusera, lui accordant seulement le droit de changer de producteur mais la sommant de rester chez Sony pour honorer l’acte signé.

La question tourne alors autour du pouvoir et de l’influence de l’industrie musicale, qui aurait tendance ces dernières années à instrumentaliser le féminisme. « Le pop féminisme serait-il la 4e vague ? », interpelle Hélène Quanquin. Le pop féminisme rassemble les chanteuses populaires actuelles, prônant leurs engagements féministes dans leurs discours et leurs chansons, comme Beyonce, en tête de cortège, Katy Perry, qui jusqu’à récemment hésitait tout de même à se revendiquer féministe, ou encore Miley Cirus, jugée plus trash.

UNE AMBIVALENCE PREGNANTE

Ce mouvement semble plus inclusif, à l’image de la marche de janvier 2017. Mais l’ambivalence persiste dans le secteur de la musique, du cinéma comme dans celui du sport. Là où on note des progrès, à ne pas négliger puisqu’ils influencent bon nombre de jeunes femmes, on ne peut nier également l’instrumentalisation marketing de ces milieux, régis par l’industrie, dans lesquels les inégalités persistent fortement.

« Les progrès sont liés aux mouvements féministes et à l’avancée de la législation. Mais on voit des limites à ce progrès. Les femmes n’ont toujours pas d’égal accès aux positions de pouvoir, sont toujours représentées de manière différente dans les médias et font face à un fonctionnement de l’industrie extrêmement inégalitaire. Pas seulement pour les femmes mais aussi pour les personnes issues des minorités. », conclut Hélène Quanquin.

À noter qu’en France, les mentalités stagnent aussi. La preuve avec les remarques sexistes – et racistes – des commentateurs sportifs. « Elles sont là nos petites françaises », pouvait-on entendre dans la nuit du 7 au 8 mars lors de la finale de la She Believes Cup. Aurait-on dit la même chose de l’équipe de France masculine ?

 

Célian Ramis

#Trans2016 : Convocation d’artistes engagé-e-s

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Parc expo, Rennes
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La légende des Trans Musicales voudrait que le vendredi soit le meilleur soir du Parc expo. C’est pourtant la programmation de ce samedi 3 décembre qui a révélé les sensations les plus puissantes.
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La légende des Trans Musicales voudrait que le vendredi soit le meilleur soir du Parc expo. Pour la rédaction, c’est pourtant la programmation de ce samedi 3 décembre qui a révélé les sensations les plus puissantes.

AISHA DEVI – HALL 9 – 23H

Après une dizaine d’années à se produire sous le nom de Kate Wax, la voilà de retour sous son vrai nom, Aïsha Devi. Dans le hall 9, devant ses platines et son ordinateur, elle est plongée dans le noir. Seul un grand écran l’éclaire, diffusant images et vidéos à l’esthétique psychédélique subjuguante.

La programmation parle même de « créations psychédéliques et transhumanistes du photographe et vidéaste Emile Barret ». On ne savait pas réellement à quoi s’attendre, on se réservait la surprise pour le live. À l’écran, ce sont des images détourées de statuettes égyptiennes et incas et des gravures bibliques qui défilent avec en fond un homme au visage entièrement maquillé et au look tribal, qui danse une sorte de trans.

Au fur et à mesure du concert, les clips évoluent. On voit alors passer des têtes de mort, des dessins d’hommes éventrés, des dessins anatomiques ou encore des formes démultipliées à la manière d’un kaléidoscope. Aucun doute, l’œil est accroché.

Il est même fait prisonnier de cet étrange dispositif qui tend à dévoiler des images de plus en plus trash, laissant apparaître des scènes de domination, d’asservissement, quasiment de torture, ainsi que des corps déchiquetés et mangés par des humains avant de laisser place à des images de nains indiens.

Et malgré la violence de certains visuels, il est difficile d’en détourner le regard. Comme s’il s’agissait là d’un acte volontaire pour se laisser guider vers une hypnose certaine, clef d’un état de transe à venir. Car la musique que produit Aïsha Devi est plus qu’une incantation. Elle est un rite initiatique au chant chamanique.

Ces influences népalaises et orientales, qu’elle puise dans ses origines, résonnent dans les percussions mais aussi dans sa voix. Une belle voix amplifiée qui inonde par vagues récurrentes le hall 9. Ce sont surtout des vocalises qu’elle développe et qu’elle enveloppe de quelques paroles qui sonnent comme une langue ancienne et morte.  

Les modulations de sa voix impressionnent. Et viennent se fondre dans les sonorités techno et robotiques. Aïsha Devi nous plonge dans un univers plutôt angoissant dans lequel on avance très lentement, prudemment, face à une lumière aveuglante. On est comme happé-e-s par ce halo imaginaire hypnotisant et intriguant.

On est pris-es dans la toile de cette chimère envoutante. Notre esprit voudrait changer d’air mais notre corps s’y refuse. Il faut affronter les notes stridentes qui déraillent comme des cris. Des sons insupportables et intenables, comme si on nous cisaillait les tympans. Mais le hall 9, pas encore bondé, semble suspendu. En attente d’une explosion électro et post dubstep, qui arrive sans trop languir.

La foule se met doucement en mouvement, synchronisé et cadencé. Elle répond présente et partante à l’univers infernal et chaotique d’Aïsha Devi qui finit ces morceaux en atteignant le sublime à travers des a cappella surnaturels et purs, bruts. L’artiste soprano crée la déroute et on accepte rapidement cette expérience insolite.

Sa voix puissante et magnifiée nous hisse au sommet d’une chaine de montagnes népalaise, où la neige et la roche, divines, s’entrelacent, comme les mandalas et les dessins d’enfants qui s’enlacent sur le grand écran qui trône sur la scène du hall 9.

 

REYKJAVIKURDAETUR – HALL 8 – 2h10

On les attendait avec impatience depuis la découverte de la programmation. Les filles de Reykjavik – traduction littérale de Reykjavikurdaetur – sont nombreuses. Plus d’une dizaine foulent la scène du hall 8 pour y mettre le feu nourri de leur talent de rappeuses et leur féminisme exacerbé.

Elles arrivent vêtues chacune d’une chemise blanche et d’un dessous type body ou t-shirt et shorty et donnent le ton d’entrée de jeu. Elles assument tout. Elles ont la pêche, des choses à dire, des messages à faire passer et du plaisir à (se) procurer. Et surtout, elles affichent une véritable envie de faire ce que bon leur semble.

S’allonger, vapoter, danser ou autre, tout est permis pour ces Islandaises qui alternent entre l’anglais et leur langue maternelle. Leur rap est métissé. À la fois tranchant, il peut être également langoureux comme festif et joyeux, bestial comme combattif et cru.

Si elles chantent en solo, en duo ou en trio, les autres restent présentes. Ensemble, elles font poids, elles font corps, et cette unité massive donne la sensation que les membres du collectif possèdent la scène et la maitrisent.

Autant que les discours qu’elles diffusent. « Cette chanson parlait de moi et mon mec, qui est un naze. Donc appelez-moi ! », lance l’une à la fin d’une chanson. « Celle-là est dédiée à mon ex : FUCK YOU ! », scande une autre quelques minutes plus tard, ajoutant en conclusion : « Il va brûler en enfer, je vous le jure. »

Armées de leurs voix et de leurs textes cinglants, elles optent également pour une attitude terriblement rafraichissante. Une attitude rap parée de grands sourires qu’elles conserveront jusqu’au bout du concert. Sans oublier la fraicheur de leur jeunesse revigorante qui claque sur leurs visages enjoués.

Elles font rapidement tomber la chemise, mais pas forcément la serviette que certaines ont sur leurs épaules, telles des boxeuses prêtes à mettre leurs adversaires KO, à coups de palabres bien senties. Elles assument leur corps, leurs formes, leur féminité, leur masculinité, leur humanité, leur sensualité, etc. Elles sont inspirantes.

La musique, travaillée par la DJ derrière ses platines au fond de la scène, est rythmée, puissante, changeante et évolutive. Elle peut être déstructurée par moments, ronde sur d’autres temps mais toujours pleine de vibrations et de profondeurs. À cela s’ajoute une diversité des voix qui tirent parfois sur de la soul et du r’n’b.

Elles s’affichent libérées, n’hésitent pas à mimer des branlettes, faire des gros doigts d’honneur, se mettre la main sur le sexe ou encore à onduler le corps. Affranchies des assignations qu’elles combattent dans leurs chansons, elles se font du bien et nous font du bien. Nous donnent la hargne tout en nous apaisant l’esprit.

Et quand elles demandent qui a envie d’un doigt dans le cul, tout en interprétant une chorégraphie lascive en mode « chevaucheuses », le public s’emballe. Leurs sourires ne les quittent pas. Au contraire, ils s’agrandissent. Tout comme leur énergie mordante et enthousiaste. Elles parlent de sexualité, de sodomie, de plaisir. Car le droit de parler de sexe n’est pas l’apanage des hommes.

« Nous pouvons faire ce que nous voulons. Je peux porter ce que je veux porter, boire autant que je veux et ne pas demander l’autorisation. », lâchent-elles vers la fin du set. Reykjavikurdaetur a quelque chose de contagieux. Et on espère que le message girl power, d’émancipation, pour le droit à disposer de nos corps et de nos vies, sera entendu de tou-te-s.

 

SAUROPOD – HALL 3 – 2H30

C’est sur les chapeaux de roue donc que l’on déboule dans le hall 3, pour la deuxième moitié du concert de Sauropod. Le trio norvégien a déjà bien réchauffé le public de son rock saisissant qui nous embarque instantanément dans son univers, qui n’est pas sans rappeler celui de Nirvana.

Ou du moins le temps d’une chanson. Car lorsque Jonas Royeng (guitare et chant) et Kamilla Waal Larsen (basse et chant) donnent de la voix en chœur, l’ensemble fait davantage écho aux Pixies. Leurs influences rock alternatif des années 90 ne sont pas dissimulées.

Elles planent au dessus du groupe, sans toutefois tomber dans des imitations caricaturales ou lassantes. Au contraire, Sauropod propose une énergie nouvelle, renforcée par un jeu de batterie puissant et la rapidité du guitariste dans l’exécution des notes et accords, produisant un rock déjanté.

Les chansons passent comme des éclairs. L’effet est fulgurant. On n’en a jamais assez et on ne s’ennuie pas une seconde.

Le trio fait naitre un sentiment d’urgence. De celui que l’on aime voir aux Trans Musicales. De celui qui puise dans des guitares saturées et des chants viscéraux.

On se laisse alors complètement subjuguer par les créations de Sauropod, qui nous bringuebalent à toute berzingue dans des courses poursuites psychotiques. Lui a la mâchoire serrée, une voix nasale et la gorge striée de veines prêtes à éclater. Elle, a une voix aérienne, sécurisante et marquée de simplicité. Sans artifices.

Et quand ils allient leurs voix, l’osmose de leurs contrastes est sublime. Le trio renvoie le sentiment d’un besoin vital de s’exprimer. Une nécessité à être là et envoyer ce rock acidulé, qui ne manque pas de piquant, et s’emplit au fil des chansons d’émotions authentiques et communicatives.

C’est une évidence. Un plaisir qu’ils partagent entre la scène et le public et qui se voit sur leurs visages. Dans un bien autre style que les rappeuses islandaises, les punks rockeurs norvégiens apportent une touche rafraichissante à la musique et à la soirée, à travers une proposition forte et joviale.

L’opportunité de terminer la 38e édition des Trans Musicales par deux véritables coups de cœur. Dommage que les deux projets aient été superposés dans la programmation. Quoi qu’il en soit, on retiendra ces artistes parmi les révélations du cru 2016.  

Célian Ramis

#Trans2016 : Invitation à des voyages expérimentaux

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Parc expo, Rennes
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Deuxième soir au Parc expo pour les Trans Musicales. Retours sur les concerts de The Barberettes, Nova Twins et No Zu, trois propositions riches et intéressantes, néanmoins pas toujours à la hauteur de nos espérances.
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Deuxième soir au Parc expo pour cette 38e édition des Trans Musicales. Retours sur les concerts de The Barberettes, Nova Twins et No Zu, trois propositions riches et intéressantes, néanmoins pas toujours à la hauteur de nos espérances.

THE BARBERETTES – HALL 8 – 00h10

Toutes les trois alignées, bandeaux de couleur dans les cheveux et robes pastel avec petit col Claudine blanc, pas de doute, le trio venu de Corée du Sud entend nous faire voyager dans le temps. Et nous plonger dans les années 40 à 60.

Et même un peu avant puisqu’elles puisent la base de leur formation sur le style barbershop, issu du début du siècle dernier, reposant sur des harmonies vocales a cappella. Ici, elles sont accompagnées par des instruments mais conservent l’esprit d’un style né chez les barbiers qui influencera par la suite le doo-wop.

Les Barberettes ont un air malicieux, une tenue et une coiffure impeccables et un sourire large. Leur manière de chanter et d’exécuter quelques mouvements synchronisés de danse n’est pas sans rappeler les trios ou quatuors féminins de la première moitié du 19e siècle, à l’instar des Ronettes qu’elles reprennent parmi les premières chansons du set.

Et Be my baby est d’office un succès. Le public n’hésite pas à joyeusement le reprendre en chœur avec les trois vocalistes qui s’inspirent également des Chordettes, de The Andrew Sisters ou des Kim Sisters pour ne citer que quelques unes de leurs influences. Dans la foule, ça danse et ça twiste même à certains moments.

La musique choisie pour les reprises coïncide évidemment avec l’univers choisi. L’univers de la culture populaire des années 50 et 60.

Les chanteuses coréennes alternent entre titres pop venus des Etats-Unis et de Corée. Et c’est là sans doute leur atout, de nous faire voyager et découvrir une culture peu connue en France (et même de nous faire découvrir notre propre répertoire en reprenant la chanson française Pop art de Tienou).

Car en dépit du fait qu’il est fortement appréciable de bouger son corps sur des morceaux aussi identifiés à une époque ou à des films pour certains, il est parfois difficile de comprendre ce que le trio apporte de différent et de singulier par rapport aux versions originales.

Les reprises sont parfois trop fidèles aux morceaux que l’on connaît déjà bien et on finit par se lasser.

Le trio garde malgré tout l’attention du public grâce à l’esthétique sonore des harmonies vocales qui s’adaptent parfaitement à leur voix soul, leur musique jazzy et leur côté un peu gospel.

On aimerait entendre leurs arrangements, leurs adaptations personnelles. Heureusement, la fin du concert laisse place à des compositions du trio qui semble alors plus à l’aise et ose davantage se lâcher. Les trois membres des Barberettes se révèlent alors dans une plus grande liberté que celle qui les confinait jusqu’ici dans l’ombre de leurs idoles.

Les sonorités, naturellement, sont plus modernes en cela qu’elles échappent au mimétisme de l’époque adulée et correspond plus à une réalité actuelle.

Le plaisir est présent et on se sent embarqué-e-s dans un univers simplement créé et non recréé. Dommage qu’il ait fallu attendre les dernières minutes du concert.

 

NOVA TWINS – HALL 3 – 1H10

Amy Love et Georgia South ne sont pas réellement sœurs mais peut-être âmes sœurs de cœur. À la manière de Thelma et Louise, à qui elles font référence dans une de leurs chansons. De véritables acolytes dans la musique et dans le besoin d’exprimer leur intériorité.

Et ça, elles ne s’éterniseront pas à nous le faire comprendre. Arrivées sur scène, munies d’une guitare et d’une basse, elles envoient dès les premières notes, soutenues par la puissance de la batterie, un avertissement : ici pas de chiqué, ce sera féroce et viscéral ou ça ne sera pas.

Le flow est lancé et il se déverse à vive allure, signe d’une contestation depuis longtemps nourrie de hargne et de volonté.

La volonté de ne pas se taire. Au contraire, de se battre, la tête haute et le bras en l’air. Le phrasé hip hop de la chanteuse impressionne, se confrontant frontalement à une musique agressive et puissante.

Cinglante et rock. Les britanniques de Nova Twins qualifient leur style de punk urbain. Et ça fonctionne.

Pas étonnant donc pour ce duo avide d’explorations et d’expérimentations de puiser dans différents genres composant l’underground londonien. Et de se laisser glisser par conséquent vers le grime, qui mêle au garage de la dance et de l’électro.

Le public est instantanément séduit et se fait embarquer dans des lignes électro avec un panache incroyable.

Leur énergie paraît sans limite. Des deux musiciennes se dégage un esprit rebelle, provocateur et guerrier. Sans forcer. Sans bouger dans tous les sens, elles captent l’attention, intègrent leur dynamisme et leur message à leur corporalité et savent les partager.

Le hall est rapidement blindé et de tous les côtés, ça danse, ça bouge, ça scrute. Personne ne semble rester indifférent à la proposition.

La performance des Nova Twins est sans faille. Elles démontrent toutes les deux, dans leur domaine, que ce soit par le chant ou à la basse, une maitrise totale de leur instrument. Elles savent où elles vont et savent où elles veulent en venir.

L’envie d’y aller et la verve combattive apparaissent comme l’essence même du projet musical et cet esprit se propage comme une trainée de poudre entre les rangs serrés et bouillonnants de la fosse.

Quarante minutes ne suffiront pas à les rassasier et nous non plus. On aurait voulu continuer une partie de la soirée à les regarder contrôler la scène.

Mais on se contentera d’un show dément complètement subjuguant dont la musique et l’attitude des Nova Twins résonneront dans notre tête et notre corps encore plusieurs heures après leur passage dans le hall 3.

 

NO ZU – HALL 9 – 2H

C’est donc l’esprit prêt à recevoir de nouvelles sensations et énergies que l’on se dirige vers le hall 9 qui accueille alors l’octuor australien No Zu. Un enthousiasme qui retombera comme un soufflet.

Pourtant, leur projet serait plutôt du genre intéressant et carrément transcendant s’il n’était pas répétitif et interminable…

Dès leur installation, le groupe s’affiche en tribu déjantée prise entre sonorités orientales, percussions, cuivres et chant ou incantation, peut-être plus. Ils appellent ça du heat beat et à ce niveau-là on leur fait confiance.

La scène est alors assiégée de sonorités très riches et mouvements incessants des musiciens qui bougent et dansent de manière viscérale.

Ça sonne jazzy et ça groove pas mal. Mais les morceaux sont longs et tournent en boucle. Les vocalises syncopées de la chanteuse, alliées à la voix samplée d’un des percussionnistes, dérangent l’oreille et percent les tympans.

On est alors assailli-e-s d’un sentiment de malaise, d’insécurité. Un sentiment désagréable qui nous donne envie de prendre la poudre d’escampette.

Malgré tout, on reste le cul vissé dans notre fauteuil. Car No Zu propose quelque chose d’unique, d’intriguant. Une techno tribale, un funk chamanique.

Sur le papier, on adhère aisément au projet. Mais en live, l’effet est perturbant.

Et au-delà de la déroute, la répétition des boucles, le peu de présence au micro de la chanteuse - qui passera plus de temps à se dandiner derrière - et la voix d’outre-tombe interfèrent avec notre enthousiasme initial. On aurait voulu apprécier l’instant mais au lieu de sauter au milieu de la foule, on reste hermétique aux créations présentées.

Célian Ramis

Le Grand Soufflet : Le rock grisant d'Iva Nova

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Parc du Thabor, Rennes
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Le Grand Soufflet boucle son édition 2016 sur un gros coup en présentant des artistes complètes et détonantes dont on retient l’incroyable énergie communicative, la puissance musicale et la créativité artistique.
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Les quatre musiciennes russes d’Iva Nova ont offert au Grand Soufflet une soirée de clôture dynamique et puissante. Leur énergie rock et girl power s’est propagée rapidement sous le chapiteau du festival, installé dans le parc du Thabor, samedi 15 octobre.

L’Argentine est le pays mis à l’honneur cette année mais ce sont les russes d’Iva Nova qui clôturent cette édition du Grand Soufflet. Mélange de rock, d’électro et de musiques slaves, c’est un spectacle psychédélique et festif que proposent Anastasia Postnikova (chant, clavier, percussions), Natalia Potapenko (accordéon, percussions), Galina Kiselesa (guitare, basse, percussions) et Ekaterina Fedorova (batterie, percussions).

Elles dégagent quelque chose de rock. Quelque chose de fort et de saisissant. Quelque chose qui s’apparente à de l’empowerment. La batterie cogne, les percussions accentuent la brutalité des sonorités et à cela s’ajoute la festivité du piano à bretelles.

Un joyeux mélange qui caractérise bien la proposition musicale de ces quatre musiciennes de St Pétersbourg, qui balancent une énergie viscérale et entrainante.

Le folklore de la musique slave s’exprime à travers le chant, la voix d’Anastasia Postnikova vibrant et résonnant dans l’ensemble du chapiteau. Les percussions marquent l’intensité des chansons influencées par des airs pop rock russes et sublimées par un univers novateur et futuriste, appuyé par l’harmonium et une modification vocale proche de celle d’un robot.

Chaque morceau est intense. Un grain de folie habite les musiciennes qui le partagent en toute générosité avec le public qui montre rapidement son enthousiasme. « Vous pouvez vous relaxer, on est russes mais pas des méchantes ! », plaisante la chanteuse en s’installant au clavier, pour y exécuter la partie calme du concert. Là encore, Iva Nova démontre sa capacité et son aisance à nous embarquer dans une aventure sensorielle incroyable.

Après plusieurs chansons dédiées à des femmes célèbres, ou non, elles nous content leurs vécus personnels. L’expérience de quatre musiciennes en tournée dans toute l’Europe. Et comme les paroles nous sont inaccessibles, elles nous invitent à laisser voguer notre imagination.

Guidé-e-s par les sons, les ambiances et les interprétations, festivaliers et festivalières se livrent à un lâcher prise réconfortant, suivant simplement les émotions délivrées par le spectacle.

Car il s’agit ici d’un véritable spectacle musical. Dans lequel chaque musicienne campe un rôle essentiel. Chacune se pare de son instrument mais aussi de percussions différentes. Et ensemble, elles recréent des mondes, des atmosphères et des histoires qu’elles interprètent sobrement devant les micros, qu’elles habitent par des danses sautillantes ou qu’elles théâtralisent avec intensité. Toujours avec des pointes d’humour qui apportent une habile légèreté.

Leur proposition est brillante, pleine de dynamisme et d’inventivité. Gratter les cordes de la basse avec une baguette de batterie instaure une ambiance imposante et quelque peu angoissante. Nous sommes dans un lit, endormi-e-s. « On ne vous promet pas d’être un bon rêve, peut-être un cauchemar… », murmure la chanteuse. Le rythme des instruments est plus lent, la voix de la chanteuse plus grave et son phrasé plus court, les sonorités plus psychédéliques.

Puis on se réveille, c’est le matin, « et le matin, c’est café, cigarette et exercices ! » Le tambourin résonne, l’accordéon se gonfle et se dégonfle à vive allure, les festivités joyeuses sont de retour. Avec leurs sourires s’entremêle un esprit sauvage et libre. Sans crier leur indépendance, celle-ci est flagrante et bouleversante.

Elles montrent, sans trop en faire, l’étendue de leurs talents et leur ingéniosité à s’emparer de tout ce qu’elles trouvent pour le transformer en arme musicale au service de leur univers et de leurs envies.

Elles puisent dans tout ce qu’elles sont et connaissent pour nous bringuebaler dans les contrées russes reculées, dans le bouillonnement de St Pétersbourg, sur les routes de l’Europe qu’elles traversent en bus avec leur équipe technique mais aussi dans l’intime et le quotidien.

« On dédie notre prochaine chanson à toutes les femmes ici, toutes les femmes dehors, toutes les femmes qui sont dans votre cœur messieurs, mais aussi toutes les femmes qui sont en vous si vous le sentez. La chansons s’appelle « The Witch » ! », scande Anastasia Postnikova avec ardeur. Si nous étions déjà convaincu-e-s par Iva Nova, le groupe finit de nous envouter par ce que les musiciennes transmettent avec poigne et sincérité.

Le Grand Soufflet boucle son édition 2016 sur un gros coup en présentant ces artistes complètes et détonantes dont on retient l’incroyable énergie communicative, la puissance musicale et la créativité artistique.

 

Célian Ramis

Mythos 2016 : Jain, cosmopolite et transgenre

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Festival Mythos, Rennes
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Jain était en concert le 23 avril dernier à Rennes. On se délecte d'une parole cosmopolite qu'elle transpose dans une musique transgenre colorée et joyeuse à laquelle on succombe instantanément.
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Après plusieurs coupures d’électricité consécutives affectant le site du festival Mythos, dans le parc du Thabor, Jain est montée sur la scène du Magic Mirror samedi 23 avril, pour un concert énergisant et sans frontières.

Son succès a été fulgurant. Fin 2015, elle sort son album Zanaka, après avoir sorti un EP intitulé Hope sur lequel figure le célèbre « Come ». En 2016, elle est nommée aux Victoires de la musique et enchaine les dates et festivals. Dont celui des arts de la parole, à Rennes. Et sa parole à elle est cosmopolite et se transpose dans une musique transgenre colorée et joyeuse à laquelle on succombe instantanément.  

Sur la pochette de son disque, Jain s’affiche dans sa robe noire au col blanc en déesse indienne à six bras. C’est au moins ce qui lui faut pour assurer le show qu’elle propose.

Seule sur scène, la jeune chanteuse nous invite au cœur de sa création artisanale, en loopant sa voix a capella et en reproduisant des sonorités électro en live.

Son one-woman-band détient une multitude de facettes transcontinentales qu’elle cultive depuis son enfance.

Originaire de Toulouse, elle passe ses premières années en France, apprend la batterie à Pau avant de s’initier aux percussions arabes entre Abu Dhabi et Dubaï et de s’influencer de l’afro-beat qu’elle découvre et intègre au Congo. Le titre de son album est un clin d’œil à l’héritage culturel de sa mère franco-malgache, Zanaka signifiant enfant en malgache.

Jain n’hésite pas à puiser dans toutes les richesses musicales qui se sont révélées à elle lors de ces divers périples. Et le résultat est sensationnel. On se délecte des ambiances tribales, des sonorités africaines tout comme de son phrasé emprunté au hip-hop américain. Le tout englobé dans une électro pop prenante qui oscille entre un sentiment d’urgence dans lequel la voix de la chanteuse se noie dans les samples et une sensation de bien-être envoutante et transcendante.

Ces musiques, très rythmiques entre les percussions et le synthé, sont faites pour danser. Son énergie est communicative et son partage avec le public, généreux.

En la voyant danser, sauter, bouger sur scène avec une telle envie d’emporter la foule dans son univers, on se libère d’un poids, on accepte le lâcher prise et le Magic Mirror se transforme rapidement en piste de clubbing.

Et la Toulousaine ne soigne pas uniquement sa musique d’une singularité désopilante mais aussi l’esthétique graphique et visuelle de son décor. Des écrans bordés de blanc et de dessins que l’on retrouve également sur ses instruments ou ses chaussures affichent des formes, des clips, des mots, qui soulignent et appuient l’univers éclectique de Jain avec un côté tribal et un style enfantin.

Car elle revendique sa jeunesse et ne rougit pas d’en faire partie du haut de ses 24 ans. Cela se ressent sur scène, elle assume sa musique et ses textes. Assume les changements d’ambiance et d’état, passant du djing fracassant à des instants plus calfeutrés comme lorsqu’elle prend sa guitare pour un moment privilégié et intimiste.

C’est là qu’elle révèle la pureté de sa voix légèrement éraillée et confiante.

Elle se montre aussi talentueuse dans le feutré que dans les beat animistes et nous hypnotise sans mal maniant parfaitement la dynamique de son concert très homogène niveau ambiance et chaleur et en même temps très mouvante dans les dimensions qu’elle fait prendre à ses chansons, capable de nous conter une balade presque folk aussi bien que de nous proposer un trek dans la jungle.

C’est certain, elle est une figure émergente de la nouvelle scène électro et s’impose comme une force douce. Elle invente son style qu’elle compose de ses influences internationales, principalement situées autour du continent africain, de sa voix soul et jazz et de là créé une ébullition des genres musicaux.

La voir à l’œuvre est fascinant. Pleine d’aisance, de naturel et de simplicité, elle souffle sur le cabaret botanique un vent de fraicheur et d’enthousiasme simple. Elle sollicite sans cesse son public qui répond avec une franche envie de participer.

Jain maitrise son show. Son organe vocal, comme sa machine et son clavier. Elle démontre ici qu’elle fait ce qu’elle veut, où elle veut, embarquant les spectatrices et spectateurs dans son monde généreux et stimulant.

Le jeu des lumières nous maintient dans cette atmosphère hors de l’espace et du temps, brisant les frontières entre les gens, les continents et les codes de l’électro. Entre les succès de son album Zanaka et les nouvelles chansons qu’elle teste directement sur son public, Jain se livre sans filtres et avec intelligence non pas à une démonstration ou à une performance mais à un instant de partage délicieux entre elle, sa musique et nous. Ça fonctionne, les barrières tombent, l’émotion circule et avec elle, les bonnes énergies libératrices et salvatrices.

Célian Ramis

Trans Musicales 2015 : L'art de la différence

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Parc Expo, Rennes
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Deuxième soir aux Trans Musicales, premier soir au Parc expo de Rennes. Une programmation éclectique et féminine pour ce jeudi 3 décembre.
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Deuxième soir aux Trans Musicales, premier soir au Parc expo de Rennes. Jeudi 3 décembre, les halls se sont animés au son des concerts éclectiques de la programmation. Et à la venue de quelques artistes féminines.

3SOMESISTERS – HALL 3

C’est le groupe que l’on retiendra dans cette soirée. Anthony, Bastien, Florent et Sophie marquent les esprits de par leur univers singulier et original. Coiffes et boucles d’oreilles bleues, robes-toges et attitudes de divas, la quatuor soigne l’esthétisme de son show et interpelle.

« Au départ, nous n’avions d’envie farouche de travestissement. Nous voulions être dans la tradition des groupes vocaux qui s’appellent « sisters quelque chose ». Et pour cela, il fallait ressembler à des sisters. », rigole le groupe avant d’expliquer l’envie de décalage, de ralliement visuel autour de l’outrancier. Et si leur paraître se teinte d’humour derrière un transformisme réfléchi, le lien et la cohérence avec la musique ne sont jamais rompus : « Car la musique, c’est la base de notre projet. On était bien plus doués pour la musique mais nous avons développé ces créatures en parallèle. »

Dès les premières notes, les 3somesisters imposent le silence. La voix est grave et n’est pas sans rappeler la signature vocale de Depeche Mode. Munis de claviers, de percussions et de voix maniées à souhait, ils mêlent électro, soul et dance des années 90 (le groupe ayant commencé par réaliser des cover des tubes 90’s comme « Free from desire » ou « I like to move it ») et s’en font les ambassadeurs modernes.

Car leurs arrangements ne sont pas restés perchés deux décennies en arrière. Loin de là. La pop transgenre des 3somesisters puise aussi bien dans le baroque que dans les sonorités ethniques et tribales. Les harmonies de leur voix, les polyphonies majestueuses, leur maquillage style aztéco-égyptien, et leurs attitudes de madonnes des banlieues populaires forment un ensemble homogène sans faille, jouant du décalage avec la modernité de leur proposition et entretenant le côté urbain-streetwear.

« On est de partout de par nos origines, de par les milieux dont nous sommes issus. On était tous musiciens. On a chacun fait des musiques du monde. », arbore fièrement le quatuor. Les emprunts ethniques seraient donc la matérialisation de ce qu’ils sont. Et en fin d’interview, Sophie exprime également le bien fondé d’explorer son côté féminin. Ce qu’il apporte va au-delà de la question du sexe et du genre.

« Je suis plutôt masculine à la base et ça m’a beaucoup apporté. On devient alors des individus. Il n’y a plus de distinction. », conclut-elle. 3somesisters, un groupe composé de 4 personnes donc, et non pas de 3 hommes et une femme. C’est ce qu’il en ressort sur scène où chaque diva androgyne est magistrale. Les membres du groupe s’amusent de la théâtralité de leurs personnages, tenant leurs rôles à merveille. Une démarche qui n’est pas incompatible avec le partage et la générosité de leur groove entrainant et enthousiasmant.

 

GEORGIA – HALL 8

Elle aurait pu devenir footballeuse professionnelle, nous signale le programme des Trans Musicales. Mais son amour pour Missy Elliott lui fait prendre la voie de la musique et de la batterie pour accompagner sa compatriote britannique Kate Tempest.

Celle-là même que l’on découvrait l’an dernier, un jeudi soir également des Trans, dans un hall voisin.

La jeune artiste se différencie de la poétesse anglaise dans un hip hop plus épuré et moins émotif. Pourtant, elle ne semble pas manquer d’émotions et d’inspiration mais les contient encore peut-être trop à l’intérieur en faveur d’une puissance vocale largement démontrée.

Georgia est néanmoins loin de n’avoir que sa voix comme talent puisqu’elle a réalisé, seule, son premier album dans lequel elle personnalise son univers. Des sonorités synthétisées, des notes tribales, du trip hop et une voix légèrement criarde, elle souligne très rapidement son style métissé.

Des arguments qui sèment l’incompréhension dans nos esprits face à une émotion peinant à circuler. Pourtant, l’enthousiasme et la présence de Georgia sont au rendez-vous et son envie de le partager avec son public - « le plus gros public devant lequel j’ai joué ! » - apparaît comme une évidence.

On l’attend dans la confidence, dans le déversement de ses tripes, encore trop calfeutré derrière une musique énergique et dynamisante.

Mais lorsqu’elle s’installe à la batterie, le concert prend une autre ampleur. L’énergie monte, l’intensité que l’on attendait s’amplifie jusqu’à exploser.

Georgia, confiante derrière son premier amour musical, lâche prise et nous embarque dans une intimité viscérale sans limite jusqu’à casser une partie de son instrument – « C’est comme ça à chaque fois que je joue de la batterie, je suis une fille puissante » - et lancer ses baguettes dans le public.

« I’m so London », déclare-t-elle, à l’aise, comme soulagée, délivrée d’un poids. De l’appréhension, certainement. Ne reste plus qu’à démarrer son concert de la même manière.

 

QUEEN KWONG – HALL 3

Repérée par Trent Reznor, leader de Nine Inch Nails, la californienne Carré Callaway est Queen Kwong. Une reine déjantée qui assure le show et entretient la caricature de la rockeuse désinvolte et survoltée.

Sur la scène, elle enchaine les allers-retours, d’un pas rapide et énervé, et les mouvements épileptiques d’un corps qui semble envahi et hanté par un trop plein d’émotions. Guitares et batterie crachent d’emblée des notes rock et une énergie puissante s’en dégage.

C’est explosif et furieux, corrosif aussi. Dans les textes comme dans la composition musicale. L’urgence agressive. La chanteuse et guitariste a quelque chose d’impulsif, et semble prête à imploser à cause d’une démangeaison incessante et gênante. Presque invivable.

Hormis une gestuelle qui paraît un brin superficielle, fruit d’une ébullition constante qui peine à jaillir à travers le corps, la musicienne démontre une maitrise de son concert.

Alternant entre sons agressifs et parties plus alternatives, quasi sereines. Entre voix de Lolita, parlé psychédélique et cris de « bad girl ».

Elle manie la puissance de son organe vocal mais également celle de son show, l’intensité n’en finissant pas d’accroître, allant de la scène, à la table du dj set, installée juste devant, pour finir debout sur la barrière de la fosse avant de se laisser tomber dans la foule.

Surprenante, Carré Callaway va là où on ne l’attend pas avec un final un peu mystique, a cappella et alimenté de respirations haletantes, marquant la fin de sa folle course.

 

Célian Ramis

Femmes DJs : Quelle place pour elles ?

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Rennes
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Le sexe n'est pas un critère de talent. Mais être un homme semble favoriser la mise en lumière lors des soirées et festivals. Les musiques électroniques ne font pas exception. Enquête auprès des Djettes et des programmateurs musicaux.
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Le secteur de la musique n'échappe pas au sexisme. Lorsque les femmes sont mises en avant, c'est souvent pour leur physique, et non pour leurs qualités artistiques. Et les médias contribuent aveuglément à ce système. Dans les concerts ou les festivals, elles sont très peu programmées. À cause de leur faible nombre ? Ou d'un manque de compétences ?

YEGG a rencontré une dizaine de Rennaises Djs et des programmateurs artistiques pour comprendre ce phénomène flagrant, en particulier dans les musiques électroniques. Les clichés de genre restent bien ancrés, surtout dans l'esprit des premières concernées. Certaines refusent de jouer par peur de paraître « trop » féminines ou de ne pas savoir faire. Ce qui contribue à cette sous-représentation mais n'explique pas tout. Pas question non plus pour elles de promouvoir le fait qu'elles soient des femmes.

Les programmateurs ainsi que Béatrice Macé, co-dirigeante de l'association des Trans musicales (ATM) qui chapeaute l'Ubu, salle historique des musiques actuelles dans la capitale bretonne, refusent également une binarité hommes-femmes. Or, ces Djs, tout aussi talentueuses, méritent autant leur place que les hommes mais y accèdent peu. Ce paradoxe n'est pas propre à la musique. Au contraire, il semble révélateur du fonctionnement global de notre société.

Jeudi 24 septembre, 22h30. Le bar Le Chantier, en bas de la place des Lices, se remplit au fur et à mesure que les sons de basses augmentent. Ce soir-là, Midweek fête sa « Midweek des familles », soirée de retrouvailles « entre copains ». Trois membres de cette association rennaise, chargée d'organiser des évènements de musiques électroniques, créée en 2012, mixent chacun leur tour : Antoine Pamaran, Tristan MDWK et Vanadis.

L'ambiance de la salle aux murs orangés se réchauffe ; les pintes de bières se passent de main en main, le premier rang se déhanche en rythme. Après un premier passage en début de soirée, Vanadis mixe à nouveau. Derrière les platines vinyles et cds, posées sur une planche en bois et deux grands tonneaux de chantier, la Dj choisit les prochains morceaux qu'elle va diffuser.

Son énergie est communicative. Véritable pile électrique lors de son set, la jeune femme brune bat le rythme avec sa jambe gauche, bouge les bras et chante sur ses lèvres les paroles des chansons qu'elle passe. Au bout d'un quart d'heure, Antoine et Tristan la rejoignent sur l'estrade pour préparer les vinyles et mixer quelques morceaux. Une parole échangée, un regard entendu, la complicité entre les trois personnes se ressent derrière les tourne-disques.

« Il y a deux ans, je venais juste d'arriver à Rennes et je voulais m'investir comme bénévole dans le milieu des musiques électroniques. J'ai envoyé un message à Midweek car je trouvais leur programmation cool. Cela a très vite collé et c'est parti directement ! Les gars m'ont dit : "ça te dirait pas de mixer ?" et ma première date s'est faite en avril 2014 au Bar'Hic », se souvient Vanadis, de son vrai nom, Morgane Deturmeny.

La jeune femme de 22 ans, qui a pratiqué du piano petite, a acquis son oreille musicale grâce à son père, dévoreur de disques. Au lycée, l'étudiante s'est plus tournée vers l'électro, même si elle se qualifie comme une « grosse boulimique de sons » en tout genre : « Je ne peux pas passer une journée sans en écouter ! Je passe vraiment par tous les styles pour aller à la recherche de la petite pépite. »

Morgane a commencé à mixer par hasard. C'était, au départ, pour s'amuser avec son cercle d'amis. Ce parcours, les femmes Djs rennaises l'ont toutes eu, à quelques différences près. L'univers du mix s'est ouvert à elles par la pratique artistique ou grâce à des proches, qui leur ont prêté du matériel et des vinyles pour s'entraîner.

Certaines, comme Dj Miss Blue, ont usé, adolescentes, des semelles dans des concerts ou des festivals. « Depuis mes seize ans, je fais les Trans Musicales chaque année ! Je n'ai loupé le festival qu'une seule fois car j'étais à l'étranger », raconte cette trentenaire, lunettes bleues relevées sur ses cheveux blonds et vêtements indigo. Cette dernière tient son nom de scène à son prénom breton, Bleunienn, signifiant bleu, et a créé la majeure partie de son personnage sur scène autour de cette couleur.

De sa culture familiale bretonnante, elle en a créé un style musical, le « Breizh'n'bass » dans lequel elle mélange danses traditionnelles bretonnes et drum'n'bass : « En m'entraînant dans le garage et en puisant dans la bibliothèque de ma mère, je suis tombée sur les vinyles des sœurs Goadec, d'Alan Stivell et des Frères Morvan. Et je me suis rendue compte que les structures des morceaux de musique électronique collaient complètement avec le plinn et la gavotte. »

En 2006, la demoiselle bleue quitte son travail d'institutrice et se lance comme Dj. En une dizaine d'années, sa musique s'est très rapidement exportée à l'étranger, en Asie et aux États-Unis, pour animer des évènements en rapport avec la Bretagne, sa région natale dont elle parle couramment la langue.

Katell a également tourné sur la scène locale et hors des frontières. Mais, contrairement à Miss Blue, la jeune femme brune tatouée n'a jamais souhaité en vivre et ne le considère pas comme un métier, bien qu'elle mixe depuis onze ans. Elle préfère garder cette activité à côté, sans avoir la pression du nombre d'heures pour obtenir le statut d'intermittente du spectacle.

Partenaire de platines et amie de Katell, Menthine approuve : « Mixer, c'est comme une drogue ! Tu peux être derrière tes platines pendant des heures et des heures et ne pas t'en rendre compte. Il y a des heures de travail au compteur... Mais les cachets ne sont pas suffisants pour en faire un salaire et le temps ne le permet pas. »

COMMUNAUTÉ MUSICALE HIÉRACHISÉE

Être Dj, c'est surtout faire partie d'une « grande famille », celle des musiques électroniques. « Il y a un aspect très communautaire. Le son arrive comme un trait d'union entre les gens qui tendent vers une organisation commune », témoigne Katell, qui a beaucoup côtoyé le monde des « sound system » et des « free party ». S'y intégrer, en tant que femme, n'a jamais posé problème. « Nous n'avons jamais bagarré pour avoir notre place », répondent en chœur Menthine et Katell.

« On dit même merci aux gars, sans eux on aurait jamais eu de platines ! », s'enthousiasme Menthine, qui a animé les émissions électro Open Fader sur Radio Campus Rennes (RCR) et organisé les soirées du même nom de 2006 à 2015. Miss Blue ne s'est, elle, jamais posé la question : « Je ne m'en rends pas compte, je fais mon métier et je suis un peu dans ma bulle. »

"Tu joues bien pour une fille !" Cette remarque a pourtant parfois été dite après leurs passages. Des comportements qui leur indiquaient qu'elles restaient des femmes avant tout. Mac l'Arnaque, qui mixe du hip-hop et du rap depuis 2009, l'a ressenti une seule fois :

« Alors que je jouais, un jeune homme, en train de danser, s'est retourné, m'a regardé et est directement parti. »

Autre constat : une pression supplémentaire est souvent mise sur la technique lorsque les femmes jouent. « Quand on est exposées comme ça, en tant que femme, des connaisseurs viennent, par curiosité, pour voir comment on s'en sort. Cela met forcément un peu la pression », reconnaît Mac l'Arnaque, casquette enfoncée sur la tête, qui ne souhaite donner ni son nom civil ni son âge. Anecdotiques, peut-être, mais ces actes n'auraient jamais été faits à des Djs masculins. Menthine rétorque : « C'est le jeu et je préfère m'en amuser ! »

Dans cette « grande famille » électro, à Rennes, une partie rayonne, l'autre reste dans l'ombre. Et c'est dans cette deuxième catégorie que les femmes seraient le plus nombreuses. Elena Tissier, 25 ans, qui se produit en tant que The Unlikely Boy, le remarque :

« J'ai du mal à citer beaucoup de noms de femmes Djs à Rennes, on se sent un peu isolées. »

Et cela se retrouve dans les programmations musicales de la ville. Les femmes aux platines se font rares. Cédric Bouchu, alias Dj Ced, qui tourne à Rennes depuis 20 ans, en fait le constat. Ayant commencé à mixer à l'âge de 17 ans au Saint Georges, il n'a jamais été sur le même plateau qu'une fille alors qu'il a « fait facilement plus de 1000 dates ».

FAVORISER L’ARTISTE ET NON LE GENRE

Également programmateur du festival I'm from Rennes, qui met en avant la scène rock et électro depuis 2011, Ced l'avoue : « Des femmes Djs, il y en a très peu cette année... ». La quatrième édition, qui s'est étalée du 16 au 26 septembre, comptait seulement Valandis et Mr. et Mme Henri, un duo mixte.

Bien que le manque de femmes interroge l'équipe organisatrice masculine, ce n'est pas prioritaire lorsqu'ils constituent la programmation. Cédric Bouchu s'en défend : « Il n'y a que l'artistique qui nous intéresse, nous n'avons pas envie de faire un quota avec 50% d'hommes et 50% de femmes. »

Pourtant, la quinzième édition du festival Maintenant, qui fait des passerelles entre art, musique et technologies, prouve qu'il est possible de programmer autant d'hommes que de femmes Djs, sans faire de quota.

Cette année, du 13 au 18 octobre, elle donne un coup de projecteur à la scène locale Dj, lors de ses « Ambiances électroniques », à la Salle de la Cité. Sur six Djs, trois sont des femmes : The Unlikely Boy, Vanadis et Knappy Kaisernappy. « C'est involontaire, il n'y a pas de recherche de parité », réagit Gaétan Nael, programmateur du festival et adjoint à la direction de la salle de musiques actuelles, l'Antipode.

Pour élaborer chaque programmation, il rencontre les personnes, se déplace à leurs concerts ou les écoute sur Internet : « Je ne me focalise pas sur le sexe, je ne fais pas de calcul. L'objet du festival, c'est de révéler des choses peu montrées ainsi que de partager des coups de cœur. Si on peut donner la visibilité que les femmes méritent, tant mieux ! Car elles travaillent, elles cherchent des morceaux, elles ont une capacité à partager avec les gens, elles ne cherchent pas la facilité. »

Privilégier l'artiste par rapport au genre, ce discours d'une musique asexuée n'est pas nouveau. Et cette volonté vient autant des programmateurs que des femmes elles-mêmes.

« Je pense qu'il n'y a aucun artiste, homme ou femme, qui aurait envie d'être booké pour une histoire de quotas, en tout cas, j'espère que ce ne sera pas mon cas car je trouve ça extrêmement réducteur », développe Elsa Quintin, alias Knappy Kaisernappy, interviewée dans la trentième émission Technosaurus, qui se consacre à la place des femmes dans l'électro, diffusée le 2 juillet dernier sur la radio nantaise, Radio Prun.

L'artiste préférerait plutôt se concentrer uniquement sur le projet artistique :

« Il existe plein de manières d'incarner son son, qu'on soit un mec ou une nana cela ne change rien ! Je trouve qu'en France, la question du genre est trop binaire. »

L'ÉLECTRO SE DÉMOCRATISE

À Rennes, la scène électro se développe énormément depuis ces cinq dernières années, bien qu'elle soit présente en terre bretonne depuis le début des années 90. Elle s'est plus institutionnalisée grâce à l'autorisation de la municipalité, comme c'est le cas pour les « Rencontres Alternatives », teknival qui a lieu à la Prévalaye depuis cinq ans. Une tendance qui n'est cependant pas propre à la ville mais due à une impulsion nationale.

« Depuis deux, trois ans, l'Ubu, l'Antipode... Tout le monde s'y met ! Ça se démocratise. L'électro arrive même dans les festivals populaires et familiaux comme les Vieilles Charrues et Rock en Seine, qui touchent toutes les générations », analyse Katell, installée à Rennes depuis quinze ans. La demande vient également des bars, à la recherche de Djs. D'après Mac l'Arnaque, qui a mixé en inter-plateaux aux Trans Musicales en 2014, ces derniers sont plus accessibles pour se produire que trouver une résidence.

« De nombreux collectifs ont toujours existé sur des esthétiques différentes comme la noise, la techno ou la drum'n'bass. Le bassin étudiant rennais a toujours permis un renouveau »
tient à rappeler le programmateur de l'Antipode.

L'effervescence autour de ce style musical multiplie les initiatives. Au 1988 Live Club, qui coordonne toute la programmation de la discothèque Le Pym's, c'est de cette façon que les soirées « elektro » se sont instaurées tous les vendredi soirs.

Si ce courant est autant en vogue, c'est grâce à l'arrivée des nouvelles technologies qui le rendent à portée de main et de clavier. « Avant, on apprenait à mixer et à caler en même temps les disques vinyles. Désormais, il faut seulement mettre les morceaux qui vont ensemble et qui ont une bonne rythmique. La technique est moins dure », développe Katell, qui mixe toujours avec uniquement des vinyles.  

À LA RECHERCHE DES FEMMES DJS

Decilab, Pulse, Social Afterwork, Midweek... Toutes ces organisations rennaises « très très masculines », selon The Unlikely Boy, dessinent le paysage électro le plus visible de la ville. La solution pour le transformer ? « Je pense qu'il faut lancer le mouvement », affirme Vanadis.

Ces dernières années, de nouveaux noms féminins sont apparus sur les affiches. « Plus on y réfléchit, plus on se rend compte qu'il y a pas mal de nanas Djs ! Rennes est un grand village », sourit Katell. « Pourvu que ça dure, que ce ne soit pas juste un effet de mode », espère Menthine.

Si les femmes Djs restent moins visibles, ce serait à cause des réseaux majoritairement masculins des programmateurs, avance Carole Lardoux, directrice artistique de la salle du Carré Sévigné, à Cesson-Sévigné :

« Je ne crois pas qu'il y ait d'actes volontaires de leur part de ne pas programmer de femmes. Parfois, ce sont des réseaux d'affinités et de sensibilité artistique. Il faut être à la croisée des réseaux afin de leur porter une attention tout aussi particulière. Il y a beaucoup de femmes qui créent, il faut juste y avoir accès. »

Pour beaucoup, programmer autant de femmes que d'hommes semble facile. Noëmie Vermoesen, qui mène une thèse sur les musiques électroniques à l'université Rennes 2, était de cet avis-là : « Je disais : "Ils font chier les programmateurs, on peut trouver des nanas !" ».

L'ancienne animatrice à Canal B de l'émission Track/Narre a déménagé à Berlin cet été. Depuis, la doctorante organise toutes les trois semaines une soirée électro où, une fois sur deux, l'artiste est féminine :

« C'est beaucoup plus compliqué que ce que je pensais. C'est important qu'il n'y ait pas que le critère « nana », il faut qu'il y ait quand même des affinités artistiques et personnelles avec la personne. »

Alors, les femmes Djs ont décidé de se les créer elles-mêmes, ces réseaux. En 2010, Mac l'Arnaque a crée le collectif rennais « Girls do it better » avec deux autres Djettes, Dj TFlow et Fckn Mood. « Quand il y a des filles Djs, on fait une petite veille mais on ne veut pas créer un cercle de Djettes. Ce n'est pas parce que t'es une fille qu'on va faire des choses ensemble mais on se serre les coudes, qu'on le veuille ou non », indique-t-elle. L'année dernière, Katell et Menthine ont appelé leur nouvelle formation duo, Las Gatas Electronicas, qui signifie en français « Les Chattes Électroniques ».

Ces noms, quelque peu provocateurs, ne se veulent pas revendicatifs. « On ne se prend pas au sérieux ! », rigole Menthine. Ces rassemblements permettent surtout de se regrouper par projets communs. Depuis neuf ans, Miss Blue fait partie du collectif international Geishaz, qui met en relation uniquement des femmes qui mixent : « Aux États-Unis, c'est moins exceptionnel qu'une fille soit Dj. » Geishaz est surtout un moyen d'entraide pour se trouver des dates.

S'AFFIRMER DANS UN MILIEU MASCULIN

« La seule différence que je vois entre une femme et un homme Dj à Rennes, c'est que beaucoup de Djs hommes se manifestent à nous, là où une femme est plus réservée et ne va pas oser », remarque Gaétan Nael.

Ce problème de confiance en soi et d'auto-censure est surtout dû à un conditionnement typiquement féminin, qui tend à se dévaloriser et se sentir illégitimes. « Beaucoup de filles qui sont à fond dans le son me disent : "Je ne saurai pas faire" », remarque Vanadis. Les stéréotypes de genre ont la vie dure :

« Il y a moins de filles qui jouent, je ne pense pas que cela vienne de l'extérieur. Les nanas ne s'y mettent pas trop car elles pensent que c'est réservé à la gente masculine, comme le bricolage ! »
rigole Menthine.

« Ce n'est pas parce qu'il y a des câbles et des ordinateurs qu'une fille ne peut pas le faire », lance The Unlikely Boy. 

Il faut donc une volonté de fer pour s'affirmer dans un milieu majoritairement d'hommes. « Dans la musique, les femmes doivent tout le temps avoir des forts caractères. Chez les mecs, il y en a des assez timides derrière les platines. Une meuf, elle, elle sait ce qu'elle veut ! », compare Cédric Bouchu. Et les femmes Djs de la capitale bretonne le savent. Quitte à s'y conformer et favoriser leur côté plus masculin.

« Je suis un peu garçon manqué, j'ai très peu d'amies, la plupart sont des mecs », reconnaît Vanadis. Sur scène, Mac l'Arnaque ne veut pas du tout valoriser sa féminité : « J'ai baigné dans la culture urbaine, je m'habille avec des casquettes et des baskets. » 

Or faut-il nécessairement mettre de côté sa féminité pour jouer ? Cette question a posé problème à Juliette, l'animatrice de l'émission nantaise Technosaurus. « J'ai rapidement abandonné l'idée de mixer car je ne voulais pas renvoyer l'image de la fille faiblarde qui ne cache pas du tout sa féminité. Ma phobie, c'est d'être classée comme "pétasse de la techno". Je me suis moi-même arrêté aux a priori que je dénonce. Alors, oui, on peut être une petite meuf en sucre, avoir sa féminité et être une bête derrière les platines », raconte-t-elle dans sa trentième émission.

Cependant, les fantasmes des programmateurs sur les Djettes existent bel et bien. « Une femme Dj va tenir une sorte de faire valoir, les mecs la programment car elle est jolie. Je sais que c'est quelque chose qui se fait », avoue Sylvain Le Pennec. « Certains programmateurs, quand on dit Djette, ils voient tout de suite une personne girlie, bien apprêtée et canon », rajoute Mac.

SOIRÉES FÉMININES, MARKETING OU LEVIER VERS LA VISIBILITÉ ?

Pour cette raison, les soirées Djs « 100% filles » sont encouragées car elles deviennent des arguments marketing. Le collectif France Téléconne en a fait l'expérience lorsqu'il a démarché les bars de Rennes pour organiser sa soirée « 100% meufs ». « Nous n'avons jamais eu de refus catégorique, les gens sont plutôt enthousiastes, note Adélaïde Haslé, la programmatrice. Mais ils trouvent ça trop cool car on est des filles, c'est comme si ils venaient voir un spectacle ! » Jeanne Marie Heard, deuxième tête pensante du collectif, rajoute : « Mais on s'en tape un peu, on s'affranchit de ça ! »

L'envie de cette soirée : s'amuser. Alors, ce collectif de « fêtardes et pochardes », comme elles se définissent, a mis en place un moment festif dans lequel les filles, la plupart inexpérimentées, pourront mixer pour le plaisir, le 28 novembre, au Bar'Hic.

« On passe la même musique que les mecs alors on estime qu'on a autant notre place dans le milieu »
développe Adélaïde, 34 ans, grande consommatrice de concerts avant d'être Dj.

Passer par la petite porte, plutôt que d'attendre, telle est leur philosophie. « L'idée n'est pas de nier les différences entre les hommes et les femmes mais ce n'est pas parce qu'on n'est pas pareils qu'on ne doit pas avoir les mêmes places », estime-t-elle.

Revendiquer des soirées 100% féminines dérangent les programmateurs. Sylvain Le Pennec parle d'effet « hyper pervers » : « En disant cela, on dessert la cause car on ne met en avant que des noms ». Même discours du côté de Gaétan Nael :

« Le clivage sera plus important si on oppose hommes et femmes. Un bon artiste est un bon artiste, qu'il soit homme ou femme. »

UN BON ARTISTE RESTE UN HOMME

Le souci vient de là : si un bon artiste est repéré, il effectue beaucoup de dates. Alors que le vivier se féminise de plus en plus, pourquoi aussi peu de femmes sont programmées ?  Publiées en 2013, les statistiques du collectif berlinois female:pressure parlent d'elles mêmes : les femmes ne représentaient que 8,4% de têtes d'affiches des festivals électros internationaux. 

« Nous pensons qu'il est inacceptable qu'au 21ème siècle, nous en soyons encore à constater que nous sommes parfois la seule femme figurant au programme d'un grand festival. Nous connaissons un grand nombre de collègues femmes tout aussi intéressantes les unes que les autres et nous pensons que le public par ailleurs très mixte, mérite d'entendre ces artistes », écrit le collectif dans un communiqué de presse publié le 8 mars 2013, pour la journée des droits des femmes.  

Organiser des évènements uniquement féminins a, pourtant, un effet sur la programmation. Pour preuve, en ajoutant les festivals « 100% femmes », la barre des 10% est atteinte.

Dans la même dynamique, Alice Cornélus a fondé en 2012, le réseau Women Multimedia Network !, qui soutient activement et communique sur les artistes féminines des arts numériques dont l'électro. Sa devise : « Ce n’est pas une question de genre mais de visibilité ! ».

LENTE PRISE DE CONSCIENCE

Malgré tout, le milieu des musiques électroniques évolue. C'est, en tout cas, ce que considère Noëmie Vermoesen, qui voit les changements à la fois en France et en Allemagne :

« Il y a une vraie prise de conscience et un changement de mentalités dans le milieu. De plus en plus de mecs s'en rendent compte et n'abordent plus le truc de la même façon. »

En un an, les chiffres de female:pressure 2015 montrent eux aussi une amélioration. L'année dernière, 10,8% de femmes se partageaient l'affiche de festivals.

Le milieu musical, en particulier des musiques actuelles, s'intéresse de plus en plus à cette problématique. Des artistes féminines occidentales poussent régulièrement des coups de gueule sur le sexisme ambiant. Dernier exemple marquant : l'artiste islandaise Björk en janvier dernier. Interviewée par le magazine Pitchfork, elle rapporte le conseil qu'elle a donné à la rappeuse M.I.A lorsqu'elles se sont rencontrées :

«[...] Je lui ai dit : Prends-toi en photo devant une table de mixage dans un studio, et les gens se diront "Oh, ok ! Une femme avec une machine, comme un homme avec une guitare."» Depuis, de nombreux blogs, comme Visibility et celui de female:pressure, ont été ouverts sur lesquels les musiciennes publient des photographies d'elles en train de travailler.

SECOND RÔLE POUR LES FEMMES

« L'évolution à Rennes, je la sens comme je peux la sentir dans la société française, ça s'ouvre petit à petit avec une volonté gouvernementale », commente le programmateur du 1988 Live Club. De plus en plus de femmes s'orientent, en effet, dans le milieu musical, que ce soit sur scène ou à la technique.

Cependant, elles restent toujours cantonnées au second rôle. « Les nanas sont dans les chœurs ou jouent du tambourin. C'est souvent aussi l'image de la groupie, la copine du chanteur ou celle qui s'occupe du catering..., rit jaune Adélaïde du collectif rennais France Téléconne. Elles ne se trouvent pas aux places fortes comme à l'organisation. Nous sommes les seules avec Nate & Jojo à programmer des concerts électro. Tout est lié au sexisme de notre société, la musique ne déroge pas à cela, bien que ce soit pourtant censé être plus ouvert. »

Alors que le secteur devient plus paritaire, les femmes restent bien souvent en arrière-plan, qu’elles le veuillent ou non. Alors on repose la question : Pourquoi cette évolution n'écarte-t-elle pas le fait qu'un Dj, ou plus généralement un artiste, reste toujours un homme, par défaut ?

 

Co-directrice de l’Association Trans Musicales, elle gère depuis plus de 37 ans les célèbres Rencontres Trans Musicales à Rennes et assume sans complexe d’être la femme de l’ombre, au profit de Jean-Louis Brossard, directeur artistique.

YEGG : D’où venez-vous et êtes-vous issue d’un milieu musical ?

Béatrice Macé : Je viens de Dinan, je suis arrivée à Rennes après mon bac. Je voulais faire des études d’archéologie mais j’ai fait latin, grec, histoire de l’art. Je devais faire ma licence et partir à Paris mais les Trans sont nées avant. Et comme je n’étais pas majeure, la majorité était à 21 ans à l’époque, mes parents n’ont pas voulu que j’y aille. Pour le milieu culturel, on était plutôt branchés bouquins, patrimoine, histoire. J’ai une grand-mère pianiste et un père saxophoniste mais, petite, j’ai refusé de faire le Conservatoire. J’ai refusé car il y allait avoir les mêmes filles qu’à l’école. Ça m’énervait.

Pourquoi ?

Être à nouveau en compétition… J’ai 57 ans aujourd’hui alors là je vous parle d’une époque avant 68. Il y avait une culture académique. À  la maison, mon père écoutait du classique, du jazz. Il avait fait pas mal de concerts à Paris. C’était quand même très classique. J’ai regretté plus tard de ne pas être allée au Conservatoire, je me suis mise au piano mais j’ai abandonné car je n’avais aucun don pour ça. J’étais beaucoup plus dans les bouquins et les musées.

Dans quel contexte est né le trio avec Jean-Louis Brossard et Hervé Bordier ?

Il y avait peu de concerts de musiques actuelles à Rennes. Il y avait moins de 20 concerts à l’année. Rien à voir avec l’effervescence de maintenant ! Aujourd’hui, plus personne n’a conscience de ça. C’était de la musique académique qui passait. J’ai rencontré Jean-Louis à la fac, à Villejean et on a gardé le contact. Lui, il avait déjà rencontré Hervé. Jean-Louis achetait déjà beaucoup de disque. Comme moi, il venait d’une culture hyper classique mais dès qu’il a découvert le monde du rock il s’y est mis à fond, d’abord en écoutant la radio, et ensuite en achetant les disques.

Je n’ai pas une grande culture musicale dans ce domaine, à part The Doors, Hendrix, Neil Young, j’avais repéré aussi la musique black avec Otis Redding, Aretha Franklin… Mais bon j’étais branchée Louvre et arts plastiques. D’où histoire de l’art à la fac. Et justement à la fac, c’était une expérience de vie. On était très insouciants. Donc Jean-Louis rencontre Hervé et on rentre dans l’association. Ce qui m’a branchée, c’est l’énergie, l’ambiance particulière. C’était comme je m’amuse à le dire une post-adolescence. J’avais 19 balais à ce moment-là, tu fais tes expériences. En plus venant de Dinan, une petite ville, tu arrives là dedans, c’est fou.

Ça ressemblait à quoi alors les concerts à cette époque ?

Déjà il faut se dire que là la 37e édition des Trans ne ressemble plus du tout à ce que l’on faisait au début. C’était très post 68, les gens ne voulaient pas payer pour aller au concert, c’était une société où la contre-culture était forte. On ne parlait pas de musiques actuelles mais de rock, d’esthétiques. On est en 77, il y a encore un esprit contestataire, sans les manifs, Morrisson est mort, le trio des 27 ans est mort.

Et puis on commence à rentrer dans le rock industrie. Juste après Yes. Le punk est venu comme une réponse, un redémarrage de la contre-culture. Le rock s’académise. Il y a une contestation contre le marché dans lequel entre le rock. Et nous, on est une toute petite asso Terrapin, en référence à une chanson de Syd Barrett, le chanteur des Pink Floyd, qui veut dire Tortue d’eau douce.

À cette époque, j’ai une copine qui habite à Londres et avec Jean-Louis et d’autres potes on allait passer toutes nos vacances de Noël chez elle. On faisait tous les concerts et Jean-Louis achetait des disques. Les Trans sont la continuité de cette manière de vivre. J’ai arrêté les études pour organiser des concerts. C’est une manière de vivre pour exprimer une forme de liberté. Une manière de dire non à un parcours social qui aurait pu nous conduire à reproduire ce qu’avaient fait nos parents ! On a décidé de vivre comme on avait envie de vivre et d’en faire notre métier.

Quel est votre rôle au sein de l’ATM ?

Ce qui m’intéresse, c’est de construire un projet, de dire quelque chose. Nous sommes en co-direction avec Jean-Louis et je m’occupe du projet, de l’écrire. En fonction de l’histoire et du positionnement du festival, comme on l’a décidé. Avant, c’était en juin, les 14 et 15 juin. On a fait un concert de soutien à Terrapin qui avait des problèmes financiers. On avait décidé de faire monter sur scène des groupes rennais. Ce n’était pas dans l’objectif de le refaire l’année suivante.

Mais les artistes et les publics sont venus nous solliciter. On a décalé en décembre car c’était une période sans examens. Mais il n’y avait pas de préméditation. Faire un festival, c’est interrompre le quotidien pour proposer quelque chose de différent. On y passe toute la nuit, il y a une intensité différente. On voit plusieurs groupes, les émotions sont beaucoup plus sollicitées. Aujourd’hui sur les Trans il y a une bonne quinzaine d’esthétiques majoritaires. Ça prend plus qu’un concert.

En 85, on arrête Terrapin et on lance l’ATM. On en fait notre festival les années suivantes. En 90, on reprend la gestion de l’Ubu, puis les rave ont eu un impact sur nous. En 96, c’est le départ d’Hervé. Mais nous on voulait continuer. Ça fait 20 ans maintenant et les choses se sont enchainées dans une logique. On n’est jamais rassasiés. D’une année sur l’autre ce n’est pas la même ambiance, pas les mêmes enjeux, pas la même programmation.

Le cadre est similaire mais les éditions sont différentes. Il n’y a pas de lassitude. Je travaille le même projet mais de manière différente. Le projet c’est la philosophie instinctive des 1ères Trans, c’est ça qui nous intéresse de développer.

C’est aussi de montrer des artistes rennais qui ne sont pas connus. Marquis de Sade, Etienne Daho, cette année, Her, Kaviar Special… Mais à l’époque Marquis de Sade et Etienne Daho, ils n’étaient pas connus. Le rock n’avait pas le droit de cité à ce moment-là. Aujourd’hui, les gens ne maitrisent pas leur choix culturel. Avec Internet et le marché, on pré-choisit pour nous. Et la diffusion est limitée par rapport à la création.

Ce qui nous intéresse, c’est de faire connaître la chose inconnue. Les Trans, c’est l’interstice entre ce qui existe et qui n’est pas très connu. Des artistes singuliers qui ne sont pas encore dans la focale des médias. C’est cette singularité qui nous plait, le truc qui fait que ça marquera l’histoire des arts et de la musique. On est là pour les faire découvrir. Ça ne veut pas dire forcer à aimer.

Concrètement, quel est votre boulot ?

Dans le projet, j’écris tout. À quoi je sers ? Attendez, je vais vous montrer (elle se lève et va chercher le projet rédigé sur son bureau, ndlr). J’écris tout le projet artistique que Jean-Louis va mettre en forme. Je fais une Convention aussi pour les partenaires. En fait, je réunis les conditions pour que le projet existe. Avant, j’étais directrice de production et de projet. Mais j’ai délégué.

Je travaille sur la construction du futur, la prospective et sur comment on va passer le projet. Je prends les décisions d’être dans l’Agenda 21, les normes ISO, d’aller au Parc expo, je fais et je négocie les dossiers. Je suis directrice mais pas artistique. Par contre, je suis dans l’accompagnement artistique. Le jeu de l’ouïe, Mémoires de Trans… tout ça c’est moi. En fait j’ai un rôle d’architecte : je pose les bases et les murs de la maison ATM. Mais les gens ne voient que ce que Jean-Louis fait.

Et ce n’est pas frustrant ?

Pas frustrant du tout.

Pourtant, vous le soulignez. Simple constat ou petite blessure ?

Vraiment, je ne suis pas frustrée. Je sais ce que je fais, je sais quelle est ma place, quel est mon rôle. Par exemple, je ne veux plus aller à Paris rencontrer les journalistes. Je ne me sens pas à l’aise. Je me sens à l’aise au moment des Trans, quand je suis dans le public et que tout se passe bien. Je gère aussi la sécu’, les bars, etc. Je suis comme une cheffe d’entreprise. Je fais en sorte que tout ça existe. Jean-Louis est le cœur du réacteur et moi mon rôle est de d’alimenter le corps en sang.

Je reviens sur le fait que vous avez délégué. Dans un article de Libération, paru en 2011, un acteur culturel rennais dit de vous : « Sans elle, le festival ne serait pas devenu ce qu’il est aujourd’hui. C’est une bosseuse hors pair, qui n’arrête jamais et qui a du mal à déléguer. Elle en fait 15 000 fois trop »…

(Rires) Oui, c’est vrai. C’est mon tempérament. Mais c’était en 2011 ? J’ai changé depuis. On a dit qu’on transmettait, je délègue. Et puis, je vais vous dire : à 57 ans, on ne veut plus faire ce que l’on faisait à 45 ans. J’en fais beaucoup moins aujourd’hui. Je préfère le monde des idées et la transformation des idées. Écrire le projet pour les 40èmes Trans. Faire en sorte que le quotidien des équipes soit moins compliqué. Ne pas laisser le projet se scléroser.

Et pour être dans l’interstice du connu et de l’inconnu, nous devons toujours être attentifs. Toujours prendre en considération les évolutions culturelles et musicales. Par exemple, les réseaux sociaux ont changé le festival. On a donc un webmaster, un community manager, un tweet wall… Perso, je ne pratique pas ça mais c’est la pratique des jeunes qui viennent au festival. Et notre rôle là dedans, c’est aussi de ne jamais oublier qu’il va y avoir un après 37e, un après 38e, etc.

En 40 ans de carrière, vous devez avoir des anecdotes sur le sexisme dans ce milieu non ?

J’ai vu des hommes quitter la salle, quitter l’équipe même juste parce qu’ils avaient une femme en face d’eux. Enfin, je n’ai pas bon caractère aussi, il faut bien le dire… Bon, je vous dis ça mais c’était il y a très longtemps. Ou alors en réunion, j’ai déjà dit une phrase et c’est arrivé que quelqu’un la reprenne en disant « Comme a dit Jean-Louis… » ! Par contre, j’ai toujours eu de la chance avec Hervé et Jean-Louis car pour eux, ça n’a jamais été un problème de bosser avec une femme. 

Mais bon, c’est sûr qu’on n’est pas beaucoup de directrices. 12% je crois selon HF. Ce n’est pas beaucoup ! Et dans les programmations, c’est pareil. Le secteur culturel n’est pas mieux que les autres. On pourrait penser le contraire, mais non. L’étude de Reine Prat montre aussi que les subventions accordées sont plus importantes quand c’est un homme qui porte le projet.

Vous êtes pénalisés à l’ATM ? Puisque c’est vous qui allez chercher les sous…

On a la plus grosse subvention de musiques actuelles donc je ne peux vous dire si nous sommes pénalisés (Rires). Mais vous savez aujourd’hui, tout le secteur est en crise. La différence entre nous et les plus petites structures, c’est que nous on tombera de plus haut.

Il faut s’imposer quand même femme à la tête d’une des plus grosses structures musicales…

Pour tout vous dire, je suis partie de l’association pendant 2 ans. Lors de l’édition 84 et je suis revenue pour l’édition 86 parce qu’Hervé est venu me chercher. Et ils ne m’avaient pas remplacée.

Pourquoi êtes-vous partie ?

J’en avais marre d’être la seule fille aux Trans. On était 3 nanas à la base et les deux autres sont parties. J’avais envie de prouver que je n’étais pas juste la nana des Trans. J’étais mal à l’aise quand je me suis retrouvée seule et j’avais aussi besoin de faire autre chose. D’exister et pas seulement à travers les Trans. Maintenant, l’ATM c’est mon univers. Quand j’arrive au bureau le matin, c’est mon univers, les Trans, l’Ubu, je suis à l’aise et je suis à la maison. Mais oui je me suis imposée.

Et vous ne vous dites pas féministe ?...

Pas militante féministe. Par contre, je réclame pour moi et pour les femmes que je connais le même respect et la même attention que pour les hommes. J’avais 16 ans quand la loi sur l’avortement est passée. J’ai encore des bouquins de mes 14/15 ans qui sont féministes. Jeune, j’ai lu le Deuxième sexe de Simone de Beauvoir. J’y suis sensible.

Pour moi, nous sommes avant tout des êtres humains. Je suis pour le respect pour tous, hommes et femmes, femmes et hommes. À mon époque, il y avait des radicales, anti hommes. Je ne suis pas dans l’antagonisme, dans l’opposition.

Et dans le contexte d’aujourd’hui ? Quand on a une fille de plus de 20 ans…

Ma fille a 22 ans et elle a été élevée par des femmes qui ont toujours bossé. Ma grand-mère, ma mère, moi… on a toutes fait des carrières professionnelles. Et puis, il faut dire que mon père était cool. Lors de la loi de 63, quand les femmes ont eu le droit d’ouvrir un compte bancaire, qu’elles ne passaient plus de l’aval de leur père à celle de leur mari… mon père avait dépassé ça depuis très longtemps.

J’ai toujours vu mon père aider ma mère qui était indépendante financièrement et socialement, elle gérait sa vie ! J’ai toujours baigné là dedans. Et je n’ai jamais eu à me poser la question par rapport à mon sexe. Je suis un être humain à part entière. Certaines femmes sont bridées. Pour moi, ce n’est pas concevable. Je ne suis pas née hier, je suis née sous René Coty quand même et j’en ai vu des vieilles dames qui avaient été entravées. Mon père l’avait noté, on en avait discuté.

Je suis fille unique, pas mariée, c’est un choix, faut l’assumer. Faut assumer la solitude. Mais il y a d’autres manières d’être en société, d’être épanouie. Mais c’est clair qu’on ne peut compter que sur soi même. Pour moi, le choix premier, c’est la liberté. Pas la liberté contre les hommes. La liberté, point. Je ne suis pas guerrière contre les hommes.

Simplement, je veux être celle que j’ai envie d’être au moment où j’ai envie de l’être. Je suis une nana et alors ? C’est comme ça, on ne va pas en faire un fromage ! (Rires) Après, je suis bien consciente que mon cas n’est pas une généralité et je suis sensible à toutes les luttes pour les droits des femmes. Je considère que c’est un vrai combat.

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Béatrice Macé : "Je suis une femme et alors ?"

Célian Ramis

Mythos 2015 : Yael Naim, grandiloquente et puissante

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Thabor, Rennes
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Vendredi 10 avril, la chanteuse franco-israélienne Yael Naim a saisi le public du Cabaret botanique, installé au Thabor, pour l’emmener dans un ailleurs enchanteur.
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Vendredi 10 avril, la chanteuse franco-israélienne Yael Naim a saisi le public du Cabaret botanique, installé au Thabor, venu à l’occasion du festival Mythos, pour l’emmener dans un ailleurs enchanteur.

Son nouvel album, Older, est jeune de tout juste un mois, mais déjà Yael Naim s’impose de par sa maturité vocale et musicale. En 7 ans, personne n’a oublié sa chanson « New Soul », qu’elle interprétera ce soir-là, tout comme sa reprise de « Toxic », ni sa gaieté enfantine. Ici, elle crée la rupture avec l’image de la jeune chanteuse de pop ensoleillée pour transporter les spectateurs vers un univers plus travaillé et plus complexe.

Yael Naim, ce n’est pas notre came. Mais il faut bien l’avouer, elle a quelque chose d’envoûtant. Assise à son piano, elle parsème de sa douceur ici et là et nous emmène dans ses histoires personnelles, sombres ou joyeuses. Elle parle ce soir-là de transition, d’expérience qui change la vie, qui change une personne. La venue d’un enfant suppose-t-on instantanément, à la manière dont elle l’évoque. Mais elle ne reste pas centrée sur cette naissance et aborde dans ses textes la vie, la mort, le deuil et les erreurs du passé, comme on peut l’entendre dans « Coward ».

Son album, Older, est une introspection de sa vie, et celle de David Donatien, son compagnon, toujours présent dans son travail puisqu’ils forment ensemble un duo à la ville comme à la scène. Et la chanteuse restitue leurs aventures de vie avec émotions, légèreté et détachement. Ce sont les différents registres musicaux qui viennent affirmer l’épanouissement et l’aspect grandissant de cet opus.

Entre folk, pop, soul et gospel, Yael Naim nous transporte dans un ailleurs lointain, dans des paysages grandiloquents et des espaces aérés. Sa puissance vocale, marquée par de belles envolées lyriques, met tout le monde d’accord, elle est de ces grandes voix virevoltantes et envoutantes, qui suspendent le temps, pendant une ou plusieurs chansons.

En ajoutant des chants sacrés à son disque, mystifiés davantage par la venue des choristes de 3somesisters, elle nous plonge dans la profondeur de ses textes, pas toujours mis en évidence ou en accord avec le style musical choisi, et nous maintient dans une relation intimiste et spirituelle, qui peut parfois même aller jusqu’à bercer le spectateur jusqu’à la somnolence.

Yael Naim convainc le public du Magic Mirror qu’elle peut à la fois allier douceur, gaieté, noirceur et énergie communicative, dans les paroles de ses chansons, tout comme dans les puissantes mélodies qu’elle délivre avec conviction.

Célian Ramis

Nishtiman, un voyage musical dans l'unité et la diversité du Kurdistan

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Opéra de Rennes
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Voyage aux confins de la Turquie, de l’Iran, de l’Irak et de la Syrie, le 6 mars, à l'Opéra de Rennes, avec Nishtiman, une formation singulière qui célèbre toutes les musiques kurdes.
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Au détour d’un concert à l’Opéra de Rennes, vendredi 6 mars, spectatrices et spectateurs ont été invité-e-s à voyager aux confins de la Turquie, de l’Iran, de l’Irak et de la Syrie, avec Nishtiman, une formation singulière qui célèbre toutes les musiques kurdes.

À l’occasion du cycle Divas du monde, et de la programmation liée au 8 mars, journée internationale des Femmes, l’Opéra de Rennes accueillait les 7 membres du groupe Nishtiman, formé en 2013 par le percussionniste Hussein Zahawy, qui confie rapidement la composition à Sohrab Pournazeri, chanteur et prodige du tanbur et du kamanché. Tous deux ouvrent les festivités et nous régalent de leurs musiques les vingt premières minutes du concert durant. Une belle entrée en matière.

La dextérité et l’agilité des mains du joueur de tanbur hypnotisent rapidement l’audience, dont les souffles coupés et les yeux écarquillés témoignent d’une fascination naissante pour l’instrument et son propriétaire, qui se confirmera au fil du spectacle. Sur la scène de l’Opéra, les deux musiciens sont seuls, entourés de différents instruments traditionnels kurdes, mais pas seulement.

UNITÉ ET DIVERSITÉ

C’est cette capacité à unir divers univers qui participe à leur succès amplement mérité. Ils sont Iraniens, Irakiens et Turcs. Ils sont kurdes, connaissent les musiques de leur pays et sont réunis par la volonté de célébrer la diversité et la richesse des chants et styles de leur peuple. Un peuple comptant des dizaines de millions de personnes éparpillées dans quatre pays frontaliers dont les situations et régimes politiques sont loin d’être semblables.

Ici, ils partagent leur passion pour la musique, avec Goran Kamil, chanteur et joueur de oud, Ertan Tekin, joueur de zorna, balaban et duduk (instruments à vent) et Sara Eghlimi, chanteuse. Auxquels se rajoutent deux musiciens français : Robin Vassy, aux percussions sénégalaises et Leïla Renault, à la contrebasse. Vêtus d’habits traditionnels, assis en ligne, ils sont des « musiciens sans frontières », selon le fondateur de la formation. 

Pendant une heure et demi, Nishtiman (signifiant « patrie » en kurde) alterne entre chansons en chœur, duos entre Sohrab et Sara, qui nous régale de sa voix perçante et envoutante, et parties instrumentales. L’unité des musiciens dans leur diversité permet de livrer une osmose musicale délicate et profonde, qui nous saisit et nous maintient dans l’envie de s’en délecter toujours davantage. Parfois dans la collectivité, parfois dans la singularité, chaque membre du groupe partage sans modération et avec générosité son savoir-faire et son talent, faisant résonner les instruments les uns après les autres, sans volonté d’être dans la démonstration et la performance.

VOYAGE MUSICAL AU MOYEN-ORIENT

Leur objectif, c’est celui de sensibiliser à l’esprit de toutes les musiques traditionnelles kurdes, mêlées les unes aux autres, mélangées à d’autres genres orientaux, et alliées à la culture occidentale. L’ensemble fonctionne sans difficultés. Véritable initiation et découverte du patrimoine d’un peuple effacé de la carte géographique, entre autre. Pourtant, dans leurs musiques, ils expriment la gaieté, la joie, la jubilation, le plaisir et la fête. Avec force et sourires.

Il y a de la profondeur dans les mélodies, dans les harmonies de leurs voix, de la rondeur et de la douceur. On vogue volontiers dans les contrées montagneuses du Kurdistan, on voyage au cœur du Moyen-Orient, on danse par moments, et on se laisse bringuebaler par cette mosaïque musicale d’une région à une autre, d’un rythme à un autre, d’un air populaire à une ode amoureuse.

Bercés par la douceur, la puissance et la retenue de la voix de Sara Eghlimi, on pense à celles qui embarqueront deux jours plus tard, le 8 mars précisément – journée internationale des Femmes – dans la caravane féministe qui se lancera alors dans la 4e marche mondiale des Femmes (la marche a lieu tous les 5 ans) en traversant une quinzaine de pays, débutant au Kurdistan pour terminer au Portugal, en octobre 2015.

Un concert ne suffira pas pour saisir toute l’étendue des musiques kurdes, qu’elles viennent de Syrie, d’Irak, d’Iran ou du Turquie mais aura valu une belle mise en lumière de cette culture riche et variée qui incite au voyage et à la réflexion autour d’un patrimoine conservé et uni au travers de valeurs communes, malgré un peuple épars et des régimes politiques ne reconnaissant pas tous la population et culture kurde. Un beau voyage musical.

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