Célian Ramis
Charlotte Brédy, metteure en scène passionnée de Feydeau

La compagnie de théâtre Felicita, créée par la comédienne et metteure en scène Charlotte Brédy, s'est implantée à Rennes depuis trois ans. Pour la première fois dans la capitale bretonne, elle présente deux pièces de Feydeau, Le Dindon et Les Fiancés de Loche, à partir du samedi 27 septembre. Rencontre avec une inconditionnelle du dramaturge qui a rythmé toute sa vie professionnelle.
Tous les chemins mènent à Georges Feydeau. Le parcours de celle qui a vécu entre la Bretagne et la région parisienne se résume à cette phrase. Car l'auteur français la suit depuis l'adolescence. « C'est une grande histoire d'amour », concède la jeune femme.
Le rythme et les intrigues loufoques de ses comédies bourgeoises lui ont tout de suite plu. Un véritable défi pour la mise en scène et le jeu théâtral.
« La comédie est beaucoup plus difficile à jouer que le drame, parce que le rire va être déclenché sur un mot ou un rictus. Il faut être parfait à la seconde près », raconte-t-elle d'expérience. Pour autant, elle ne se laisse pas démonter. La comédie, un « théâtre sans prise de tête » selon elle, est son domaine de prédilection. L'artiste de 28 ans a fait de l'improvisation « sur le tas » et des formations sur la Commedia Dell'Arte, genre hérité de la scène italienne qui privilégie la gestuelle et l'échange avec le public.
PASSION FAMILIALE
Le théâtre, c'est une histoire de famille. Ses grand-parents paternels étaient tout deux comédien-ne-s et chanteur-se-s d'opérette. « Je me déguisais en clown à la maison », se souvient-t-elle, amusée. À 10 ans, elle a le déclic. Le professeur de musique de son collège, à Saint-Brieuc, lui attribue un petit rôle dans la pièce qu'il met en scène. Sa réplique est brève, seulement quelques mots. Mais « quelque chose s'est passé », reconnaît-elle. « J'ai pris du plaisir pendant cinq secondes et j'ai su que je voulais faire du théâtre mon métier. » Et sa détermination a payé.
À la sortie du lycée, la jeune femme intègre les prestigieux cours Florent à Paris, où la concurrence est rude. Pourtant, ses études avortent au début de la troisième année. La raison ? La pièce de Georges Feydeau, Le Dindon. Charlotte avait choisi de présenter une scène pour l'examen d'entrée au Conservatoire. Problème : aucun de ses camarades masculins n'a voulu ne voulait jouer le personnage principal, le jugeant trop compliqué.
« À ce moment, j'ai remarqué qu'il y avait un fossé entre moi et les autres élèves. C'est ce dramaturge qui m'a fait quitter les cours Florent ! », sourit la passionnée de théâtre au caractère bien trempé, qui poursuit : « C'est l'élément déclencheur tout bête mais je ne le regrette pas du tout. »
Une fois partie, elle se lance dans l'écriture de one-woman-shows dans lesquels elle retrace avec légèreté ses déboires sentimentaux de l'époque. Charlotte s'en sert comme thérapie par le rire jusqu'en 2011. En parallèle, elle joue dans plusieurs compagnies théâtrales. En 2009, elle monte à Paris sa propre troupe, la compagnie Felicita - bonheur en italien. Son envie initiale est de jouer avec des professionnel-le-s mais Charlotte fait immédiatement marche arrière, faute de pouvoir les rémunérer. Désormais, elle ne travaille qu'avec des personnes amateures « de façon professionnelle », précise-t-elle. « C'est une ambiance différente et une autre manière de travailler. Les amateurs viennent sans compter », compare la metteuse en scène.
LE THÉÂTRE, SOURCE DE LIBERTÉ
Il y a trois ans, Charlotte Brédy revient en Bretagne pour intégrer une troupe rennaise en tant que metteure en scène. « C'est très difficile d'en faire son métier à Paris, justifie-t-elle. Les salles de répétition coûtent une fortune et jouer revient cher. Moi je fais ce métier pour être libre, laisser mon imagination et ma créativité s'exprimer, pas pour être prise dans un système financier. »
Cependant, leur collaboration s'arrête rapidement. Motif : une autre pièce de Georges Feydeau. « Il n'y avait pas de comédiens suffisants pour monter Les Fiancés de Loche. Cela n'a pas abouti car nous n'étions pas sur la même longueur d'ondes. » Elle reprend ensuite la compagnie Felicita, qui déménage à Rennes.
FEYDEAU À DOMICILE
Depuis toutes ces années, son envie de mettre en scène ces deux pièces est toujours présente. Un projet de longue date qui se concrétise à partir du samedi 27 septembre sur les planches rennaises – salle Maurepas et salle Rabelais. Charlotte Brédy présente avec sa compagnie, Le Dindon et Les Fiancés de Loche.
« Tout se rejoint ! Ce ne sont que des boucles ! », s'enthousiasme-t-elle. Sept dates sont prévues pour chaque spectacle. Ce sont les premiers de Feydeau que la metteure en scène produit en Bretagne. En 2010, elle avait déjà dirigé à Paris, une œuvre du dramaturge, Léonie est en avance ou le mal joli, dans une mise en scène très contemporaine.
Les pièces seront également jouées dans un tout nouveau format proposé par la compagnie, le « théâtre à domicile ». La troupe est invitée à jouer une pièce chez un particulier qui convie lui-même ses invités. Cela donne « une ambiance plus chaleureuse car tout le public va se connaître », espère-t-elle. Pour tâter le terrain, un premier essai se fera chez Charlotte Brédy, à la Chapelle-aux-Filtzméens, au nord de Rennes, avant de se développer. Une initiative théâtrale à l’image de la jeune femme. Joyeuse et conviviale.


Quand soudain arrive une occidentale, « une brunasse habillée comme une blondasse ». Elle vient rencontrer la patronne qui doit lui présenter une fille pour son fils quadra, célibataire, qui veut une vierge portant le voile « car les filles de France ont tout perdu, la religion, la tradition… »
Deux groupes sont constitués au fond de la salle. Laëtitia Mazoyer, au milieu, observe, écoute, attend. Les femmes, et les rares hommes présents, accordent leurs arguments avant de les confronter entre eux. La conférence commence ainsi. Par un débat mouvant. D’un côté, celles qui sont pour l’affirmation « C’est le premier pas qui coûte ».
« Au bout d’un moment, en cours de route, j’ai commencé à marcher avec joie et j’ai tué le prince charmant ». Silence dans la salle, les spectatrices étant piquées par la curiosité. Dans une démonstration théâtrale, Laëtitia illustre la relation de couple.
Les féministes sont-elles systématiquement des chieuses sans humour ? Des femmes dont l’unique plaisir est d’emmerder tout le monde ? Il serait plus simple de l’affirmer mais on se priverait alors de grands débats et du spectacle offert par Karine Birot. Dans la vie civile, elle est conseillère au Planning Familial de Nantes. Et au cours de certaines soirées, à Rennes notamment, elle enfile son costume de Wonder Féministe, « la super-hérote qu’il manquait pour sauver le monde ». Parée d’un bandeau étoilé dans les cheveux, d’une cape étoilée, d’un tee-shirt rouge WF, d’une jupe têtes de mort et des bottines rétro, Karine Birot choisit d’incarner l’anti-héroïne des temps modernes.
« Je suis devenue animatrice socio-culturelle mais je me suis vite ennuyée. J’avais besoin d’espace pour développer mes supers pouvoirs parce que j’avais quand même un monde à sauver ! », scande-t-elle en se mordant les lèvres pour ne pas rigoler. Féministe professionnelle, elle le deviendra, c’est décidé.
Sans surprise, les deux têtes dirigeantes du festival des arts de la parole soulignent leur satisfaction face à cette édition « à la hauteur de 2013 et au dessus de nos attentes ». Mais cette année, pour Maël Le Goff, le festival « s’est ancré dans le printemps rennais, au même titre que les Transmusicales, Mettre en scène, Les tombées de la nuit, etc. à leur période ».

À 18h ce samedi, les festivaliers se pressent pour entrer dans le Magic Mirror, installé dans le parc du Thabor à l’occasion du festival des arts de la parole. Un art que les membres de Airnadette – en hommage à une ancienne première dame de France – sont loin de maitriser. Eux, leur truc, c’est le play back, le air guitar ou le air batterie. Ils ne chantent pas, ils ne parlent pas mais ils bougent les lèvres, brandissent leurs instruments imaginaires et déchainent les foules.
De l’extérieur, on entend simplement de la musique. Des chansons qui jamais ne sont diffusées dans leur intégralité. Juste des refrains qui défilent et s’enchainent, sans liens et sans rapport. Comme si on déroulait les fréquences radio d’un transistor, allant de Nostalgie à Chérie FM en passant par Skyrock, Virgin et RTL.
Ils maitrisent l’absurdité, ils subliment la caricature. Avec Airnadette, plus c’est gros – et gras – mieux c’est. Ils sont rock et emmerdent le monde. Et se moquent bien de Rennes, ville rock par excellence. Le public se fait insulter et en redemande. Et surtout n’hésite pas, entre deux ou trois « Ta gueule » ou encore « Enculés », à leur rendre la pareille.

La pièce part dans tous les sens, à tel point qu’il est difficile d’y trouver un thème précis. En deux répliques, les acteurs passent de la préhistoire aux artistes des années 1970, ou de la danse de la fin du monde à une proposition de biscuits au public. Mais s’il y a bien un sujet qui semble être pris au sérieux et sous toutes ses coutures : l’homme et l’humanité.

Quelques minutes avant le début de la lecture, la metteure en scène, Enora Boëlle, est tendue, stressée. Pour cette représentation unique au cours du festival, ils ont eu 5 jours de répétition, dans une école maternelle. L’objectif étant de présenter, sous la forme d’une lecture théâtrale, la première partie de l’histoire Moi, Canard, librement inspirée du conte de Hans Christian Andersen, Le vilain petit canard.
« Une histoire qui parle de la manière de transmettre le fait de grandir », analyse la co-directrice artistique du Théâtre de Poche. Plusieurs interrogations l’ont poussé à s’orienter vers ce texte : « Qu’est-ce qui fait que l’on existe ? Qu’on a sa place ? Qu’on est un individu unique ? Le Vilain petit canard pose la question : Comment chaque individu trouve sa place dans le monde ? »
Elle insiste néanmoins sur sa détermination à ne pas victimiser le protagoniste du conte car « on est tous un peu canard, à des degrés différents ». Pendant près de 30 minutes, les spectateurs sont suspendus aux lèvres de la comédienne, attentifs aux mots prononcés, au sens donné, tout en ne manquant pas de jeter un œil sur le rôle de Gregaldur, « issu de la scène impro-underground-punk » qui se tient assis sur la scène à deux pas d’Abigail.
« Comment les gens vont-ils comprendre ce spectacle ? » fût la principale interrogation de l’artiste avant de monter sur scène. L’artiste raconte avoir puisé son inspiration au travers de l’œuvre écrite par le sociologue Jacques Salomé, L’effet source, paru en France il y a deux ans, retranscrivant quelques 300 témoignages de femmes qui osent parler librement de sexualité, et plus précisément des femmes fontaines.
On connaît la compagnie des Becs Verseurs pour leurs indétrônables visites décalées au sein d’expositions – on se rappelle notamment de leur prestation aux Champs Libres lors de l’exposition Rennes en chanson, présentée de novembre 2010 à mars 2011 – ou de divers événements rennais. Ici, les deux conteuses se mettent à nue dans une création qui leur est propre.