Célian Ramis

YEGG fait sa BIennale de l'égalité : Marche ou C-rêve (2/5)

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Lorient
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Vendredi 16 mai, Laëtitia Mazoyer présentait sa conférence gesticulée « Marche ou C-rêve ! : L’échappée belle ou la longue traversée des violences conjugales ».
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Vendredi 16 mai, Laëtitia Mazoyer présentait sa conférence gesticulée « Marche ou C-rêve ! : L’échappée belle ou la longue traversée des violences conjugales », à l’occasion de la 4e Biennale de l’égalité, organisée à Lorient. Un parcours de combattante et de militante.

Deux groupes sont constitués au fond de la salle. Laëtitia Mazoyer, au milieu, observe, écoute, attend. Les femmes, et les rares hommes présents, accordent leurs arguments avant de les confronter entre eux. La conférence commence ainsi. Par un débat mouvant. D’un côté, celles qui sont pour l’affirmation « C’est le premier pas qui coûte ».

De l’autre, celles qui sont pour l’affirmation « Ce n’est pas le premier pas qui coûte ». Ce premier pas coûte et compte pour certaines et pour d’autres, il est l’élément déclencheur mais pas nécessairement le plus important. Après un échange convivial qui se conclut par une dernière affirmation d’une participante - « Cela dépend des situations et des personnalités… » - Laëtitia Mazoyer invite les spectatrices à s’asseoir pour parler de son premier pas.

Celui qu’elle a fait pour quitter le foyer familial mais surtout celui qu’elle a fait pour sa marche de Nancy à Strasbourg. « Quitter le foyer où je vivais des violences, enceinte de 8 mois… J’avais besoin de partir, besoin de protéger mon enfant », lance-t-elle devant une audience ébahie et pendue à ses lèvres. C’est en octobre 2010 que la jeune femme a franchi le pas. Déjà séparée de son compagnon, elle est encore noyée dans les démarches administratives.

Cette année-là, elle s’engage pour la grande cause : la lutte contre les violences faites aux femmes (année nationale). Sur scène, elle prend alors sur son dos, le sac de voyage qu’elle avait d’abord placée devant son ventre pour illustrer la grossesse. Elle sort des cartes et surtout un drap sur lequel elle a dessiné son trajet qu’elle étend sur un fil à linge. « Avoir un trajet, une première étape, ça me donnait déjà une perspective. J’avais défini des étapes, pris des gites. Un sac à dos, un duvet, des draps. Quand une femme part, il faut penser à prendre les papiers, la trousse de secours… Souvent le départ ne s’improvise pas, sauf pour les cas de danger imminent. Allez, on décolle ! »

Marche ou C-rêve n’est pas une invitation au voyage mais une manière pédagogique et vivante de retransmettre le parcours vécu par cette femme. Et qui pour la 7e fois joue sa conférence gesticulée. « J’ai choisi de parler de l’après car il est difficile de témoigner quand on est encore dedans. Mais c’est vital de témoigner, pour informer, pour donner une vision large aux potentielles femmes qui peuvent le vivre », nous confie Laëtitia.

Un discours commun à celui de Rachel Jouvet, victime de violences conjugales à 18 ans, qui a choisi de raconter son histoire dans la pièce « Je te veux impeccable, le cri d’une femme », mise en scène et jouée par la compagnie rennaise Quidam théâtre (lire notre Focus n°19 – novembre 2013). Pour Laëtitia, la marche est une manière d’apprendre à vivre avec la solitude qui l’habite depuis qu’elle est partie du domicile conjugal. Elle établit un lien entre la peur ressentie lors du départ et celle des premiers jours de randonnée.

« La peur vous colle à la peau. J’ai passé du temps à la dompter », explique-t-elle. Chaque étape fait écho à ce qu’elle a subi au cours de l’après. Les émotions, le changement d’humeur, les difficultés, le découragement, l’épuisement, l’envie d’aller plus loin, d’avancer, de se reconstruire… Elle a déjà connu tout ça. Mais lors de sa marche, elle se libère, éprouve le plaisir de marcher, fait des rencontres. Et au fil de la conférence gesticulée, elle crée des parallèles entre son cheminement personnel et le chemin parcouru dans l’histoire des luttes féminines. « J’ai commencé à sortir de mon idée que l’égalité femmes-hommes, c’était acquis », dit-elle en posant sur son nez des lunettes avec un seul carreau teinté. Et pour sortir davantage du brouillard, elle sort deux autres linges qu’elle attache au fil, derrière elle.

« J’ai découvert deux triangles qui ont complètement bouleversé ma façon de penser. L’un qui explique la situation : il y a le persécuteur, la victime et le sauveur dans une relation triangulaire. L’autre montre comment s’en sortir : la protection, la permission et la thérapie », décrit-elle.

Néanmoins, la jeune femme ne se contente pas de ces schémas et fouille dans les écrits jusqu’à tomber sur une enquête concernant les violences faites aux femmes et un numéro de téléphone : « On m’a répondu : « Vous avez le bon numéro », c’était formidable ». C’est avec un humour fin et léger que Laëtitia fait passer son message et conte son expérience. Un parcours de combattante mis en parallèle avec une marche de militante.

Un problème social

« Au bout d’un moment, en cours de route, j’ai commencé à marcher avec joie et j’ai tué le prince charmant ». Silence dans la salle, les spectatrices étant piquées par la curiosité. Dans une démonstration théâtrale, Laëtitia illustre la relation de couple.

Elle tient son sac à dos, bras tendus, en position de supériorité face à elle. Elle se baisse, se baisse et se baisse encore, jusqu’à plaquer d’un coup sec le sac à dos à terre et se relève fièrement en scandant « J’ai tué le prince charmant, pas l’amour ». Et la conférence reprend son rythme de marche, tantôt saccadé, tantôt rapide, et tantôt ralenti. Une cadence irrégulière que chacun et chacune peuvent comprendre et imaginer en se remémorant des instants de vie.

« Je me suis rendue compte que j’étais un problème social. J’étais vachement rassurée », précise-t-elle. Rires étouffés dans la salle. Un problème social. Comme toutes ses femmes qui à un moment ont choisi de résister, de bousculer l’ordre établi et de refuser l’autorité :

« C’est un angle nouveau dans le témoignage contre les violences faites aux femmes. J’ai découvert ça en lisant le livre de Patricia Romito, Un silence de mortes – La violence masculine occultée, et je trouve ça très important que les femmes ne soient pas soumises. Si elles mettaient la même énergie ailleurs que dans le combat contre les violences, elles pourraient déplacer des montagnes ! »

Laëtitia Mazoyer termine par le discours qu’elle a prononcé lors du colloque sur les violences faites aux femmes, une fois arrivée à Strasbourg : « Je voulais vous parler de l’après… Une fois qu’on est parti… Dont on ne parle pas beaucoup ». La conférence gesticulée s’achève sur le cri de guerre qu’elle a inventé lors de sa marche. Un moment intense et émouvant qui restera gravé dans les mémoires des spectatrices et spectateurs qui prennent ici la mesure des drames subis par plus d’une femme sur dix en France, sans compter celles qui ne dénoncent pas ou ne réalisent pas les violences dont elles sont victimes.

Célian Ramis

Karine Birot, la Wonder Féministe qui lutte avec humour (et Dalida) contre l’hétéropatriarcat

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Guy Ropartz, Rennes
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Karine Birot incarnait, le 25 avril dernier, Wonder Féministe ou la super-hérote qu’il manquait pour sauver le monde. Une conférence gesticulée humoristique au message cinglant et alarmant.
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Dans le cadre du festival des arts de rue Dehors, organisé par Les grands moyens à la salle Guy Ropartz à Rennes, Karine Birot incarnait, le 25 avril dernier, Wonder Féministe ou la super-hérote qu’il manquait pour sauver le monde. Une conférence gesticulée humoristique au message cinglant et alarmant.

Les féministes sont-elles systématiquement des chieuses sans humour ? Des femmes dont l’unique plaisir est d’emmerder tout le monde ? Il serait plus simple de l’affirmer mais on se priverait alors de grands débats et du spectacle offert par Karine Birot. Dans la vie civile, elle est conseillère au Planning Familial de Nantes. Et au cours de certaines soirées, à Rennes notamment, elle enfile son costume de Wonder Féministe, « la super-hérote qu’il manquait pour sauver le monde ». Parée d’un bandeau étoilé dans les cheveux, d’une cape étoilée, d’un tee-shirt rouge WF, d’une jupe têtes de mort et des bottines rétro, Karine Birot choisit d’incarner l’anti-héroïne des temps modernes.

Contrairement à Wonder Woman qui a toujours laissé planer le doute, Wonder Féministe est militante et engagée. Engagée contre les normes définies et imposées par l’hétéropatriarcat. Elle est alors bien décidée à lutter contre cela et à déconstruire les idées reçues autour des féministes : « J’en ai marre qu’elles soient associées à des chieuses sans humour ! Pourquoi doit-on se justifier à chaque fois ? Le féminisme dérange car il pose des questions sur tout, en réponse à l’hétéropatriarcat ».

Et c’est avec quelques vers de poésie moderne qu’elle entame sa conférence gesticulée, pour laquelle elle s’est formée avec la Scop Le Pavé – une coopérative d’éducation populaire – lors du dernier semestre 2013. Assise sur sa chaise, elle lit avec sagesse et philosophie : « Vous êtes charmante, est-ce que je peux vous lécher quelque chose ? », « J’aime bien les filles un peu grosses » ou encore « Oh la blondasse tu me suces la fougasses ?! » Des perles contemporaines de la tradition orale à lire sur le blog Paye ta schnek qui recense les meilleures phrases balancées par des hommes à des femmes dans la rue. La Wonder Féministe est, elle, venue « parler des femmes, des féministes, de ces individus socialement désignés comme des femmes ».

Simone de Beauvoir, dont l’esprit règne lors de la conférence gesticulée, dans Le deuxième sexe disait « On ne nait pas femme, on le devient ». Qu’en est-il pour le féminisme ? Comment et pourquoi devient-on féministe ? Simplement être femme signifie-t-il être féministe ?

Des questions que naturellement se posent toutes les femmes sensibles, ou non, à la cause des droits des femmes et de l’égalité des sexes. Mais faut-il avoir vécu les discriminations ou les violences pour se sentir concernée ? « Dès l’enfance, j’ai bien senti que quelque chose n’allait pas. On me disait souvent « Une petite fille ne fait ci, une petite fille ne fait pas ça ». Mais c’est là que j’ai développé mon premier super pouvoir : celui de ne jamais me sentir inférieure à un homme », explique Karine Birot, de sa position de femme blanche, hétéro, qui roule en Twingo (« oui j’ai du chemin à faire encore moi aussi ») et a également des préjugés sexistes, racistes et homophobes.

« Bref, je suis née dans le même monde que vous », lance-t-elle sur un ton grinçant. Dans ce spectacle, Karine Birot retrace son point de vue d’enfant et d’adolescente qui se posait comme tout un chacun des milliards de question et notamment en terme d’égalité femmes-hommes, voyant sa mère « affrontait la jungle du supermarché » et son père, « homme de gauche qui allait libérer tous les hommes de la terre mais qui n’impliquait pas sa femme dans ce sauvetage puisqu’il faut que quelqu’un s’occupe des enfants et de la bouffe » et comprenant qu’une princesse ne pouvait pas « avoir de mobylette, ne pouvait pas draguer, devait attendre de se faire draguer… »

Elle veut plus d’aventures, de bières et de rock’n roll, décide de devenir championne régionale de cul sec et ambitionne même de devenir un mec avant de s’apercevoir que ces derniers sont également limités dans leur comportement : « on peut pas chialer, on doit ouvrir les canettes de bière avec les dents et on ne peut pas porter de robe ! ». Elle se heurte alors à la sensation d’enfermement. Seulement deux cases pour définir notre nature : le genre masculin et le genre féminin.

« Les femmes ont alors un don pour les tâches ménagères, la dextérité avec le balai, le maniement de l’éponge, elles sont sexuellement désirables et n’ont pas le sens de l’orientation. Les hommes, eux, ils dirigent le monde. Le pompom de la pomponnette c’est qu’on définit ça par la nature. Les correspondances sont étranges : quéquette/foufoune, bleu/rose, on/off… »
constate la super-hérote.

Alors que les scientifiques auraient déjà allongé la liste de catégorisation du sexe humain à 48 possibilités, l’hétéropatriarcat milite lui pour conserver précieusement les deux définitions rigides de l’être humain.

« Les cases deviennent des normes et qui dit normes, dit exclusion », précise la Wonder Féministe, bien décidée à convoquer les esprits des Simone – de Beauvoir et Weil – mais aussi celui de Rebecca West, Rosie la riveteuse et ses copines issues des minorités ou encore Virginie Despentes afin de déconstruire ensemble ces idées reçues et reconstruire ensemble une société ouverte et accueillante, autrement dit égalitaire, et qui refuse ce système social qui génère des oppressions : « L’hétéropatriarcat est un vicelard, je le soupçonne d’avoir écrit le mode d’emploi des femmes… »

Métier : féministe professionnelle

« Je suis devenue animatrice socio-culturelle mais je me suis vite ennuyée. J’avais besoin d’espace pour développer mes supers pouvoirs parce que j’avais quand même un monde à sauver ! », scande-t-elle en se mordant les lèvres pour ne pas rigoler. Féministe professionnelle, elle le deviendra, c’est décidé.

Elle écume les associations féministes et découvre l’espace Simone de Beauvoir, qui abrite le Planning Familial, association féministe d’éducation populaire. C’est dans cette structure que les femmes – jeunes et moins jeunes – peuvent venir s’informer, se sensibiliser ou parler de sexualité et de tout ce qui tourne autour de ce thème central dans la vie des individus.

Elle est alors embauchée dans ce lieu guidé par le fameux slogan militant « Un enfant si je veux quand je veux » en tant que conseillère conjugale et familiale : « Pas très sexy dit comme ça. J’ai proposé ingénieuse du sexe mais ça n’a pas été accepté… » Au quotidien, elle reçoit, écoute et informe filles et femmes sans pouvoir jamais porter de jugement. « Ce n’est pas si facile que ça ! Une fois, une jeune femme de 16 ans vient me voir. Elle est enceinte et veut le garder. Moi je me dis « Très mauvaise idée » mais mon rôle est de l’informer, je lui donne donc toutes les cartes pour qu’elle fasse son choix, elle décide de poursuivre sa grossesse. La Wonder Féministe qui est en moi voudrait l’enfermer dans une pièce remplie d’enfants qui pleurent mais je suis conseillère… », se souvient Karine Birot, qui alimente la conférence gesticulée de quelques anecdotes croustillantes vécues au cours de sa jeune carrière.

Armée jusqu’à l’utérus

Et c’est à ce moment-là qu’elle brandit ses armes du quotidien : celles qui sont soigneusement rangées dans sa trousse à outils. « Nous avons au Planning Familial des planches anatomiques car le corps est un chantier et que le sexe c’est dégueulasse mais bon nous on le regarde », ricane-t-elle en accrochant les esquisses à la corde à linge qui traverse la scène.

Puis vient le moment où Wonder Féministe se transforme en véritable agent de prévention sexuelle à la Mary Poppins qui sort de son sac toute une série d’objets – beaucoup plus osés et insolites que ceux de la chère magic nanny. Tour à tour, elle épingle un préservatif masculin, puis féminin, un sex toy, une digue dentaire (pour rapports anaux et buccaux), un speculum, un anneau contraceptif ou encore une plaquette de pilule, un test de grossesse et un utérus ! Une fois tout son matériel installé, elle mime un entretien personnalisé avant de se lancer dans une tirade digne de « Moi, président » :

« Simone, elle vient parce qu’elle aime les femmes mais elle ne sait pas à qui en parler.
Simone, elle vient parce qu’elle a peur du jugement si elle avorte.
Simone, elle vient parce qu’elle a des douleurs pendant les rapports et qu’elle ne prend pas de plaisir.
Simone, elle vient parce qu’elle entend dire
« Attention Simone, ne te fais pas violer ».
Simone, elle vient parce que son père est violent et qu’elle ne comprend pas pourquoi.
Simone, elle vient parce qu’elle veut être maitresse de sa vie et avoir un enfant si elle veut.
Simone, c’est un peu moi. Simone, c’est un peu nous toutes 
».

Karine Birot, en dehors de son costume de Wonder Féministe, n’incarne pas de personnage. Elle délivre ici une conférence gesticulée – co-écrite avec Anna Reymondeaux, historienne sociologue et lesbienne féministe engagée – empreinte d’humour pour finalement exprimer le désarroi des femmes et la colère des féministes face aux discriminations et aux violences subies. Des discriminations et des violences longtemps acceptées sans dire mots.

« À l’heure où un viol est commis toutes les 7 minutes en France, le combat n’est pas gagné. Et les droits des femmes sont même remis en cause », explique-t-elle avec sérieux cette fois. Pourquoi est-on plus compréhensif envers les actes sexistes ? Pourquoi considère-t-on qu’il s’agit là d’un sujet secondaire ? Et pourquoi hiérarchise-t-on les injustices au lieu d’employer l’intersectionnalité ?

« Le féminisme dérange car ce n’est pas une question d’égalité mais d’oppression. Aujourd’hui, il est question de tout réinventer, de tout reconstruire. De vivre et d’agir sur la vie. On ne nait pas femme, on le devient comme on apprend à s’aimer et à se respecter, conclut-elle. Et n’oubliez pas, on peut être féministe et aussi aimer Dalida ». Et le boa rose est de mise pour se dandiner sur « Laissez-moi danser » !

 

Célian Ramis

Mythos 2014 : "Un festival ancré dans le printemps rennais"

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Lundi 21 avril, le festival touchait à sa fin et l’heure était au bilan dans le parc du Thabor. L’occasion pour Maël Le Goff et Emilie Audren de revenir sur cette 18ème édition.
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Lundi 21 avril, le festival touchait à sa fin et l’heure était au bilan dans le parc du Thabor. L’occasion pour Maël Le Goff et Emilie Audren de revenir sur cette 18ème édition qui s’achevait le soir même avec le concert de Thomas Dutronc.

Sans surprise, les deux têtes dirigeantes du festival des arts de la parole soulignent leur satisfaction face à cette édition « à la hauteur de 2013 et au dessus de nos attentes ». Mais cette année, pour Maël Le Goff, le festival « s’est ancré dans le printemps rennais, au même titre que les Transmusicales, Mettre en scène, Les tombées de la nuit, etc. à leur période ».

S’il évoque tout de même des bémols tels que le maigre succès du covoiturage mis en place « un peu tard » ou la sempiternelle difficulté à boucler le budget « même s’il est encore trop tôt pour dresser le bilan financier », la liste des points forts se fait beaucoup plus longue. Une programmation ouverte et éclectique, une météo clémente, une superbe ambiance dans le Thabor et au cours des nuits dans le Magic – ce qui n’avait pas été le cas l’an dernier – Mythos affiche un bilan positif avec 16 000 entrées au Cabaret botanique, sans compter les entrées aux after qui recensent entre 2000 et 2500 personnes par soir.

Au niveau de la programmation, l’équipe dirigeante tient à justifier leur choix « d’aller dans les extrêmes, faire le grand écart : De Airnadette à Corpus Frichti, il y en a pour tous les goûts ». Mais au délà d’une édition pensée pour un public large, Emilie Audren explique avoir voulu apporter de la gaieté : « On voit des propositions engagées toute l’année. Ici, les artistes ont transmis une parole tendue, politique, mais avec des formes gaies, légères. Des propositions optimistes sur des formes contemporaines ». Un argumentaire auquel Maël Le Goff ajoute : « Il fallait sortir de la noirceur d’un monde en déclin ». Une conclusion qui nous laisse sans voix en cette fin de festival des arts de la parole…

Célian Ramis

Mythos 2014 : Airnadette, une comédie musiculte savoureusement potache

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La Comédie Musiculte a encore frappé et l’humour potache a emporté la victoire !
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La Comédie Musiculte a encore frappé et l’humour potache a emporté la victoire ! Samedi dernier, le 19 avril, le mauvais esprit rock d’Airnadette s’est abattu sur le festival Mythos, déchainant ainsi la foule entassée dans le Cabaret botanique.

À 18h ce samedi, les festivaliers se pressent pour entrer dans le Magic Mirror, installé dans le parc du Thabor à l’occasion du festival des arts de la parole. Un art que les membres de Airnadette – en hommage à une ancienne première dame de France – sont loin de maitriser. Eux, leur truc, c’est le play back, le air guitar ou le air batterie. Ils ne chantent pas, ils ne parlent pas mais ils bougent les lèvres, brandissent leurs instruments imaginaires et déchainent les foules.

Le airband se forme en avril 2008 et réunit des spécialistes du genre, qui seront ensuite rapidement rejoints par le comédien Sylvain Quimène, connu pour son personnage créé pour Airnadette, à savoir Gunther Love  – qui n’honorera pas le public rennais de sa présence – double champion du monde de Air guitar. Airnadette va alors enchainer les dates et les tournées s’imposant comme un des groupes les plus déjantés « de mon dentier ».

Et c’est cette histoire-là que le sextet, accompagné de leur manager et présentateur Philippe Risotto, va nous raconter durant plus d’une heure. Des débuts du groupe miteux qui répète dans un garage à la vie de stars à la renommée internationale, le airband présente sa « presque vraie vie » et se caricature avec humour, absurdité et surtout une bonne dose de rock’n’roll dans la Comédie Musiculte – mise en scène par l’ancien Robin des Bois, Pef, et chorégraphié par Lydia Dejugnac – faisant ainsi résonner et vibrer tous les recoins du parc rennais.

De l’extérieur, on entend simplement de la musique. Des chansons qui jamais ne sont diffusées dans leur intégralité. Juste des refrains qui défilent et s’enchainent, sans liens et sans rapport. Comme si on déroulait les fréquences radio d’un transistor, allant de Nostalgie à Chérie FM en passant par Skyrock, Virgin et RTL.

Et de temps en temps, Rires et Chansons. À l’intérieur, c’est carrément un autre monde qui nous est proposé. On quitte la réalité, les spectacles intellos-bobos tant appréciés et la flânerie dans les allées du Thabor pour un grand n’importe quoi débordant d’énergie et complètement délirant.

Philippe Risotto, à l’allure d’un vieux pervers voyeur, assure le show, vêtu de son costume ringard à carreaux. Il est le manager des six hurluberlus qui s’agitent sur scène et qui mettent leur énergie au service d’un play back déluré et détonnant. Ils ont l’air tout droit sortis du jeu vidéo Guitar Hero et campent chacun un personnage caricatural et stéréotypé. La brosse à cheveux dans la main, portée au niveau de la bouche, ses chanteurs de salle de bain agitent les lèvres sur une panoplie de tubes qui ont tous à un moment cartonnés.

Que ce soit une chanson extraite de la comédie musicale Roméo et Juliette, le générique de Cat’s Eyes, un duo entre Diams et Vita, une reprise de Britney Spears ou encore des grands classiques du rock comme Queen ou Queen of the Stone Age, ils ne reculent devant rien. Bien au contraire. Tout le monde en prend pour son grade. Ils font dans le potache, dans la variétoche, singeant au maximum les interprètes originaux et créant ainsi des situations qui rendent les spectateurs hilares.

Ils maitrisent l’absurdité, ils subliment la caricature. Avec Airnadette, plus c’est gros – et gras – mieux c’est. Ils sont rock et emmerdent le monde. Et se moquent bien de Rennes, ville rock par excellence. Le public se fait insulter et en redemande. Et surtout n’hésite pas, entre deux ou trois « Ta gueule » ou encore « Enculés », à leur rendre la pareille.

Aussi, les festivaliers se plient avec plaisir à l’exercice proposé par Philippe Risotto : tourner le dos à la scène, lever les deux bras en l’air, agiter les dix doigts puis en plier 4 sur chaque main. Les uns et les autres s’observent, d’abord un peu gênés mais quand même fortement amusés, jusqu’à se marrer à la vision de tous les doigts d’honneur levés.

Un geste qu’ils ne manqueront pas de reproduire à plusieurs reprises pendant le show et que les parents auront certainement du mal à ne pas faire répéter à leurs enfants qui regardent le spectacle, les yeux ébahis devant cette foule en délire. Le mauvais esprit a envahi le Cabaret botanique, qui transpire l’humour potache, le pétage de plomb et le lâcher prise. Un vent de légèreté donc qu’il est bon de saisir au vol – un peu à la manière de Jérôme Rouger qui invitait le public, la veille, à délicieusement caqueter comme des poules, lors de ce son spectacle « Pourquoi les poules… » – et qu’il est appréciable de savourer.

Entre les séries de chansons, les pros du air lèvres jouent avec les répliques des films cultes comme Les bronzés, La cité de la peur, Dikkenek, Le Père-Noël est une ordure, Nos jours heureux ou encore The big Lebowski, Las Vegas parano et Star Wars. Pendant que des canettes géantes de bières en ballon rebondissent sur les mains agitées des spectateurs, les talentueux membres du airband se déchainent et se défoulent, finissant même par invoquer l’esprit de Michael Jackson qui vient expliquer, à travers le corps du présentateur, son adoration pour eux et leur donner l’autorisation d’interpréter la chorégraphie de « Thriller ».

Absurde, hilarante, décapante, la Comédie Musiculte convoque tous les éléments capables de provoquer facilement le rire – qui se propage à la vitesse de l’éclair dans tout le chapiteau – en use et en abuse, pour notre plus grand plaisir. Le rythme est soutenu, intense. Le délire part dans tous les sens, sans se préoccuper justement du sens. On débranche les cerveaux, on se marre et c’est tout – et c’est déjà bien !

Célian Ramis

Mythos 2014 : La désorganisation, ça ne s'improvise pas !

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La Paillette, Rennes
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Le spectacle de Clément Thirion, au nom imprononçable : [WELTANSCHAUUNG] (à vos souhaits), était jeudi 17 avril sur la scène de la Paillette pour le festival Mythos. La pièce est un ovni loufoque qui a connu un beau succès.
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Le spectacle de Clément Thirion, au nom imprononçable : [WELTANSCHAUUNG] (à vos souhaits), était jeudi 17 avril sur la scène de la Paillette pour le festival Mythos. La pièce est un ovni loufoque qui a connu un beau succès.

Des badges Mythos encore autour du cou, des régisseurs visibles, deux acteurs qui murmurent entre eux pour s’accorder sur ce qu’il faut dire au public : lors de l’introduction de la pièce on se croirait dans un spectacle mal préparé. C’est voulu et assumé. Dès l’entrée les thèmes sont variés: le biface en silex préhistorique côtoie la bombe atomique et l’extinction de l’espèce humaine. Après un court intermède musical et visuel, les comédiens reviennent sous l’annonce: « Deux bipèdes veulent et vont sauver l’humanité ».

Leur gestuelle imite à merveille celle de nos lointains ancêtres descendus des branches, le tout en moonboots… Le ton est donné la pièce sera loufoque, barrée… ou ne sera pas. Le duo formé par les deux comédiens, Clément Thirion et Gwen Berrou, détonne sur la scène de la Paillette. D’abord physiquement : Gwen est une grande branche fine avec des membres très longs et un chouchou fluo dans les cheveux. Clément, lui, est un petit homme chauve. Ensuite sur le plan artistique : l’association de la fraicheur de Clément à la générosité du jeu de la comédienne fonctionne à merveille. Les deux sont en accord parfait et sans fausse note.

La pièce part dans tous les sens, à tel point qu’il est difficile d’y trouver un thème précis. En deux répliques, les acteurs passent de la préhistoire aux artistes des années 1970, ou de la danse de la fin du monde à une proposition de biscuits au public. Mais s’il y a bien un sujet qui semble être pris au sérieux et sous toutes ses coutures : l’homme et l’humanité.

Enfin au sérieux du second degré bien sûr. À travers des histoires sans queue ni tête, les artistes dessinent une image de l’homme à la fois hilarante, touchante et naïvement désespérée. La question de la création de l’homme rejoint parfois celle de la création artistique.

Des phrases sonnent particulièrement justes, même lorsqu’elles sont prononcées au milieu de cris d’hommes préhistoriques : « La création artistique commence avec la conscience de la mort, le fait de vouloir laisser une trace, tout ça, tout ça. Regarde comme il est beau mon biface ! Pour certains, symboliquement, c’est ça la sortie du jardin d’Eden », analyse Clément Thirion.

Le rythme de la pièce ne fatigue pas. On passe d’une scène à l’autre, avec des transitions pendant lesquelles les comédiens endossent le rôle d’acteurs perdus qui improvisent au fur et à mesure. Cette mise en abyme du rôle d’acteur est parfaitement interprétée et fait beaucoup rire la salle. Gwen Berrou se présente ainsi au début de la pièce : « Non, mais en fait moi, je remplace la personne qui devait jouer, elle s’est cassée une jambe. »

Quant aux scènes, elles sont absurdes et sont liées les unes aux autres par des fils très tenus. Après l’imitation vivante d’un tableau expressionniste représentant Adam et Ève campée par les deux protagonistes, la comédienne nous explique s’être intéressée au serpent au centre du tableau. Elle déroule ensuite les différents modes de déplacements des reptiles à l’aide d’un ruban. Pendant ce temps l’acteur discute tranquillement avec les deux régisseurs installés sur le côté gauche de la scène. Tout est fait pour donner au public l’illusion de l’improvisation. Cependant rien n’est laissé au hasard et surtout pas les instants de communication avec le public. « Vous voulez un biscuit ? », demande à la salle Clément Thirion. Des réponses positives fusent depuis les sièges du théâtre.

Il regarde alors sa partenaire de scène et lui lance : « Il nous reste des biscuits ? Je crois qu’il y en a qui en veulent. » Hésitation de la comédienne, qui va voir et revient avec une assiette remplie de confiseries et la fait circuler dans le public. Un jeu de miroir particulièrement réussi est également mis en place lors d’une chorégraphie sur une musique de Klaus Nomi. Les comédiens sur scène sont répétés en miniatures sur l’écran du fond. Et si l’ensemble est parfaitement régulier au départ, peu à peu chaque miniature reprend sa liberté et se désolidarise de l’ensemble. Une allégorie de la schizophrénie ? De la liberté ? L’effet visuel est parfaitement réussi.

Absurdité, réflexion sur la condition humaine, le théâtre de Clément Thirion rappelle celui de Beckett. Cependant sa manière de traiter le sujet est singulièrement plus vivante. Il ajoute également une dimension fondamentale ; celle de l’absence de frontières : les techniciens sont intégrés à la pièce par la présence des régisseurs dans un coin de la scène. Le public participe aussi au spectacle : ses réactions sont y aussi intégrées.

Et lorsqu’à la fin, Clément Thirion invite les spectateurs à s’imaginer que « 500 spectateurs descendent sur scène pour reprendre la chorégraphie du début », une vingtaine de personnes investissent réellement la scène et le suive dans ses mouvements loufoques. Une belle scène de clôture qui abolit la séparation traditionnelle entre le public et les comédiens, à l’image de l’ensemble du spectacle.

Célian Ramis

Mythos 2014 : Une part de canard en chacun de nous

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Théâtre de la Parcheminerie, Rennes
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Mercredi 16 avril, Enora Boëlle dévoilait les premières esquisses de son projet Moi, Canard lors du festival Mythos. La lecture s’est déroulée en toute intimité, dans le hall du théâtre de la Parcheminerie.
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Mercredi 16 avril, Enora Boëlle dévoilait les premières esquisses de son projet Moi, Canard lors du festival Mythos. La lecture s’est déroulée en toute intimité, dans le hall du théâtre de la Parcheminerie.

Quelques minutes avant le début de la lecture, la metteure en scène, Enora Boëlle, est tendue, stressée. Pour cette représentation unique au cours du festival, ils ont eu 5 jours de répétition, dans une école maternelle. L’objectif étant de présenter, sous la forme d’une lecture théâtrale, la première partie de l’histoire Moi, Canard, librement inspirée du conte de Hans Christian Andersen, Le vilain petit canard.

Tout a commencé avec la naissance des enfants d’Enora Boëlle, co-directrice artistique du Théâtre de Poche de Hédé. La comédienne et metteure en scène au sein du Joli collectif cherche alors des livres dont les textes parlent de la différence. « Je n’en trouvais pas. Et puis, je suis tombée sur Pomelo de Ramona Badescu. J’ai tout de suite beaucoup aimé son travail. Pour moi, Ramona utilise tous les ingrédients nécessaires, la langue française, la poésie de la langue, l’humour, le côté grinçant… », explique-t-elle, au détour d’un café dans la rue Saint-Melaine, un matin de Mythos.

Un jour, entre deux trains, elles se rencontrent à Marseille, là où vit l’écrivaine. « On a discuté, on était vraiment sur la même longueur d’ondes et on s’est aperçues que nous partagions le même enthousiasme pour le conte d’Andersen, qui est notre favori », précise Enora. Elle lui explique alors son projet d’adaptation au théâtre, dans un spectacle destiné au jeune public, ce que Ramona accepte sur le champ. Il y a un mois environ, elle lui a livré la première partie du texte, celle que l’on a pu découvrir au premier étage de la Parcheminerie en ce mercredi.

Pour la metteure en scène, c’est un moment important. Une première lecture a déjà eu lieu 15 jours avant, devant l’auteur du texte, elle a alors découvert les interprètes et validé les choix d’Enora, « même si on a refait un travail dramaturgique ensemble ». Ici, quelques dizaines de Rennaises et de Rennais sont réunis pour entendre cette nouvelle version d’un conte que l’on a tous encore en mémoire.

Trouver sa place dans le monde

« Une histoire qui parle de la manière de transmettre le fait de grandir », analyse la co-directrice artistique du Théâtre de Poche. Plusieurs interrogations l’ont poussé à s’orienter vers ce texte : « Qu’est-ce qui fait que l’on existe ? Qu’on a sa place ? Qu’on est un individu unique ? Le Vilain petit canard pose la question : Comment chaque individu trouve sa place dans le monde ? »

Dans Moi, Canard, c’est la comédienne Abigail Green qui incarne celui qui est foutu dehors, malgré lui, malgré son envie de ressembler à sa famille ; il ne parlera malheureusement pas le « coin-coin » de sa mère. Enora affirme sa volonté de féminiser le conte sans toutefois en faire un parti pris militant, cela n’étant pas l’objectif de la pièce. « C’est une femme qui joue le canard mais en réalité il n’est pas sexué ce canard. On note un gros point de vue du côté de la mère. Et au début quand le canard est dans l’œuf, il y a un côté très maternel, qui moi me touche beaucoup, c’est très féminin », confie la metteure en scène.

Et il y a en effet quelque chose de très doux, de très chaud dans la voix et dans l’interprétation d’Abigail Green, vêtue d’un long ciré blanc, capuche vissée sur la tête. Une chaleur rassurante et protectrice qui nous enveloppe au début de la lecture seulement. Car rapidement, le texte se durcit, se noircit et l’histoire du petit canard nous emporte au plus près du thème développé par l’auteur original.

Celui des difficultés qu’il faut surmonter pour enfin trouver sa place. « Ce n’est pas qu’une histoire d’enfant, même si chaque année, on entend toujours des choses affreuses dans les cours d’école… Dans la vie, on grandit, on murit, on traverse des expériences difficiles, on rencontre des personnes, bonnes ou mauvaises pour nous… », observe Enora Boëlle, qui souhaite à chacun de trouver sa place dans le monde.

Trouver sa part de canard

Elle insiste néanmoins sur sa détermination à ne pas victimiser le protagoniste du conte car « on est tous un peu canard, à des degrés différents ». Pendant près de 30 minutes, les spectateurs sont suspendus aux lèvres de la comédienne, attentifs aux mots prononcés, au sens donné, tout en ne manquant pas de jeter un œil sur le rôle de Gregaldur, « issu de la scène impro-underground-punk » qui se tient assis sur la scène à deux pas d’Abigail.

Le musicien – qui a été aiguillé et dirigé par Robin Lescouët, co-directeur artistique du Théâtre de Poche de Hédé, également collaborateur artistique dans le projet Moi, Canard – intrigue, entouré de ses instruments créés à partir de jouets. Il accompagne discrètement les paroles du canard, ajoute des bruitages et composent des mélodies qui soulignent l’état d’esprit du personnage. On l’imagine comme un scientifique déluré, installé dans son cabinet de curiosité, qui expérimente et puise dans tous les objets susceptibles de créer des sonorités relatives à la situation énoncée par Abigail.

Et à ce rôle, il rajoute celui de complice et lance de temps en temps un regard de soutien à celle qui figure à ses côtés, légèrement tremblante. Cet été, Ramona Badescu devrait poursuivre l’adaptation du conte d’Andersen, de manière à ce que l’équipe de Moi, Canard puisse commencer à créer le spectacle en plateau. Un travail qui devrait commencer en octobre prochain et qui devrait aboutir à un spectacle finalisé en mars 2015.

Et si l’année à venir semble déjà bien remplie, Enora Boëlle a déjà en tête une nouvelle idée de collaboration avec Ramona Badescu, sur le thème du deuil, de la frontière ténue entre la vie et la mort. « C’est un projet ambitieux, ce n’est pas une adaptation cette fois. L’idée, c’est : quand il y a la mort, la vie n’est pas loin et inversement », dévoile la metteure en scène qui semble prendre goût au spectacle jeune public. Moi, Canard étant son premier projet de mise en scène pour les petits (mais aussi pour les anciens enfants).

Célian Ramis

Mythos 2014 : Les femmes fontaines vue par Rufus

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Carré Sévigné
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Recueils de poèmes, d’écrits et de lettres, supports de témoignages de femmes, d’hommes aussi, sur le thème encore tabou et méconnu, en tout cas, en occident, des femmes fontaines.
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Le festival Mythos accueille cette année Rufus, artiste vivant et célèbre personnage du paysage cinématographique français. « Rufunambule et les jaillissantes », spectacle qu’il présente pour la première fois au carré Sévigné où il est également artiste associé, fait l’ouvrage de recueils de poèmes, d’écrits et de lettres, supports de témoignages de femmes, d’hommes aussi, sur le thème encore tabou et méconnu, en tout cas, en occident, des femmes fontaines.

« Comment les gens vont-ils comprendre ce spectacle ? » fût la principale interrogation de l’artiste avant de monter sur scène. L’artiste raconte avoir puisé son inspiration au travers de l’œuvre écrite par le sociologue Jacques Salomé, L’effet source, paru en France il y a deux ans, retranscrivant quelques 300 témoignages de femmes qui osent parler librement de sexualité, et plus précisément des femmes fontaines.

Terme imagé utilisé pour parler des femmes dont le plaisir sexuel se manifeste par l’émission abondante d’un liquide au moment de l’orgasme. Sujet qui, à l’heure actuelle, n’est que trop peu abordé et trop peu nommé, comme le déplore Rufus. La médecine n’en parle pas, la religion non plus. « Nous n’avons qu’un seul mot pour parler de cela, il est donc difficile de trouver une connivence, difficile d’y apporter de l’humour. L’évocation poétique me semblait la meilleure voie à prendre pour parer à cet obscurantisme médical », explique-t-il.

En effet, en France le terme « femme fontaine » est complétement absent des manuels, précis ou lexiques médicaux. Au Rwanda, par exemple, il existe près de 300 mots pour parler de cette forme de sexualité féminine. Et comme si cela ne suffisait pas à nous complexer, ce pays abrite aussi des écoles qui enseignent la jouissance aux jeunes filles, qui seront par la suite très prisées par la gente masculine.

« C’est un sujet que même la pornographie occidentale chrétienne trouve inconvenante » 

Animé par la curiosité, il a interrogé bon nombre de femmes pendant deux ans afin de laisser la parole à celles qui étaient les mieux placées pour en parler. Exercice qui s’est avéré plus difficile qu’il n’y parait, l’amenant à se repositionner comme propre sujet de son œuvre : « C’est un objet que même la pornographie occidentale chrétienne trouve inconvenante ! » En choisissant de lire sur scène certains témoignages très personnels qui ont nourri l’ouvrage psychosociologique de Jacques Salomé, Rufus s’offre le rôle de confident, plongeant le spectateur dans l’intimité de ces femmes qui osent parler.

Ainsi, le spectateur découvre ce que ressentent ces femmes fontaines, la jouissance à laquelle elles goûtent, cette part d’elles-mêmes qui les guide vers un état mi sensuel mi spirituel. L’une écrira cette phrase « C’était un mystère que les mots risquaient d’anéantir ». Une autre évoque son premier orgasme lors de… son accouchement ! Les écrits sont touchants : « C’était un mystère que les mots risquaient d’anéantir ». Ils sont également pleins de tendresse et de naïveté, parfois maladroits, traduisant de la joie et de la gratitude.

Malgré tout, ces femmes qui témoignent ne s’expliquent pas ce phénomène, toutes évoquant cette expérience comme un incroyable jaillissement libérateur. « Toutes les femmes sont fontaine, il y a celles qui le savent et toutes celles qui ne le savent pas encore », affirme Jacques Salomé.

« Il semblerait que dans son entier la femme soit taboue »

L’artiste précise ne pas faire de prosélytisme, le but n’étant pas de convaincre. « Je suis caché derrière des témoignages. » Il avoue également avoir pris le temps à la réflexion quant à cette fameuse citation de Sigmund Freud : « Il semblerait que dans son entier la femme soit taboue ». Affirmation hallucinante qui amène la sexualité sur le devant de la scène selon Rufus, évoquant un scandale auquel un artiste ne peut se dérober. « C’est comme s’il y avait une obligation de réparation sur l’évocation des femmes fontaines. Personne n’en parle et pourtant cela fait partie de la sexualité» répond Rufus, expliquant les motivations qui l’ont amené à choisir ce thème.

Dans un hasard tout à fait stupéfiant selon l’intéressé, le spectacle suit son cours avec une seconde partie où le comédien lit le texte L’innommable de Samuel Beckett. Il y est question d’une naissance, mise en scène grâce à un sac et une corde rouge, symbolisant le placenta et le cordon ombilical. Et si certains l’auront bien compris, il n’est néanmoins pas évident pour tout le public de saisir cette métaphore. « Il est question de Dieu, avance une spectatrice, Dieu qui pète un câble ! » « Ne serait-ce pas tout simplement l’absurdité de ce que nous sommes ? » tente une autre.

Il ne fait nul doute que la vie et la mort sont de vastes sujets auxquels il souhaite confronter son public. Si le thème évoqué par Rufus pouvait nous laisser redouter une certaine libido mal placée, il n’en est rien. Le sujet est abordé en douceur, avec une pointe d’humour et d’esprit. À la fin du spectacle, il dédie les applaudissements à toutes ces femmes dont il s’est inspiré.

Célian Ramis

Mythos 2014 : Lettre à la solitude

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Café des bricoles, Rennes
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Le duo du collectif Les becs verseurs a proposé une lecture théâtrale de leur nouvelle création La lettre.
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Le Café des Bricoles accueillait hier après-midi, mercredi 16 avril, Myriam Gautier et Hélène Mallet, deux conteuses de la compagnie Les Becs Verseurs. Le duo a proposé une lecture théâtrale de leur nouvelle création La lettre.

On connaît la compagnie des Becs Verseurs pour leurs indétrônables visites décalées au sein d’expositions – on se rappelle notamment de leur prestation aux Champs Libres lors de l’exposition Rennes en chanson, présentée de novembre 2010 à mars 2011 – ou de divers événements rennais. Ici, les deux conteuses se mettent à nue dans une création qui leur est propre.

Entourées d’Alain Le Goff et de Rozenn Fournier – l’un pour l’accompagnement dans l’écriture, l’autre pour un regard extérieur – Myriam Gautier et Hélène Mallet font appel à la famille Mythos et calibrent leur spectacle pour nous faire passer un moment singulier et poignant. Ce jour-là, au Café des Bricoles, l’ambiance est intimiste et conviviale. Des bancs installés des deux cotés de l’estrade, les rideaux tirés, le silence.

Les deux comédiennes se tiennent debout, chacune face à son pupitre, et enfilent leur blouson de cuir. L’une en noir, l’autre en couleur camel. La simplicité de la mise en scène apporte un côté expérimental à un spectacle en cours de création – fin mars, elles étaient en résidence à l’Aire Libre pour la création lumières, lire notre article dans le numéro 24 – et marque leur volonté d’un décor épuré et sobre, permettant ainsi aux spectateurs de se concentrer sur les dialogues.

Car tout l’intérêt de cette pièce réside dans les échanges entre les deux femmes, qui se rencontrent sur un banc. L’une lit un conte de fée, « une histoire de brinces, brincesses et de brenouilles », explique-t-elle dans son langage farfelu. L’autre lit le journal, « un conte de faits divers ». A priori tout semble les opposer. Entre froideur et cynisme, innocence et naïveté, les deux femmes vont finir par tisser des liens et nouer une relation solide. Leur conversation pourrait être l’une de celles que l’on lit dans les bouquins de Jarry ou Ionesco.

Parfois absurde, parfois cinglante mais surtout banale. Les animaux domestiques, les ruses pour tromper l’ennui et tout à coup une mystérieuse lettre de menace de mort, en provenance de Nouvelle-Calédonie. Un courrier dont chaque lettre a été découpée dans les pages des journaux. Une intrigue qui se noie dans les palabres de deux personnages qui échangent ensemble, qui content et racontent leur solitude.

Puisque finalement, tout est une histoire de solitude dans ce spectacle. Comment vont-elles dévoiler ce qui les anime au plus profond d’elles-mêmes ? Oseront-elles se défaire des chaines imposées par leur isolement ? Jusqu’où iront-elles, ensemble, dans leur lutte routinière ?

Myriam Gautier et Hélène Mallet nous embarquent dans cette aventure ordinaire qui prend des proportions d’histoire extra-ordinaires. Elles explorent avec humour les méandres d’une vie sans saveurs et pimentent leur récit à travers l’imaginaire et l’absurdité qu’on leur connaît et reconnaît. La situation décrite et jouée résonne en chacun de ceux qui ont connu cette solitude commune. Le duo joue sur le rythme, les silences, le regard et les intonations pour renvoyer une intensité succulente et appréciable à ce thème sombre et profond. Un énorme coup de cœur en cette deuxième journée de Mythos.

Célian Ramis

Mythos 2014 : Un rendez-vous réussi

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L'Aire libre, St jacques de la Lande
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Une pièce de théâtre épurée sur le thème de la dépression qui a ému mais aussi fait rire les spectateurs.
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Le mercredi 16 avril, Guillaume Vincent présentait son spectacle Rendez-vous gare de l’Est à l’Aire libre, dans le cadre du festival Mythos. Une pièce de théâtre épurée sur le thème de la dépression qui a ému mais aussi fait rire les spectateurs.

Le spectacle se déroulait dans la salle du bas de l’Aire libre. Face aux spectateurs qui entraient et s’installaient peu à peu, une femme, seule, assise sur une chaise les jambes croisées, semble attendre un rendez-vous. Aucun décor n’a été mis en place. Elle laisse son regard se promener sur le public et la salle. Peu à peu, les murmures qui émanaient des gradins se turent. Lorsque le silence s’installe complètement, la comédienne commence la pièce.

D’une voix forte elle débute son monologue qui durera une heure. Une mise en scène qui permet à chacun d’entrer doucement dans cette ambiance intimiste.

Le thème choisi par Guillaume Vincent n’est pas réjouissant : à partir des confidences d’une femme dépressive, il a tissé le fil rouge de sa pièce. Emilie Incerti Formentini est seule sur scène durant la quasi totalité du spectacle. À peine épaulée par un autre comédien qui lui donnera la réplique depuis le public durant une minute et par les hauts-parleurs qui diffusent parfois une musique ou une voix de messagerie téléphonique. Sa performance n’en est que plus impressionnante.

Pendant toute la durée de la pièce, elle parvient à faire ressentir au public les affres de la dépression mais aussi ses moments de joie : « Il y a des moments qui sont drôles, enfin, moi je les trouve drôles… » Le texte est construit pour simuler un dialogue dont les spectateurs ne peuvent percevoir que les réponses de cette femme. Dialogue avec un inconnu ? Avec un proche ? Le doute plane mais la femme se confie. Et son témoignage est émouvant : « Toute notre vie on apprend à nous connaître. On vit avec un étranger à l’intérieur », affirme-t-elle à un moment.

Toute la solitude du personnage résonne dans ces quelques mots. Car la réalité qu’elle décrit à travers ses pensées, c’est celle d’une femme trentenaire, dépressive, sous médicaments, dont elle déroule la longue liste, et qui alterne les séjours dans les hôpitaux psychiatriques. « On dit de quelqu’un qu’il est fou, mais en fait il y a plein de sortes de folies… », dit-elle.

Un discours universel

Malgré une thématique très sombre, la pièce amuse. Les rires fusent dans la salle de Saint Jacques. Le personnage à la dérive qui nous est présenté sait rire et faire rire. Comme par exemple cette anecdote lors de son séjour dans un hôpital psychiatrique où elle a cru que l’interrupteur de sa chambre était le détonateur d’une bombe atomique qui allait détruire l’humanité entière. Sa solution : démonter l’interrupteur, avec son ongle - « J’ai toujours eu les ongles très durs » – et demander un coupe-ongle à l’infirmière.

« Lorsqu’au bout de quelques minutes l’infirmière s’est interrogée sur ce que je voulais faire avec un coupe ongle (ils étaient un peu long à la détente dans cet hôpital) elle m’a trouvé à quatre pattes en train de me demander quel fil j’allais couper : fil rouge ? Fil blanc ? Fil bleu ? » Le public s’esclaffe.

À  en croire les trois rappels des spectateurs, la pièce a beaucoup plu. Pour cause, elle résonne, pour certains, comme un écho à leurs propres expériences, comprend-on à la sortie. Tout un chacun ayant connu une personne dépressive aura pu reconnaître certaines facettes de ce mal qui ronge ceux qui en sont atteints. C’est la magie de Rendez-vous gare de l’Est : avoir su, à partir d’un récit singulier, construire un discours universel sur la dépression.

Célian Ramis

Focus Cirque Nordique : Frappées du cuir chevelu...

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Théâtre du Vieux Saint-Etienne, Rennes
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Sanja Kosonen et Elice Abonce Muhonen présentaient leur création « Capilotractées », dans le cadre du Focus Cirque Nordique, organisé par l’association de production Ay-Roop.
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Jeudi 10 avril, au théâtre du Vieux Saint-Etienne, Sanja Kosonen et Elice Abonce Muhonen présentaient leur création « Capilotractées », dans le cadre du Focus Cirque Nordique, organisé par l’association de production Ay-Roop. Un spectacle « capillairement » dingue.

L’une est brune, l’autre rousse. L’une est fildefériste, l’autre trapéziste. Elice Abonce Muhonen et Sanja Kosonen sont toutes les deux circassiennes et finlandaises. Et ont les cheveux longs. Un détail important puisque tout le spectacle repose cette information. Marquée par un spectacle vu dans son enfance, Sanja décide, avec la complicité d’Elice, de remettre la technique de la suspension par les cheveux – technique de cirque ancestrale – au goût du jour.

Ainsi, pendant deux ans, elles vont travailler et s’entrainer pour créer un numéro insolite et original de cirque capillaire. « Nous avons une coiffure spéciale pour y parvenir et il faut évidemment y aller tout doucement. Le fait de mouiller nos cheveux régulièrement pendant le spectacle les rend plus élastiques », confie Elice Abonce Muhonen à la suite de la représentation. Une représentation qui a réuni les Rennais et les Rennaises dans la salle du Vieux Saint-Etienne.

Ce soir-là, les spectateurs piqués par la curiosité s’empressent de s’installer sous les couvertures et attendent sagement, les yeux écarquillés, que les artistes dévoilent leur création.

Sur scène, deux chaises. Et une structure installée au-dessus, qui permettra aux deux circassiennes de s’élever et de s’envoler. Elles ont soigneusement tressés leurs cheveux, attachés en chignon sur le haut du crâne, dans lequel vient s’accrocher un anneau en fer. Une coiffure dévoilée après une chanson imaginée spécialement pour le spectacle, accompagnée à la guitare et au ukulélé. « Capilotractées… Capilotractées… Tirées par les cheveux… », chantent en chœur les deux complices du Galapiat Cirque.

Un petit air humoristique, simple et efficace qui annonce le thème de la soirée. Et c’est en effet un spectacle tiré par les cheveux qu’elles vont nous présenter. Théâtre, musique, danse, voltige… divers numéros se succèdent, entrecoupés d’intermèdes absurdes et burlesques alternant ainsi performances capillaires et divertissement clownesque.

Sous les cheveux, la liberté…

« Nous avons tout créé nous-mêmes. Deux personnes nous ont aidé à nous mettre en valeur dans la mise en scène. C’est très important pour notre carrière d’artistes et de circassiennes de pouvoir produire un spectacle comme celui-ci, sans agrès principal », précise Elice. Tout en conservant leurs agrès de prédilection – fil et trapèze – elles s’emparent de la suspension par les cheveux comme d’un outil de travail ordinaire, libérant ainsi jambes et bras qui peuvent alors exécuter et effectuer des mouvements entiers, longs et gracieux.

En attachant les mousquetaires au bout des cordes – reliées à la structure métallique par des systèmes de poulies – à leurs anneaux de fer, Sanja et Elice peuvent alors se suspendre dans les airs et imaginer les formes qu’elles veulent. Un vent de liberté se faufile entre les pierres froides du théâtre et fait bouger les deux corps à la fois souples et rigides qui s’amusent avec la technique mais aussi avec tout ce qui leur passent sous la main.

Une planche de bois sur laquelle l’une s’installe avec des poids pendant que l’autre décolle petit à petit du sol, jusqu’à se mettre en position du lotus, dans les airs, comme si elle lévitait. D’autres outils comme les chaises leur servent également de point de départ qu’elles transforment rapidement en terrain de jeu.

Tout devient alors matière à jouer. Sanja Kosonen et Elice Abonce Muhonen se suspendent par les cheveux, virevoltent dans les airs, se déshabillent et se rhabillent pendant leurs envolées, délassent leurs tresses, détachent leurs longues chevelures et les font tournoyer sur des chansons françaises comportant le mot cheveux dans les paroles – avec notamment Sylvie Vartan, Dalida ou encore Jacques Dutronc – embarquant avec elles pendant plus d’une heure les spectateurs amusés et fascinés par les performances peu communes.

Sous leur tignasse, le duo crée des nœuds entre cirque traditionnel, parodies et modernité. Le tout entremêlé d’une bonne dose d’absurde, qui pourrait peut-être être amenée avec plus de subtilité et de finesse mais qui séduit sans difficulté.

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