Célian Ramis

De Gisèle Halimi à aujourd'hui : de l'intime au collectif

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Dans le cadre du 8 mars, l'association Déclic femmes organisait une conférence intitulée « Générations féministes, de Gisèle Halimi à la vague #MeToo », animée par l’autrice engagée, Jessie Magana, mardi 16 mars.
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« Chaque pas du féminisme est un pas pour les femmes migrantes ». C’est le postulat de départ de Fatima Zédira, fondatrice – en 1995 – et directrice de l’association rennaise Déclic Femmes qui en 26 ans a accueilli et accompagné entre 400 et 500 femmes exilées. Dans le cadre du 8 mars, la structure organisait une conférence intitulée « Générations féministes, de Gisèle Halimi à la vague #MeToo », animée par l’autrice engagée, Jessie Magana, mardi 16 mars. 

Gisèle Halimi, dans ses discours, ses écrits et ses actes en tant qu’avocate, autrice et députée, a toujours accompagné Fatima Zédira. Elle a d’abord défendu les indépendantistes tunisiens avant de venir en France et de s’inscrire au barreau de Paris. « Elle a découvert une justice instrumentalisée, au service de la domination coloniale. », précise la directrice de Déclic Femmes.

Elle s’est rapidement engagée dans le féminisme, créant avec Simone de Beauvoir entre autre, l’association Choisir la cause des femmes. Le procès de Bobigny, dans lequel elle défend une jeune femme ayant avorté à la suite d’un viol (en 1972, l’IVG est illégal) mais aussi sa mère, désignée complice, et trois autres femmes, ainsi que le « procès du viol », à la suite duquel l’avocate va brillamment réussir à faire changer la loi, figurent parmi les procès historiques du siècle dernier.

« Gisèle Halimi porte la cause des femmes jusqu’à ce qu’elles soient prises en compte. »
déclare Fatima Zédira en introduction de la conférence.

Au quotidien, elle œuvre avec les bénévoles pour l’insertion socio-professionnelle et l’apprentissage de la langue française des personnes exilées mais aussi et surtout pour « l’intégration réelle, celle qui prend en compte la dignité et l’histoire de la personne. »

Elle le rappelle, un migrant sur deux est une femme : « Une femme souvent diplômée, compétente ! Les femmes migrantes doivent être incluses dans le féminisme. Ce sont des richesses et non des poids. L’association fait l’interface entre les femmes et le pays d’accueil. Cette année encore, on a des femmes qui se sont inscrites en M2, en doctorat, etc. De par leur statut de femmes et de migrantes, elles subissent : discriminations, barrière de la langue, non équivalence des diplômes, manque de connaissances des dispositifs dans le pays d’accueil, manque de réseau (et donc isolement), manque de mobilité… Ces freins font qu’elles sont exposées à de nombreuses violences. »

Pendant le confinement, Fatima Zédira le dit clairement, la question des violences à l’encontre des femmes exilées s’est posée « encore plus fort que d’habitude. » L’association a rencontré Jessie Magana, autrice engagée dans les combats féministes mais aussi anti-racistes. 

Elle a notamment écrit Les mots pour combattre le sexisme, Des mots pour combattre le racisme, avec Alexandre Messager aux éditions Syros, Riposte – comment répondre à la bêtise ordinaire aux éditions Actes sud junior, Des cailloux à ma fenêtre aux éditions Talents Hauts ou encore Rue des Quatre-Vents – au fil des migrations, aux éditions des Eléphants.

Récemment, elle a signé le nouvel album de la collection Petites et grandes questions, chez Fleurus, Tous différents mais tous égaux ? et toutes les questions que tu te poses sur le sexisme, le racisme et bien d’autres discriminations et début mars est paru son roman Nos elles déployées, aux éditions Thierry Magnier. Sans oublier qu’en mai son livre Gisèle Halimi : non au viol, publié chez Actes sud junior en 2013, sera réédité. 

RENCONTRE AVEC GISÈLE HALIMI

En 2009, Jessie Magana écrit son premier livre édité, Général de Bollardière : non à la torture (dans la même collection chez Actes sud junior). La guerre d’Algérie fait partie de son histoire familiale, à travers son père, et c’est en effectuant des recherches sur le sujet qu’elle tombe sur Gisèle Halimi.

« Elle est féministe dans toutes les dimensions du terme ! Elle lutte pour les droits des femmes mais aussi pour elle-même. Et je trouve que c’est un modèle intéressant à montrer aux jeunes. Je n’aime pas tellement le terme « modèle », je trouve qu’il renvoie l’idée de se conformer… Je dirais plutôt source d’inspiration ! », explique l’autrice. 

Peu de temps après éclate l’affaire DSK. C’est un déferlement médiatique qui montre que le combat que Gisèle Halimi a porté pour faire reconnaître le viol en crime est toujours d’actualité :

« La notion de consentement, l’inversion de la charge sur la victime… Elle a fait changer la loi en 1978 mais en 2011, on en était toujours à avoir les mêmes comportements et remarques dans les médias… »

Pendant la conférence, elle raconte comment Gisèle Halimi, dans cette décennie qui va marquer l’histoire des féminismes, se saisit d’un cas particulier et l’érige en procès de société. Avec l’avortement tout d’abord lors du fameux procès de Bobigny où elle défend Marie-Claire et sa mère, entre autres.

« En 72, elle fait venir à la barre experts, politiques, journalistes, médecins, etc. et fait le procès de l’avortement. Elle a ensuite été menacée, comme elle l’avait été en défendant les indépendantistes algériens. C’était une remise en question de ce qu’elles étaient en tant que femmes qui prennent la parole, comme pour Simone Veil. En 78, elle reproduit ça avec le procès de deux jeunes femmes violées, Anne Tonglet et Araceli Castellano. Au départ, l’affaire est envoyée en correctionnelle pour coups et blessures. Mais les deux femmes obtiennent la requalification du procès. Gisèle Halimi prend leur défense et là encore, elle gagne. Non seulement elle gagne le procès mais elle gagne une nouvelle loi qui précise le viol et empêche sa correctionnalisation (dans le texte, car dans les faits, nombreuses sont les victimes à voir leur affaire requalifiée en agression sexuelle plutôt qu’en viol, ndlr). », précise Jessie Magana. 

Et le 16 mars 2021, quelques heures avant l’échange organisé par Déclic Femmes, les député-e-s fixaient à l’Assemblée nationale l’âge du consentement à 15 ans. Malgré le « procès du viol », l’affaire DSK, l’affaire Weinstein, et de nombreuses autres, les violences sexistes et sexuelles sont toujours terriblement prégnantes. Pourtant, l’arsenal judiciaire ne manque pas.

PARLER, PRENDRE LA PAROLE, DÉNONCER… ET ÊTRE ÉCOUTÉ-E-S ET ENTENDU-E-S…

Nous subissons toujours la lenteur de l’évolution des mentalités, précise Jessie Magana. Les mentalités évoluent plus lentement que la loi. Toutefois, les militantes féministes ne lâchent rien et c’est parce qu’elles œuvrent au combat et à la reconnaissance des droits et des choix et qu’elles prennent la parole et dénoncent les violences sexistes et sexuelles que l’autrice réédite Gisèle Halimi : non au viol, actualisant le propos dans un contexte nouveau, en pleine effervescence féministe.

« Avec les réseaux sociaux, les #, des actrices, chanteuses, femmes comme vous et moi sans audience médiatique ont pu s’exprimer. Grâce à ces mouvements, la parole d’une femme devient mondiale. », s’enthousiasme-t-elle.

Au départ, Jessie Magana est éditrice. Elle publie les récits et les imaginaires d’auteurs et autrices. Un jour, elle ressent le besoin de parler en son propre nom : « J’ai mis du temps à trouver ma voix et ma voie. Et j’ai choisi de m’adresser en priorité aux jeunes mais mes livres peuvent aussi être lus par les vieux… Quand on écrit pour la jeunesse, on est considéré-e-s un peu en marge. Et puis on a tendance à considérer qu’il faut avoir un ton neutre. J’essaye, dans tous mes livres, d’avoir un point de vue engagé pour transmettre mes combats et inciter à l’action. La littérature peut changer le monde ! »

Elle va réveiller l’adolescente qu’elle était. Une adolescente qu’elle décrit comme un peu seule dans sa révolte. « Je ne viens pas d’une famille de militants mais le sentiment d’injustice me suit depuis mon enfance. Ma conscience politique s’est construite au collège, par les rencontres et les livres. », souligne-t-elle, précisant qu’elle est née en 1974, « l’apogée du féminisme », mais lorsqu’elle grandit, dans les années 80 et 90, elle est « dans le creux de la vague… ».

Dans ces décennies de fin de siècle, les militantes sont traitées d’hystériques de service. Elles luttent pour du vent, se dit-on dans l’imaginaire collectif, puisque la contraception, c’est ok, l’avortement, c’est ok, l’accès à l’emploi, aussi… Alors quoi encore ? « À cette époque, seule la réussite individuelle comptait. Si on n’était pas une femme épanouie, si on était une femme victime de violences par exemple, bah, c’était de notre faute… », se remémore-t-elle.

Jessie Magana se souvient encore de la solitude en manif. Elles n’étaient pas très nombreuses à prendre la rue et occuper l’espace public pour défendre les droits déjà conquis et ceux à conquérir. Elle n’est pas amère vis-à-vis de cette période, elle dit même que finalement ça l’a forgée et lui a permis d’avoir du recul :

« Je considère que j’ai un rôle de trait d’union entre les générations. Et ça, ça m’intéresse beaucoup dans mon travail de transmission. »

LA QUESTION DE LA TRANSMISSION

Son nouveau roman, Nos elles déployées, répond parfaitement à ce pont entre les générations. Elle a écrit une première version il y a 15 ans. Sans réponse favorable de la part des maisons d’édition, elle l’a enfermé dans un tiroir mais la jeune fille, son héroïne, a lutté pour ressurgir, parler et trouver sa place.

Jessie Magana a retravaillé son histoire. Ou plutôt l’histoire de Solange, lycéenne dans les années 70 qu’elle traverse aux côtés de sa mère, Coco, et ses ami-e-s militantes féministes. En 2018, Solange est devenue mère à son tour et sa fille est héritière de deux générations différentes de femmes.

L’autrice explore ici les cheminements de ses personnages pour trouver leurs propres voix/voies et s’inscrire chacune dans leur propre contexte de lutte collective et d’épanouissement personnel. On aime son écriture, poétique et réaliste, son sens du détail et sa manière de nous intégrer à des événements historiques que nous n’avons pas vécu. Dans Nos elles déployées, on sent l’ambiance et on la vit. C’est un roman cinématographique qui met nos sens en éveil et nous plonge dans la vie de Solange, sur fond, très présent, de révolution féministe. 

Des réflexions sur le corps, les choix, la liberté, la parentalité, le sexe, les normes sociales, les conventions patriarcales mais aussi les complexes, les paradoxes, les oppositions… « L’intime est politique, c’est ce que je voulais faire avec ce roman. Créer une alternance entre l’intime et le collectif. Et je voulais parler du rapport au féminisme mais aussi du rapport à l’autre. Entre femmes mais aussi entre deux pays, Solange va aller en Algérie. C’est important de ne pas rester dans le contexte franco-français. Ce qui nous rassemble, c’est d’être ou de nous considérer femmes. On se retrouve dans la sororité. », souligne-t-elle.

UN RÉCIT INTIME ET COLLECTIF

Elle ne gomme pas les différences. Elle fait simplement en sorte que cela ne divise pas les femmes : « On utilise souvent les différences des femmes pour les diviser. On le voit à travers les questions d’identité de genre, de race, de religion, etc. Même au sein du mouvement féministe, avec les pro prostitution ou pas, la reconnaissance et l’inclusion de la transidentité dans les débats féministes… Il y a toujours un espace de dialogue d’opinions différentes mais l’expérience intime de la féminité nous rassemble. Il y a toujours eu des conflits, même dans les années 70 entre les gouines rouges et les mouvements plus axés féminisme d’État. Ça fait partie du plaisir de brasser les idées, de débattre ensemble, etc. »

Jessie Magana insiste, ce n’est pas seulement un roman de lutte, c’est aussi un récit qui questionne notre rapport à l’intime, nos manières et possibilités de nous construire à travers des désirs contradictoires, de s’affranchir des injonctions, en l’occurrence ici celle de la mère de Solange qui lui assène d’être libre, notre rapport à l’amour et à comment écrire l’amour. C’est un récit intense et enthousiasmant, profondément humain et vibrant.

Un récit qui résonne jusqu’en Afrique subsaharienne puisque ce soir-là, depuis Dakar, Odome Angone suit la conférence, elle est universitaire, ses travaux sont orientés sur l’afroféminisme et elle témoigne :

« Ici, être féministe est toujours un gros mot. Des femmes font entendre leurs voix au-delà des assignations. On nous reproche d’être contaminées par le discours occidental. Mais ce n’est pas un concept exogène, c’est une réalité que l’on vit au quotidien. »

Elle à Dakar, nous à Rennes. Toutes derrière nos écrans, en train de partager un instant suspendu de luttes féministes qui dépassent largement les frontières. Y compris celles de la définition pure du sexisme pour nous faire rejoindre celle de l’intersectionnalité.

Pour Jessie Magana, c’est d’ailleurs cela chez Gisèle Halimi qui inspire aujourd’hui les jeunes générations. Avocate engagée pour la cause des femmes, elle devient une figure intersectionnelle et rebelle, dans une société où les féminismes évoluent au pluriel, vers une prise en compte comme l’a formulé Fatima Zédira de la dignité et de l’histoire de la personne.

 

 

Célian Ramis

De la solitude des femmes iraniennes à la répression d'une population

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9 mars 1979. Les Iraniennes envahissent massivement l’espace public pour protester contre l’obligation de porter le voile. Du point de vue de Mahnaz Shirali, sociologue et enseignante à Sciences Po Paris, cette photo symbolise la "solitude des femmes en Iran".
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9 mars 1979. Les Iraniennes envahissent l’espace public pour protester contre l’obligation pour elles de porter le voile. Du point de vue de Mahnaz Shirali, sociologue et enseignante à Sciences Po Paris, cette photo symbolise la situation des femmes en Iran, aujourd’hui encore : 

« C’est ce que j’appelle la solitude des femmes iraniennes. Elles sont seules dans la rue. Sans le soutien des hommes. Dès qu’elles parlent de ce qu’elles vivent au quotidien, après 42 ans de résistance, tout de suite les voix masculines s’élèvent pour dire ‘Nous aussi, on souffre’. Je reconnais que ce n’est pas facile pour eux non plus mais il y a une séparation entre ces deux situations. »

Elle poursuit : « On pense qu’il y a tellement de problèmes qu’il ne faut pas parler des conditions des femmes. » Elles ne sont pas une priorité. Pour la sociologue, ce que les hommes iraniens ne voient pas, c’est que la répression, dont ils souffrent à l’heure actuelle, s’est imposée en plusieurs étapes.

Mercredi 10 mars, Mahnaz Shirali animait une conférence « Décalage entre les sexes : la solitude des femmes iraniennes », organisée par l’Association Franco-Iranienne de Bretagne à l’occasion du 8 mars à Rennes, et retraçait l’histoire d’une répression qui a débuté par celle des femmes avant de s’étendre à l’ensemble de la population.

LA SOCIOLOGIE DE TERRAIN… À DISTANCE

« Il y a eu d’énormes cas d’infanticides et de féminicides cet été. La société iranienne n’a jamais été aussi violente. », déplore la sociologue qui avant de démarrer sa conférence explique sa méthode de travail. 

« Les sociologues – critiques avec le régime - ne sont pas les bienvenu-e-s en Iran. Jusqu’en 2000, j’y allais régulièrement. Je pratiquais la sociologie de terrain. En 2001, ma thèse a été publiée et je n’ai pas osé ouvertement y retourner. Je me suis tournée vers l’histoire de l’Iran. »
souligne-t-elle.

En 2008, elle parle d’un changement majeur : l’arrivée des réseaux sociaux. Facebook tout d’abord puis Twitter, Instagram, etc. Ainsi, elle accède aux Iranien-ne-s et depuis 2014, peut explorer la possibilité d’en tirer un travail sociologique. Prochainement son livre Fenêtre sur l’Iran – le cri d’un peuple bâillonné, dans lequel elle raconte tous ces bouleversements, sera publié.

« C’est inédit ! Ce sont de vraies mines d’or pour nous. Par contre, ce qui est compliqué c’est d’extraire et d’utiliser la matière récoltée. Depuis mai 2020, on assiste à une explosion des violences à l’encontre des femmes. On le voit à travers les journaux du pays et les vidéos postées par les iranien-ne-s sur les réseaux sociaux, qui sont des outils qui leur permettent de communiquer avec le monde libre. Ils filment les situations et les postent. Ces scènes quotidiennes sont confirmées ensuite dans les journaux. »

Elle fait mention d’une femme décapitée par son père parce qu’elle s’était réfugiée chez son amoureux. Le patriarche n’a pas été inculpé pour l’infanticide commis. « Le corps de la femme appartient au père. Dans les cas de féminicides, les femmes sont tuées par la famille du mari, le mari ou sa propre famille. Selon les lois, les hommes sont les chefs de la famille. Les victimes sont les enfants et les femmes. », commente-t-elle.

S’ATTAQUER AUX DROITS DES FEMMES

Plus l’économie est en chute libre, plus la quantité de violences intrafamiliales augmente. On le sait, les droits des femmes ne sont jamais acquis et les crises, qu’elles soient politiques, économiques et/ou religieuses, les menacent sans relâche. Au fil de ses recherches, Mahnaz Shirali constate que les violences à l’égard des femmes deviennent de plus en plus banalisées.

Elle se rappelle notamment de l’époque où elle se rendait en Iran. La polygamie était autorisée mais mal vue : « Sous la république islamique, le mariage des enfants est devenu tout à fait légal. Sous l’ancien régime, l’âge légal était fixé à 15 ans. Ensuite, Khomeini l’a baissé à 13 ans. Aujourd’hui, il n’y a plus d’âge, à partir du moment où le père accepte. Cet acte de marier les enfants est devenu banal. »

Concernant la maternité, les femmes sont réduites à l’état de la nourricière, déclare-t-elle. Aucune décision concernant l’éducation des enfants ne peut être encadrée par la mère. La sociologue concède aux ayatollahs au pouvoir la réalisation d’un travail minutieux pour avantager massivement les hommes, « les rendant complices de ses établis » et créant un conflit entre eux et les femmes, isolées, sans alliés.

Sans célébrer l’ancien régime du Shah d’Iran, elle explique tout de même la modernité alors du pays, de ses infrastructures et des structures politiques. Ce n’est certes pas une démocratie mais le pays est modernisé et les femmes y ont accès à des postes à responsabilité, comme juges, chirurgiennes ou encore ministre de l’Education.

« Le 8 mars 1979, c’est la première année de Khomeini. Son arrivée n’était pas facile. Il a aboli la loi de protection de la famille, a imposé le port du voile aux femmes et a réprimé les droits des femmes. », souligne Mahnaz Shirali, partageant alors son écran sur lequel est diffusé la photo d’une foule compacte composée exclusivement de femmes dans la rue. Le fameux 9 mars 1979 illustrant « la solitude des femmes iraniennes ». 

Le régime en place a instauré la répression progressive de toute une population. En commençant par celle des femmes. «

 Il n’aurait pas pu s’installer s’il n’avait pas commencé par là pour ensuite réprimer le reste de la société. Parler des femmes en Iran n’est pas marginal. La lutte contre la répression doit commencer par la lutte pour les droits des femmes. Et ce n’est pas une lutte marginale ! »
insiste la conférencière. 

CONDITIONNER LES ENFANTS AUX ASSIGNATIONS DE GENRE

Et comme dans toute problématique de discrimination, l’enjeu se niche dans l’éducation. Dès le plus jeune âge, on conditionne les enfants à établir une distinction entre les deux sexes et les deux genres et petit à petit à ancrer la supériorité de l’un sur l’autre.

Ainsi, les petites filles sont éduquées à devenir des mères. « J’ai remarqué dans les dessins animés, etc., elles sont invitées à devenir mères mais dans le sens, comme je vous le disais tout à l’heure, de nourricières ! Ce sont les pères qui prennent les décisions pour les enfants. », s’insurge-t-elle.

Les petits garçons, eux, sont nourris à la violence des images d’exécution et de tortures. « C’est devenu le quotidien dans les villes. La république islamique montre son plein pouvoir. », conclut Mahnaz Shirali.

Elle le dit sans vergogne : en tant qu’iranienne, la situation la déprime au plus haut niveau mais la fascine, en tant que sociologue. 

Célian Ramis

Les premières de corvée, contre le patriarcat

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8 mars 2021. Poings et majeurs en l’air, l’espoir perdure, les forces s’organisent, le combat progresse. Les féminismes poursuivent l’écriture de notre Histoire. Commune.
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Pari risqué mais défi relevé : les personnes sexisées ont pris la rue, occupé l’espace public et élevé leurs voix ce lundi 8 mars, journée internationale de luttes pour les droits des femmes, et ont répondu à l’appel d’une grève féministe. À Rennes, elles étaient des milliers – entre 2500 et 3000 - à manifester, organisant pour la première fois un départ depuis l’université Rennes 2 à Villejean, traversant le CHU de Pontchaillou, avant de rejoindre le cortège massif à République. 

Lundi 8 mars, un peu avant midi. Les rayons du soleil transpercent la fraicheur saisissante de la fin de l’hiver. Le campus paraît endormi. Il est en réalité endolori du manque de ses étudiant-e-s, contraint-e-s au distanciel. À quelques centaines de mètres du métro, à l’arrière du bâtiment L, le potager de Rennes 2, géré par l’association Ar Vuhez, s’anime au son des luttes qui convergent en son sein.

« MORT AU PATRIARCAT, PAS AU CLIMAT – Luttes féministes et écologistes doivent s’unir. Nous proposons un premier pas en accueillant sur le potager des artistes rennais-es qui invitent à penser le féminisme par le prisme des identités, des violences, des revendications, le tout dans le cadre écologique du POTAGER. Car un potager ne fait pas que pousser des plantes, il fait aussi mûrir l’esprit. »
indique une pancarte trônant sur une butte. 

Du 8 au 15 mars, la Semaine interassociative contre le sexisme et Ar Vuhez permettent à des œuvres photographiques, des créations dessinées et des collages, de côtoyer herbes et plantes, y compris celles qui font du bien à la chatte comme l’explique Guillemette Bourdillon, herboriste toulousaine, dont le fanzine « Les amies plantes de ma chatte – Petits et grands maux de la vulve, du vagin, de l’utérus : les plantes qui soignent ! » est mis à disposition à l’entrée du potager.

On serpente le lieu, découvrant le collage de Céline Drouin sur le sexisme, les photos réalisées par Michaël Delavenne de personnes aux poitrines taguées de messages revendiquant la liberté des femmes à disposer de leur corps ou dénonçant l’analogie du corps des femmes et des proies comestibles.

Il y a aussi la série de dessins de Léa Julienne qui capte notre regard et attire notre attention de par leur esthétique semblable à celles des comics. Chaque planche dévoile une femme et est ornée d’une phrase qui souligne la toxicité des relations que la protagoniste a subi. « They will tell you you look like a whore » au dessus du visage d’une femme voilée qui se maquille les lèvres. « They will lie in order to possess you » au dessus d’une jeune fille en mini jupe qui semble converser sur son téléphone. « They will let you think you are the problem » au dessus d’une femme à la chevelure bleue, le corps nu. « They will tell you how you can or cannot dress » au dessus d’une femme noire en sous-vêtements dont le reflet du miroir atténue sa carnation.

Et puis, au fond du potager, deux photographies nous interpellent. Elles sont issues de la série Abysses, réalisée par Elodie Poirier. Ça nous effraie et ça nous subjugue. Des portraits pris jusqu’à la taille, les corps sont nus, épurés, dans un décor noir et sur la peau, des taches qui semblent provenir de l’intérieur même du sujet photographié et jaillir sur leur corporalité extérieure. Fascinant. 

CRÉATIVITÉS ET FORCES DÉBORDANTES

La journée démarre bien. Elle sera stimulante et émouvante. Inspirante. Enième preuve, s’il en fallait encore, de la créativité et de la force débordantes des militant-e-s féministes. Assises dans l’herbe, devant le potager, elles prennent marqueurs et cartons et fabriquent leurs banderoles pour la manifestation pendant qu’une autre bombe un clitoris géant confectionné par ses soins.

« Soyez FORT comme des femmes », « En moyenne, 94 000 femmes sont victimes de viol ou tentative de viol chaque année » ou encore « En 2019, 84% des mort-e-s en couple sont des femmes. ACABlé-e-s » et bien d’autres slogans, voilà le groupe paré qui rejoint le lieu de rendez-vous quelques mètres plus loin. 

Cette année, un cortège part de Villejean. Une nouveauté qui s’affiche comme un symbole. Désormais, le féminisme devra être pluriel et inclusif. On prône la solidarité avec les femmes du monde entier, on fait entendre la colère des féministes de l’université comme de celles des quartiers populaires, on dénonce les violences sexistes et sexuelles en appelant à une riposte féministe, on parle d’hétérorisme, on danse sur l’hymne des féministes chiliennes de Las Tesis « Un violador en tu camino », on s’affirme « fières, fortes, et radicales et en colère »,on réclame des moyens pour les travailleuses, « du fric pour la santé, pas pour les flics ni l’armée », on exige le respect de nos droits et de nos libertés. 

Une heure et demie plus tard, c’est plus d’une centaine de personnes qui déboule de la fac, après avoir traversé le site du CHU à Pontchaillou, et qui se joint au rassemblement à République qui démarre non pas en fanfare mais en chants tout de même avec Colectiva !,projet de la Ko-compagnie qui devait avoir lieu le week-end précédent place de la Mairie.

Si l’événement a été annulé en raison de la crise sanitaire, les voix s’élèvent malgré tout dans l’espace public à travers les textes engagés chantés par le chœur de femmes qui entraine de nombreuses militantes à se joindre à elles. Dans l’air, l’intensité des énergies festives et militantes qui bouillonnent et crépitent est palpable. C’est un jour de luttes. Il nous faut le rendre mémorable. Le marquer de nos ferveurs et de nos déterminations mais aussi de nos joies et de nos rages.

Les poings en l’air, les slogans au bout des lèvres masquées, les drapeaux flottent dans la froideur de ce début mars et la noirceur de nos réalités, les noms des femmes assassinées par leur compagnon ou ex compagnon siègent à nos pieds sur le sol pavé, les panneaux claquent et résistent au vent frais et à la fatigue des bras levés, les messages sont guerriers.

« Respecte mon existence ou affronte ma résistance », « Nos familles trans sont belles », « Le monde qui vient devra s’habituer partout à la présence de nos filles, de vos filles », « La révolution sera féministe ou ne sera pas »,« Mon corps mon choix », « Homos et hétéros égaux en droits – l’hétérorisme des intégristes ne fait pas loi », « Université sexiste ? Riposte syndicale et féministe », « Ovaires et contre tous », « On ne rasera ni les murs, ni nos chattes ».

On ne rasera ni les murs, ni nos chattes. Non, les murs serviront désormais de lieux d’expression féministe. Les colleuses ont prévenu : « Eduquez vos fils ». Impossible de rater le message qui trône sur la station de métro République. En chemin, lorsque le cortège s’élance vers la place de Bretagne, on croise aussi des affiches revendiquant la gratuité des protections menstruelles, disposées sur les devantures des restaurants fermés et façades des immeubles : « Saigner ne devrait pas être un luxe » et « Ras la cup de devoir payer – 24 €, c’est ce que paye en moyenne une personne pour ses règles chaque mois. »

LES PREMIÈRES DE CORVÉE À LA TRIBUNE

Précarité menstruelle et plus globalement précarité tout court. Voilà le thème au cœur de cette journée internationale de luttes contre le patriarcat qui met en lumière « les premières de corvée ». Le syndicat Solidaires le rappelle : « Premières de corvée à la maison, premières de corvée au travail, et à poste égal, on n’est toujours pas à salaire égal… », soulignant qu’il y a toujours 25% d’écart salarial entre les hommes et les femmes.

Sortir de l’invisibilisation. Prendre la parole et se faire entendre. Occuper l’espace public et le remplir de nos vécus, de nos corps, de nos identités de genre, de nos conditions, de nos oppressions, de nos discriminations. Les crier, les vivre, les faire résonner, les montrer.

À la tribune, les prises de parole, traduites également en langue des signes françaises, se succèdent et elles font du bien. Elles boostent nos motivations, complètent nos réflexions, alimentent nos imaginaires en terme de stratégies à mettre en place et de chemins encore à parcourir.

L’inclusion en est le maitre mot. Le départ du cortège depuis Villejean est un moyen d’y parvenir. « La voix des femmes des quartiers populaires est rarement entendue. J’aime autant vous dire qu’on va en parler longtemps de notre passage et j’espère qu’il y en aura d’autres. », scande Régine Komokoli, porte-parole de Kune, collectif des femmes de Villejean. Ensemble, elles œuvrent « pour continuer de gagner pas à pas (leur) place dans la société en tant que femmes, en tant que travailleuses, en tant qu’immigrées, en tant que femmes travailleuses immigrées. »

Elle poursuit : « Nous ne sommes pas de grandes intellectuelles, nous ne faisons pas de bruit, nous agissons sur notre quotidien, nous sommes représentatives de la diversité de la France d’aujourd’hui. Certaines d’entre nous sont bretonnes, normandes, d’Afrique du nord, de l’ouest et du centre. Certaines sont retraitées, d’autres sont salariées, en intérim, étudiantes en attente d’un premier emploi. Certaines sont des mamans solos, d’autres sont en couple. Pourtant nous nous sommes mises ensemble. Parce qu’au-delà de nos différences d’âge, de travail, d’origines, nous partageons l’immense bonheur d’être femmes entre nous. Nous nous sommes mises ensemble parce que nous avons du respect et de la considération pour les parcours de vie. Respect et considération, c’est ce qui nous manque le plus, nous les femmes des quartiers populaires dans cette société encore fortement marquée par le patriarcat. »

Précarité des familles, précarité des femmes. Mères ou non, célibataires ou non, ce sont toujours les plus mal payées, majoritairement employées à temps partiel, en intérim ou en CDD. Avec des écarts de salaire avoisinant les 25% entre les femmes et les hommes. « C’est comme si chaque jour, à partir de 15h40, les femmes travaillaient gratuitement. Nous voulons l’abandon définitif de la réforme des retraites qui constitue une double peine pour les femmes. Nous ne voulons pas payer les conséquences de cette crise. », signale la CGT.

« FAIRE DU 8 MARS UN POINT DE DÉPART POUR CONTINUER CETTE LUTTE ENSEMBLE »

Et ça, c’est quand elles peuvent travailler. Car Rachida, du Collectif Sans Papiers de Rennes le rappelle :

« Nous migrantes, réfugiées, sans papiers, demandeuses d’asile, nous les femmes et les personnes lesbiennes, gays, bis, trans, nous sommes parmi vous à l’appel international pour une grève féministe. Nous avons l’interdiction formelle de travailler pour survivre et pourtant nous sommes ici avec vous. »

Son discours est puissant. Elle démontre l’importance de l’inclusion de tou-te-s dans les luttes féministes. Parce que nombreuses sont celles qui ont été oubliées, négligées, méprisées. Rachida demande aux militantes de les soutenir et d’être à leurs côtés dans leurs combats :

« Il ne nous suffit pas d’avoir une place parmi vous sur vos estrades militantes. Nous féministes prolétaires que notre courage de survivre a amené ici pour trouver refuge, nous nous sommes échappées des guerres produites par le patriarcat et le capitalisme de nos pays. Nos pays maintenus dans la misère. Nous venons chercher parmi vous solidarité et refuge. Quelque soit les barrières qui nous opposent, il est en notre pouvoir de les affranchir. (…) Tant que l’imbrication de la violence patriarcale et raciste ne sera pas vaincue, nous ne pourrons pas triompher ensemble. Tant que la liberté des migrantes n’est pas prise de partout comme un combat général, nous ne pourrons pas être ensemble sur la place mais resterons divisées dans les maisons, les villes, les lieux de travail. C’est pourquoi le 8 mars nous nous joignons à vous, à la lutte des femmes, contre les violences, l’exploitation patriarcale, c’est pourquoi le 8 mars, nous demandons un permis de séjour illimité et sans conditions. Nous appelons tout le monde à soutenir cette demande. Faire du 8 mars un point de départ pour continuer cette lutte ensemble. De la force transnationale et la grève un instrument général ! Soutenez-nous, nous avons besoin de vous. »

Se soutenir. Avancer ensemble. Construire réflexions et stratégies à partir des récits et expériences des personnes concernées. Sans prendre la place des personnes concernées. Sans parler à la place des personnes concernées. Doris, travailleuse du sexe et trésorière du STRASS dont elle est la référente en Bretagne, et créatrice des Pétrolettes, association de développement communautaire, le formule parfaitement :

« Nous vous donnons rendez-vous pour poursuivre ensemble la réflexion et les luttes et trouver ensemble des solutions à notre émancipation. La libération des travailleuses du sexe sera l’œuvre des travailleuses du sexe elles-mêmes. »

Son discours analyse les rapports de domination hommes – femmes depuis le système féodal jusqu’à aujourd’hui. Le contrôle des femmes par les hommes. La protection offerte par les hommes aux femmes qui en échange offriront du travail gratuitement. Le viol comme arme de guerre pour détruire la crédibilité du protecteur. Le couple hétérosexuel et la famille comme seule garante de la sécurité des femmes, « alors même que la famille et le couple sont une des plus dangereuses (structures, ndlr)pour elles. »

Elle poursuit : « La théoricienne Silvia Federici explique comment les chasses aux sorcières, la criminalisation de la prostitution ou les viols en bande organisée participent de la même logique répressive au contrôle des femmes. Il s’agit d’interdire l’accès à l’espace public, d’enfermer dans la sphère domestique, familiale, privée. Au passage, cela permet de rendre acceptable aux hommes des classes inférieurs la transition vers un capitalisme moderne puisqu’il devient le chef de la famille, petite entreprise artisanale dont il est le patron. 

La criminalisation du travail sexuel représente une attaque contre une forme de solidarité organisée entre les femmes. Les lois sur le proxénétisme en particulier prétendent protéger les femmes prostituées contre l’exploitation, en criminalisant toute forme de relation et d’organisation avec des parties tierces, y compris les travailleuses du sexe entre elles. On se retrouve contraintes de travailler en toute isolation, à la merci de toute forme d’agressions. »

Les prises de parole sont riches de points de vue peu médiatisés et souvent décriés dans la société actuelle qui, comme le démontre Doris, trie les gentil-le-s et les méchant-e-s et marginalisent, voire criminalisent, toutes les personnes n’entrant pas docilement ou pas du tout dans les cases binaires d’une vision manichéenne.

DÉCONSTRUIRE LA NORME BLANCHE, MASCULINE, HÉTÉRO, CIS, VALIDE

Au sein des féminismes, les sujets sont multiples. Parce qu’on touche ici à un système de domination profondément ancré dans les mentalités, au même titre que le racisme, les LGBTIphobies, le validisme, etc. La norme est blanche, masculine, bourgeoise, hétérosexuelle, cisgenre, nourrie essentiellement à la viande rouge histoire de garantir sa virilité.

Ne pas répondre aux critères de cette norme occidentale qui se pense et se déclare universelle, c’est entrer dans la catégorie des minorités. Des minorités qui mises ensemble représentent bien plus de la moitié de l’humanité… Et pourtant, on reste inégales-inégaux en droits dans le quotidien.

« Pandémie, libéralisation, violences sexistes et sexuelles, injonctions et précarité, pour toutes ces raisons et bien d’autres encore, nous sommes ici aujourd’hui pour occuper la rue et réclamer des mesures gouvernementales concrètes revendiquant notre place en tant que personnes essentielles et victimes du patriarcat. Merci d’être ici aujourd’hui pour les femmes incarcérées, les victimes des LGBTIphobies, les femmes sans papiers, les travailleuses, les étudiantes, les mères, pour toutes ! », déclare Rebecca, de Solidaires étudiants.

Elle prend place à la tribune avec Chloé, de la Fédération Syndicale Etudiante, qui dénonce la précarité des étudiants et notamment des étudiantes qui constituent 58% des boursier-e-s. Sans oublier la précarité menstruelle qui touche 1,7 millions de françaises et de français « amenant renoncement à toute vie sociale ou impérative comme aller en cours. » Pour elle, l’annonce gouvernementale concernant l’accès aux protections menstruelles dans toutes les cités universitaires du CROUS n’est qu’une « mesure pansement ». Elle conclut : 

« Puisqu’il faut travailler pour survivre, mettons fin aux restrictions légales des possibilités d’emploi pour les femmes voilées, afin de lutter contre les discriminations à l’embauche d’un gouvernement raciste et sexiste qui nous le prouve jour après jour. »

La parentalité est également abordée à l’occasion de ce 8 mars à Rennes. Parce que l’extension de la PMA à tou-te-s n’est toujours pas obtenue de manière satisfaisante. Ce combat de longue date et de longue haleine trouve évidemment sa place dans les revendications féministes. Dans la question du choix. Dans la question des libertés individuelles.

Alors, le Planning Familial 35 rappelle que ce que l’on veut c’est l’accès à la PMA « pour toutes les personnes en capacité de porter un enfant, seules ou en couple et (que cela, ndlr)mette fin à l’hypocrisie actuelle qui oblige encore ces personnes aujourd’hui à partir à l’étranger ou à se débrouiller toutes seules. »

La prise de parole est commune avec Iskis – centre LGBTI de Rennes qui ajoute :

« Cette loi qui contribue à la reconnaissance de la diversité des familles doit aussi acter l’égalité de droit entre toutes les familles, entre tous les parents quelque soit leur identité de genre ou orientation sexuelle, et entre tous les enfants quelque soit leur mode de conception. En effet, nous refusons qu’un enfant soit stigmatisé en raison de son mode de procréation. Nous refusons toute indication relative à la PMA dans l’acte de naissance des enfants. Nous voulons que les choix des personnes soient respectés, que la diversité des familles soit reconnue, nous voulons la PMA maintenant et dans de bonnes conditions. »

« EN ROUTE VERS LA FIN DU PATRIARCAT »

Les luttes féministes sont nombreuses et ce 8 mars, comme tous les autres jours de l’année, on est convaincu-e-s que la révolution sera féministe ou ne sera pas. Parce qu’elle concerne l’intégralité de la société. Les confinements, les multiples MeToo, l’accumulation des témoignages et les actions au quotidien le démontrent : les personnes sexisées existent, elles sont là, présentes, elles participent tout autant si ce n’est plus au vu de toute la charge mentale qu’elle porte à la société.

Les sortir de l’invisibilité, les sortir de la précarité, leur rendre leur dignité et leur droit de vivre comme bon leur semble est indispensable. Les rages s’expriment avec force et enthousiasme mais aussi failles et désespoir parce que les combats sont aussi complexes, entiers et paradoxaux que tout individu.

Sans oublier une touche d’humour avec la performance de NousToutes35 qui explique l’organisation du cortège à la manière des hôtesses de l’air munies de pancarte demandant aux mecs cisgenres de se placer derrière la tête de cortège :

« Le Service d’Autoprotection Pailletté – le SAP – et l’ensemble de son équipage repérable par des pancartes violettes portées en sandwich sont heureux de vous accueillir pour cette manifestation « En route vers la fin du patriarcat » Nous sommes le 8 mars, à Rennes, à République et la température actuelle est… chaud bouillante nan ?

Nous vous proposons d’assurer votre confort durant cette marche en encadrant un cortège de tête en mixité choisie. Pour cela, nous vous rappelons que le principe de ce cortège est de laisser les personnes concernées prendre la tête. 

Les consignes pour ce cortège vont vous être présentées. Accordez-nous quelques instants d’attention merci. Vous êtes une femme, une personne non binaire, intersexe, un homme trans, vous êtes les bienvenu-e-s devant. Vous êtes un homme cisgenre, c’est-à-dire que votre genre ressenti homme est celui qu’on vous a assigné à la naissance. Alors votre place, en tant qu’allié de nos luttes, est derrière le cortège de tête. Vous pensez que le patriarcat c’est du pipi de chat et vous êtes arrivé-e-s ici par hasard, alors nous vous demanderons d’évacuer la manifestation. 

Le covid étant toujours parmi nous, merci de faire bien attention à mettre vos masques. Le SAP se tient à votre disposition en cas de difficulté dans le cortège de tête. Un service d’ordre plus classique se tient également à votre disposition dans le reste de la manifestation. Nous vous invitons à regagner la place qui vous sie dans la manifestation et nous vous souhaitons un très bon parcours. 

Car le patriarcat ne tombera pas tout seul, organisons-nous pour lui péter la gueule !!! »

Poings et majeurs en l’air, l’espoir perdure, les forces s’organisent, le combat progresse. Les féminismes poursuivent l’écriture de notre Histoire. Commune.