Célian Ramis

Mythos 2015 : Adeline Rosenstein, passionnée et militante

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Thabor, Rennes
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Les 8 et 9 avril, le théâtre de la Parcheminerie accueillait le spectacle-documentaire Décris-ravage d’Adeline Rosenstein. Une artiste qui propose une lecture percutante de l’Histoire de la question de la Palestine.
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Les 8 et 9 avril, le théâtre de la Parcheminerie accueillait, dans le cadre du festival Mythos, le spectacle-documentaire Décris-ravage d’Adeline Rosenstein. Une artiste qui propose ici une lecture originale de l’Histoire de la question de la Palestine.

Avec Décris-ravage, la comédienne Adeline Rosenstein n’aura pas fait l’unanimité. Mais aura suscité la curiosité des festivaliers et réussi le tour de force de soulever de nombreuses questions, à commencer par celle de l’Histoire au théâtre. Comment aborder des faits historiques sur scène, par le biais de l’art ? Sa proposition est originale, conceptuelle parfois, et surprenante, voire déroutante pour qui ne s’y attend pas. Elle parle de spectacle-documentaire, « pas sur le conflit (israélo-palestinien, ndlr) lui-même mais sur la question de la Palestine. », explique-t-elle jeudi midi au micro de Canal b.

Depuis 2009, elle a réuni des témoignages d’occidentaux ayant vécu en Palestine ou en Israël à différentes périodes, autour desquels elle ajoute des extraits de pièces de théâtre historiques en arabe (les extraits ont été traduits en français), traitant des mêmes événements. Privilégier la parole des artistes originaires des pays arabes concernés plutôt que d’orienter le discours et l’Histoire vers la pensée occidentale, c’est le parti-pris de la suissesse Adeline Rosenstein.

L’artiste va alors bricoler une pièce en fonction des éléments récoltés depuis plusieurs années, en 4 épisodes, intelligemment abordés en conférence théâtrale et partiellement illustrés par 4 comédiens (3 femmes et 1 homme) présents sur scène tout au long de la représentation.

Mimes, mises en situation, représentation fictive de la carte géographique de l’Empire Ottoman, mouchoirs trempés dans l’eau violemment projetés contre des planches en bois disposées au fond de la scène… Adeline Rosenstein se lance le périlleux défi de ne rien donner à montrer visuellement, ni photos, ni vidéos, ni cartes physiques, ni documents d’archives. Ce qui lui vaudra peut-être de perdre certains spectateurs, ennuyés de cette conceptualisation étonnante qui appelle à entrer directement dans le propos, et uniquement dans le propos.

Tout repose sur les textes, sur les interprétations des comédiens, sur les intonations, tantôt magistrales et objectives, tantôt cyniques et piquantes. La violence est omniprésente, de la conquête de l’Égypte par Bonaparte à la militarisation des Palestiniens, en passant par la guerre de Crimée et le génocide arménien. Mais de par ses choix artistiques et scéniques, la comédienne ne fige ni la pensée, ni l’interprétation des spectateurs, qui découvrent ou redécouvrent, la source internationale de la question de la Palestine, un tout petit territoire « à partager en 2 peuples mais finalement il y avait un peuple qui n’était plus là. Et ça, on l’a refoulé de nos consciences » - extrait d’un entretien d’un colon arrivant en Terre Sainte.

DES QUESTIONS PLEIN LA TÊTE

Décris-ravage décortique le nœud du conflit « gros de plus de cent ans », le déroule du début XIXe au début XXe, avec un regard militant sur l’Histoire et les histoires vécues dans cette partie du monde, sans toutefois enfermer le public dans un discours moralisateur, et sans porter de jugements maladroits sur les diverses communautés ou religions présentes sur ces territoires. On ressent l’ébullition intellectuelle à laquelle se confronte l’artiste qui attache de l’importance à explorer de nombreux chemins pour en découvrir sans cesse davantage et qui n’hésite pas à remplacer les points d’exclamation par des points d’interrogation, pour emprunter encore d’autres routes non explorées par les Occidentaux (ou qui n’en ont pas encore révéler les crevasses).

Adeline Rosenstein, révoltée depuis longtemps, par la nature de ce conflit, se présente passionnée face au public de la Parcheminerie et presque apaisée, comme délivrée du poids de l’information qu’elle partage, les yeux brillants, pendant les 2 heures de représentation. Entourée de ses comédiens, elle pose la question de l’interprétation individuelle, la responsabilité de chacun à ne pas poser de questions, à agir sans savoir, du poids des Nations ironiquement bienveillantes et désireuses de « fédérer les peuples » en les écrasant, les colonisant, les expulsant, les armant…

Des thèmes violents, dérangeants parfois même, mais qui ont le mérite d’être mis à plat dans ce théâtre de l’Histoire que toute l’équipe porte avec ferveur. S’il est difficile à certains moments de focaliser son attention sur chaque propos ou chaque point développé, Adeline Rosenstein réussit à nous maintenir sur le fil des histoires qu’elle dévoile et à susciter l’intérêt et la curiosité pour le sujet comme pour la forme proposée, qui n'était que le premier volet d'une histoire encore en mouvement.

"Les Anglais prennent la Palestine. Les Français reçoivent un pourcentage sur le pétrole en Irak. STOP, la suite au prochain épisode."
conclut Adeline Rosenstein, dans ce premier Décris-ravage.

Célian Ramis

Mythos 2015 : Dans l'intimité, la liberté et la féminité d'Arhur H

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Thabor, Rennes
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Imaginaire débordant, poésie déjantée, énergie communicative et liberté accrue... Arthur H était au Cabaret botanique, à l'occasion de Mythos, le 8 avril. Une exception à notre ligne éditoriale s'imposait.
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Mythos, 19e édition. Mercredi 8 avril, Arthur H, profil idéal, était l’invité du festival des arts de la parole. Pour l’occasion, le fils Higelin à l’identité bien marquée se produisait dans le Cabaret botanique, pour présenter son dernier album, Soleil dedans (2014), mais pas que.

Plus qu’emportée par les textes, la musique et son imaginaire, la rédaction de YEGG fait une exception à sa ligne éditoriale et se saisit du passage de cet artiste masculin – qui assume pleinement sa féminité (lire l’interview ci-dessous) – en terre bretonne pour profiter de son concert et le rencontrer, dans les jardins du Thabor.

Dans l’imaginaire collectif, Arthur H, c’est une voix grave, chaude, du mystère, du détachement, un univers poétique, du romantisme, de la mélancolie… Il n’est pas seulement fils de, on le sait depuis longtemps, il est lui, chanteur-musicien-poète-déjanté à l’univers extra-terrestre, intimiste et sauvage. Une identité de plus en plus assumée. Et qui ne cesse de se montrer et de s’affirmer, dans sa globalité et au travers de toutes ses facettes, du voyageur solitaire au chercheur d’or…

Avec son charisme, sa sensualité, sa manière de bouger son corps, de s’habiller – il se présente ce soir-là sans chapeau et avec une veste pour le moins lumineuse – sa voix maitrisée, son habileté à nous faire voyager, sa capacité à se renouveler dans sa musique tout en gardant son extravagance, sa poésie et sa sensibilité propre… le chanteur, qui entame le concert au piano dans l’intimité des lumières brumeuses, conserve sa hargne scénique et nous transporte avec lui dans un tunnel intergalactique et spatio-temporel.

UN ARTHUR H COSMIQUE

Dire de lui qu’il est un ovni serait un abus de facilité. Arthur H est là où on ne l’attend pas tout en restant fidèle et loyal à son public. Ce soir-là, il oscille entre chansons lunaires, solaires et cosmiques de son nouvel album, Soleil dedans, qu’il chante avec une voix parfois aérienne, libérée et libératrice – on pense notamment à « Femme qui pleure » - qui met les poils à toute la salle – et chansons plus anciennes (entre Adieu tristesse, 2005, et Baba Love, 2011 principalement) sans trop puiser dans ses premiers disques.

C’est un voyage dans l’univers d’Arthur H, autant dans son imaginaire que dans sa carrière, dans lequel il nous plonge pendant 2h avec simplicité et générosité. Taquinerie parfois même lorsqu’il titille le côté « chauviniste » des Rennais qui se laissent volontiers voguer dans les grands espaces naturels, alambiqués ou même absurdes, dans lesquels il nous invite.

Dans la lune, dans un western, dans un supermarché, dans New-York City, Arthur H ne cesse de planer, avec ou sans son costume de Super H ou de H-Man, à la découverte des cultures et des éléments, à la rencontre de la femme étoile, des papous ou encore des clandestins. La chaleur nous entoure, l’énergie déborde des sourires et des corps qui s’animent au fil des chansons et du concert. « C’est explosif », murmure-t-on dans les rangs, « Toujours aussi incroyable ! ».

UN ARTHUR H LIBRE

L’artiste navigue avec aisance sur des musiques mélodieusement pop, jazzy et rock, avec parfois des sonorités 70’s et notes rétro futuristes, qui nous électrisent instantanément, en nous faisant danser, rêver, virevolter au firmament des envolées lyriques, ou en nous apaisant au son de la voix grave et berçante du musicien. Les émotions règnent au pays d’Arthur H qui exprime toujours autant d’attachement à l’intime liberté qu’il couve amoureusement et qu’il partage doucement et prudemment, avant d’enfourcher son Cheval de feu.

« Quelque chose dans le vent / Me dit qu’il est temps » Ses paroles résonnent dans nos songes jusqu’à ce que Morphée nous emporte vers d’autres contrées lointaines. C’est certain, à chacun de ses passages, Arthur H nous rend Baba love.

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Arthur H : « J’ai parfois une sensibilité extrêmement féminine »

Rencontre avec Arthur H, dans les jardins du Thabor, qui nous parle de ses inspirations, des femmes et de sa sensibilité artistique. Interview.

YEGG : On vous entend souvent parler de vous en disant que vous vous sentez vilain petit canard. Qu’est-ce qui vous fait ressentir vilain petit canard dans la musique française et est-ce que ce sentiment évolue avec le temps ?

Arthur H : (Rires) Je ne le dis pas souvent. Je retire ce que j’ai dit, je suis un très joli petit canard (Rires). Pourquoi je suis un vilain petit canard ? (Silence) Malheureusement, ce n’est pas parce que je suis entouré de cygnes. Non, je ne me sens plus vilain petit canard, je ne suis plus dans cet état d’esprit là, je suis un joli petit cygne maintenant.

Vous parlez de deux marraines, en référence à Barbara et Brigitte Fontaine. Expliquez-nous l’importance de ces deux artistes dans votre travail et dans votre carrière. Est-ce qu’elles vous ont aidé ?

Elles ne m’ont pas aidé directement mais inspiré, beaucoup. Par cette espèce de rapport très direct, très cru à leur sensibilité, comme s’il n’y avait presque pas de filtre. C’est deux femmes qui avaient de la tendresse pour moi quand j’étais petit mais ça, ça n’a pas forcément influencé mon parcours artistique. Mais du coup moi-même j’ai développé beaucoup de tendresse pour elles.

Vous évoquez aussi la liberté artistique de Brigitte Fontaine. Un point important pour vous, qui êtes reconnu pour votre capacité à vous renouveler au fil des albums, vous prenez des risques. Le rapport entre Brigitte Fontaine et vous, il est là, non ?

Ouais ! Ouais ! Je suis clairement influencé par le courage de Brigitte Fontaine, cette espèce de façon qu’elle a de se jeter dans le vide et de ne pas avoir peur de qui elle est. Et elle a aussi un rapport à l’inspiration très particulier. Elle considère que l’inspiration est un flux naturel. Tu demandes à Brigitte d’écrire une chanson, tu lui donnes une feuille blanche et un stylo, elle s’enferme pendant une demi heure et elle écrit une chanson. Et la plupart du temps ce sera une très belle chanson. Parce qu’elle a décidé qu’écrire, c’était facile. Ça, c’est une idée très efficace je trouve.

Vous arrivez à faire la même chose ?

Maintenant oui. Ça ne veut pas dire que ce que je fais est intéressant ou plus intéressant que si c’était difficile à faire, ça je ne sais pas. Mais par contre je ne me pose pas la question de la difficulté d’écrire, de l’inspiration. Après, l’enregistrement, ça, c’est différent. Là, je suis toujours dans une forme de difficulté. Mais être connecté à quelque chose qui nous dépasse, ça c’est facile.

Vous dites que l’enregistrement est plus difficile pour vous. Pour votre album, vous avez enregistré à Montréal. Est-ce que d’être dans des contrées lointaines, avec des grands espaces, c’est plus facile pour vous qui avez un imaginaire débordant, qui nous embarquez dans des voyages et parlez aussi de voyage initiatique…

Oui, y a quelque chose de plus facile parce qu’à Montréal, il y a énormément d’énergie donc je suis porté par ça. C’est aussi pour ça que j’aime y aller. Évidemment, il y a plus d’espace mais ce n’est pas que ça. Il y a aussi plus d’énergie positive chez les gens en général. Une espèce d’enthousiasme qui est un peu intact et qui du coup fait du bien. Dès qu’on arrive là-bas, on le ressent. Après, changer d’équipe, partir à l’aventure avec des gens que je ne connaissais pas, ça ce n’est pas de tout repos non plus.

Est-ce que, en enregistrant à Montréal, l’esprit de Lhasa règne sur cet album ?

Complètement ! C’est grâce à elle que j’ai rencontré tous ces gens, ces musiciens. Les musiciens de Patrick Watson, Patrick Watson. C’est grâce à elle que j’ai eu envie de faire un album à Montréal. C’est grâce à elle que j’aime Montréal, donc j’ai beaucoup pensé à Lhasa en faisant ce disque.

En écrivant aussi ?

En écrivant, pas spécialement mais en enregistrant oui.

Tendresse pour Barbara, admiration pour Brigitte Fontaine, découvertes avec Lhasa… Elles alimentent votre sensibilité pour parler des femmes dans vos textes ? Est-ce que vous pensez aux femmes de votre entourage personnel et professionnel, ou est-ce totalement imaginaire ? Les figures féminines dans vos chansons étant tellement variées, cosmiques, charnelles, sensuelles… Vous vous mettez même à la place de la femme qui pleure, dans la chanson du même nom…

C’est un phénomène très naturel je pense, pour tous ceux qui écrivent, racontent des histoires. De partir de quelque chose que l’on a vécu très précisément et le transcender. Quelque chose peut-être même que l’on a ressenti mais sans l’expliquer. Et ça ressort sous forme d’histoires, de paraboles, d’images. Donc ça part toujours du réel, bien sûr.

Quand vous écrivez des textes sur les femmes, est-ce que vous vous posez la question de l’interprétation du public, s’il va se dire que c’est du cliché ou que vous prônez l’égalité femmes-hommes ?

Pas du tout. On parle de rapport social, là, dans la société. Moi, je ne suis pas trop là dedans. Je suis plutôt dans quelque chose de beaucoup plus intime en fait. Où du coup les rapports - y a pas de question d’égalité - ils sont très ouverts, ou libres, ou poignants, vivants. Pas enfermés par les codes de la société. Je peux même aller jusqu’à dire que je suis une femme qui pleure car à l’intérieur de moi, il y a toute l’histoire des femmes, non seulement que j’ai connu mais celle de ma famille aussi, et je le sens en moi, c’est en moi.

C’est votre héritage…

Ouais, ça vit en moi. En plus, j’ai parfois une sensibilité extrêmement féminine. Et encore en plus, mes amies de cœur, avec qui j’ai l’impression de me livrer, de vraiment communiquer, sont exclusivement des femmes. Et si je rajoute encore un « en plus », je trouve que la sensibilité artistique, le rapport artistique au monde, il est très très féminin aussi. En grande partie. Pas que féminin mais en grande partie.

Quand vous parlez de rapport social, qui n’est pas votre truc à la base, vous faites une espèce d’ode aux caissières. Là, il y a un rapport social. Profiter des caissières maintenant, avant qu’elles ne soient remplacées par des machines…

Ouais. Ce n’est pas vraiment ça le message mais on peut dire ça effectivement que malgré, disons, la dureté de la condition, il y a la possibilité d’un rapport humain, qui un jour n’existera plus. C’est plus un rapport poétique sur les caissières et sur les supermarchés. Ce n’est pas un brulot pour dénoncer les supermarchés, même si, je pense, que ce n’est pas des situations normales ni pour la nourriture, ni pour les gens, ni pour rien… Mais je trouve qu’on doit parler de tout et qu’on peut parler de tout dans une chanson.

Parler de tout. Ça tombe bien, vous êtes dans un festival des arts de la parole, vous y êtes déjà venu, il y a de la proximité avec le public, avec vos textes par conséquence. En tant qu’artiste, quel ressenti par rapport à ce type de proposition, comme celle de ce festival rennais ?

J’aime beaucoup ça car, de par l’espace qui est créé, il y a une vraie volonté de rencontre, que les gens se rencontrent. C’est le Magic Mirror, c’est facile de parler à ton voisin, après tout le monde va boire des coups ensemble, c’est extrêmement convivial. Donc ça, c’est assez rare les endroits comme ça. Il y en a quelques uns en France, c’est extrêmement agréable.

Au niveau de la thématique, les arts de la parole. Cette édition, forcément, invite à parler de la liberté d’expression. En regardant votre carrière, dans vos textes et votre musique, vous parlez de liberté d’expression ou de liberté artistique globale ?

De liberté tout court. La liberté pour moi, c’est de ne pas être enfermé dans une identité. C’est se rendre compte que l’on peut être plusieurs personnes à la fois, ne pas avoir honte de soi, ne pas trop se limiter, s’auto-limiter, ne pas faire trop attention au regard des autres. La liberté, c’est quelque chose d’intime, que l’on a en soi et qui est important de développer. Ce n’est pas forcément dans les grandes déclarations. Encore une fois, pour moi, c’est plutôt dans l’intime que ça se joue.

Dans cet album, on voit beaucoup de liberté, de chaleur humaine, de soleil dedans justement, de joyeusetés intérieures, qui se voient à l’extérieur. On parle de libération de votre voix. Est-ce que vous atteignez le chemin de cette liberté dont vous parlez tant ? Est-ce qu’avec cet album, vous décollez ?

Le disque, je ne sais pas, parce que j’ai toujours l’impression de rater complètement mes disques donc je fais toujours une dépression après (Rires). Je ne sais donc pas si c’est vraiment la liberté mais par contre sur scène, je me sens complètement relié aux gens, sans trop de barrières. Cœur à cœur. Ça danse, ça parle, ça rêve… Je dois constater que c’est vraiment les femmes qui s’amusent le plus dans un concert. Qui ont vraiment une capacité de se lâcher, de se donner du plaisir avec la musique, qui pour nous quand on est sur scène est indispensable ! Quand tu vois une ou deux filles qui s’éclatent, c’est bon, ça nous permet d’être dans la musique. Si tu n’as que des mecs devant toi qui font la gueule, c’est plus difficile de rentrer dans le son. Je ne suis pas du tout anti mecs mais on a toujours besoin de filles, quelque soit leur âge, leur beauté, peu importe… Faut juste qu’on sente qu’elles soient dans la musique. C’est ça qui change la vibration d’un concert.

Merci beaucoup Arthur H.

Merci à vous.

Célian Ramis

Cécile de France, en équilibre dans les non-dits

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Cinéma Gaumont, Rennes
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Cécile de France et Albert Dupontel partagent l'affiche du nouveau film de Denis Dercourt, En équilibre. Délicatesse, non-dits et conflit interne, la comédienne nous parle de son rôle, lors de son passage à Rennes.
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Mardi 7 avril, la comédienne Cécile de France était de passage à Rennes pour l’avant-première du nouveau film de Denis Dercourt, En équilibre, dans lequel elle donne la réplique à Albert Dupontel. 

Dix ans déjà que les deux comédiens ont tourné ensemble dans Fauteuils d’orchestre, de Danièle Thompson. Actuellement – sortie en salles à partir du 15 avril – ils partagent l’affiche d’un mélodrame signé Denis Dercourt, adapté du livre de Bernard Sachsé, Sur mes 4 jambes.

Lui, se glisse dans la peau de Marc, dresseur de chevaux et cascadeur pour le cinéma, paraplégique en fauteuil roulant à la suite d’un accident sur un tournage. Elle, incarne Florence, employée d’une compagnie d’assurance gérant le dossier de Marc. Leur rencontre va les entrainer sur les cimes des passions, exacerbée chez lui, enfouie chez elle, et pourtant intactes et vives des deux côtés.

Ce pourrait être une rencontre banale, une histoire d’amour comme on en voit beaucoup. Mais le réalisateur, Denis Dercourt, qui s’attaque pour la première fois « au genre mélo », choisit la subtilité, la délicatesse, les non-dits et maintient le spectateur à l’affut de la moindre réaction permettant de percer à jour les pensées camouflées dans les esprits des personnages, brillamment interprétés par Cécile de France et Albert Dupontel.

Ils ont cette force en commun : savoir libérer puissance et douceur, laisser surgir et planer une souffrance mélancolique dans leurs regards et leurs silences. « Albert m’a dit qu’il n’avait pas besoin de jouer. Qu’il comprenait la colère de cet homme, puisqu’il a lui-même failli rester handicapé, jeune, à cause d’une maladie. », explique Denis Dercourt. Cécile de France, elle, avoue aimer la magie et l’alchimie qui se jouent dans ces moments-là, sans révéler ce à quoi elle pense sur les tournages.

« Tout va très vite quand on tourne. Mais c’est important d’être dans la retenue. Dans la tête de Florence, on imagine bien qu’il doit y avoir un milliard de questions. La retenue permet de conserver le conflit interne », dévoile la comédienne belge. Dans En équilibre, le rôle de son personnage a été inventé de toute pièce, l’histoire de Marc étant basée sur celle véritable de Bernard Sachse, cascadeur et cavalier paraplégique.

Florence, elle, a pris forme au fur et à mesure. Employée dans une compagnie d’assurance, « bon soldat », comme dira son interprète, chignon « hitchcockien » bien tiré sur le haut du crane, mère de famille et épouse paisible, peu épanouie mais investie, elle va se révéler au contact de Marc et au travers de sa passion manquée, le piano.

« La rencontre, c’est le déclic. Une porte qui s’ouvre. L’aventure avec Marc est une parenthèse mais qui ouvre une porte, qui fait bouger la vie de cette femme qui a cette passion, ce rêve d’enfant et qui en est passé à côté à un moment. »
Cécile de France, comédienne.

Pour Cécile de France, Florence aime sa famille, son mari – « et les réactions de ce dernier sont dans la délicatesse, la finesse, ce n’est pas un cocu niais » – et c’est ce qui lui plait, de se dire que l’on peut vivre cette parenthèse, cet instant de vie, « sans être obligée de tout casser, tout envoyer balader ».

Et c’est avec finesse et émotions que le film se déroule et que les spectateurs entrent dans les vies de Marc et Florence, qui se croisent, se déstructurent avant de trouver leur point d’équilibre. La mise à nue se fait crescendo, affranchie de tout jugement, et mêle douceur et force de vie, sans toutefois – malheureusement - réussir à saisir pleinement l’indomptable puissance viscérale qui permet de transcender l’esprit au-delà du raisonnable.

Célian Ramis

Violence animale dans l'art de la contorsion

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Théâtre du Vieux Saint-Etienne
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Le duo nous livre une performance corporelle et musicale en parfaite harmonie. De là se dégage une série d’émotions viscérales entre la violence à l’état brut, l’animalité et la brutalité.
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Dans le cadre du Temps Fort des Arts du cirque, organisé par Ay-Roop, les deux artistes britanniques Iona Kewley et Joseph Quimbly ont livré une performance originale de contorsion accompagnée d’arrangements musicaux progressifs, les 25 et 26 mars au Théâtre du Vieux Saint-Etienne, de Rennes.

Géraldine Werner, co-directrice de la structure “Ay-Roop” a repéré le duo dans le cadre du dispositif Circus Next, dispositif européen de soutien et de repérage dans les Arts du Cirque. Le duo nous livre une performance corporelle et musicale en parfaite harmonie. De là se dégage une série d’émotions viscérales entre la violence à l’état brut, l’animalité et la brutalité, dans un lieu particulièrement bien choisi, le Théâtre de Vieux Saint-Etienne. Un cadre permettant de révéler le duo : la danseuse Iona Kewney se saisit de tout l’espace offert pour l’occuper pleinement, à l’image de l’intensité de l’écho du style électronique progressif utilisé par le musicien Joseph Quimby.

La performance gestuelle de Iona Kewney, femme à la fois féminine, musculaire avec un corps enfantin et sans tabou, est un coup de poing, un combat que la contorsionniste livre contre elle-même et que l’on prend en pleine face.

Son corps qui se déforme, se transforme, s’agite, n’est pas accompagné de parole, juste des respirations hâletantes, râles et cris évoquant une forme de communication animale. Le spectateur assiste de manière très brute à cette violence, et se voit mis en difficulté par effet de transposition sur son proper corps. Une situation qui peut s’avérer stressante sans toutefois parler d’agression.

Les gestes déshumanisés, presque animaux, sont en parfaite harmonie avec le caractère progressif de la musique électronique type scandinave de Joseph Quimbly, au clavier. Cette harmonie et progression permet au spectateur une compréhension des émotions dégagées : le spectacle semble une approche primaire du combat de la vie, de son intensité, de sa difficulté et bien sûr de sa rapidité.

L’aspect animal apporté par la danseuse se fait également de par l’utilisation des élements (terre, eau, branche d’arbre) entremelés aux déformations et mouvements de son corps. Ce spectacle provoque le spectateur, l’amenant également à une recherche, une interrogation sur le sens de leur utilisation autour des contorsions.

Le public est alors absorbé par la magie de la prestation et cherche à comprendre cette progression des contorsions afin de partager les émotions avec Iona Kewley.

DR

Mythos 2015 : Les femmes (minoritaires) prennent la parole !

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Rennes
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Cette année, les femmes se font discrètes dans la programmation. Toutefois, l’engagement des artistes présentes, et leur volonté de prendre la parole et raconter, n’en est pas amoindri. Gagnez vos places ici !
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Du 7 au 12 avril, le festival des arts de la parole Mythos reprend ses quartiers dans la capitale bretonne et sa métropole. Dix places vous sont offertes ici pour assister à des spectacles créés par des artistes féminines engagées et expressives.

Cette année, les femmes se font discrètes dans la programmation de Mythos. Toutefois, l’engagement des artistes présentes n’en est pas amoindri, et elles démontrent leur volonté de prendre la parole et de raconter, que ce soit dans « Please, continue (Hamlet) » de Yan Duyvendak & Roger Bernat, dans « Le grand frisson » de la compagnie des Femmes à barbe ou encore dans « Les résidents » d’Emmanuelle Hiron.

PLACES À GAGNER

• Décris-Ravage, d’Adeline Rosenstein : 4 places

Adeline Rosenstein attise déjà toutes les curiosités avec son théâtre documentaire, « Décris-Ravage », qui mêle témoignages d’artistes occidentaux ayant vécu en Israël ou en Palestine à des pièces de théâtre historiques traitant des mêmes événements. C’est avec originalité, espièglerie et humour qu’Adeline Rosenstein s’empare du sujet du conflit israélo-palestinien pour poser le débat, sans jamais éviter les questions inconfortables, les tensions.

2 places à gagner pour la représentation du mercredi 8 avril, 18h, au théâtre de la Parcheminerie, Rennes
2 places à gagner pour la représentation du jeudi 9 avril, 20h30, au théâtre de la Parcheminerie, Rennes.

• Voyage extra-ordinaire, de La grosse situation : 2 places

Le trio de La grosse situation propose une déambulation imaginaire à l’occasion d’une représentation unique de « Voyage extra-ordinaire ». Alice Fahrenkrug, Bénédicte Chevallereau et Cécile Delhommeau sont définies comme comédiennes, auteures, metteures en scène, escaladeuses, botanistes, raconteuses d’histoire, chanteuses d’occasion, bricoleuses du quotidien et exploratrices chevronnées. Rien que ça. Ou tout ça pour emmener un groupe de volontaires dans un voyage vers l’imprévu.

2 places à gagner pour la représentation du jeudi 9 avril, 21h, au Campement Dromesko, St-Jacques-de-la-Lande.

• Sianna (+ Set&Match) : 2 places

Déjà repérée lors de Bars en Trans en décembre dernier, Sianna est une révélation sur la scène rap. Ses inspirations sont variées : du r’n’b au rap français en passant par la soul et le blues afro-américain, la jeune artistes livre ses rimes avec énergie et dynamisme. Habituée à partager la scène avec d’autres artistes urbains, la rappeuse se présentera seule devant le public de Mythos et promet une explosion d’émotions.

Ce soir-là, elle partagera non pas la scène mais l’affiche avec le groupe r’n’b Set&Match, au ton décalé et raffiné.

2 places à gagner pour le concert du vendredi 10 avril, 20h30, à l’Antipode MJC, Rennes.

• Yael Naïm (+ récit de Nicolas Rey & Mathieu Saïkaly) : 2 places

La réputation de Yael Naïm n’est plus à faire. D’Israël à Paris, ses chansons voyagent au fil des langues et des pays et l’artiste est de celles qui chantent avec insolence et cruauté, de celles qui savent que l’art n’a pas grand chose à voir avec la politesse. Avec son compagnon, David Donatien, qui signe les arrangements, ils instaurent une ambiance particulière et entrainent le public dans une sorte de doux rêve dont il est difficile de s’extirper mais agréable de s’y glisser.

Avant le concert, découvrez « Et vivre était sublime », une histoire née de la rencontre entre deux hommes et deux univers, l’écrivain Nicolas Rey et le musicien Mathieu Saïkaly.

2 places à gagner pour la soirée récit-concert du vendredi 10 avril, 20h30 (récit) et 22h30 (concert), dans le parc du Thabor, Rennes.

Pour gagner vos places, soyez les premiers à nous contacter à l’adresse redaction@yeggmag.fr, en précisant la représentation qui vous intéresse (avec date et heure).

Merci de nous préciser votre nom, prénom, adresse et mail.

Célian Ramis

Nishtiman, un voyage musical dans l'unité et la diversité du Kurdistan

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Opéra de Rennes
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Voyage aux confins de la Turquie, de l’Iran, de l’Irak et de la Syrie, le 6 mars, à l'Opéra de Rennes, avec Nishtiman, une formation singulière qui célèbre toutes les musiques kurdes.
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Au détour d’un concert à l’Opéra de Rennes, vendredi 6 mars, spectatrices et spectateurs ont été invité-e-s à voyager aux confins de la Turquie, de l’Iran, de l’Irak et de la Syrie, avec Nishtiman, une formation singulière qui célèbre toutes les musiques kurdes.

À l’occasion du cycle Divas du monde, et de la programmation liée au 8 mars, journée internationale des Femmes, l’Opéra de Rennes accueillait les 7 membres du groupe Nishtiman, formé en 2013 par le percussionniste Hussein Zahawy, qui confie rapidement la composition à Sohrab Pournazeri, chanteur et prodige du tanbur et du kamanché. Tous deux ouvrent les festivités et nous régalent de leurs musiques les vingt premières minutes du concert durant. Une belle entrée en matière.

La dextérité et l’agilité des mains du joueur de tanbur hypnotisent rapidement l’audience, dont les souffles coupés et les yeux écarquillés témoignent d’une fascination naissante pour l’instrument et son propriétaire, qui se confirmera au fil du spectacle. Sur la scène de l’Opéra, les deux musiciens sont seuls, entourés de différents instruments traditionnels kurdes, mais pas seulement.

UNITÉ ET DIVERSITÉ

C’est cette capacité à unir divers univers qui participe à leur succès amplement mérité. Ils sont Iraniens, Irakiens et Turcs. Ils sont kurdes, connaissent les musiques de leur pays et sont réunis par la volonté de célébrer la diversité et la richesse des chants et styles de leur peuple. Un peuple comptant des dizaines de millions de personnes éparpillées dans quatre pays frontaliers dont les situations et régimes politiques sont loin d’être semblables.

Ici, ils partagent leur passion pour la musique, avec Goran Kamil, chanteur et joueur de oud, Ertan Tekin, joueur de zorna, balaban et duduk (instruments à vent) et Sara Eghlimi, chanteuse. Auxquels se rajoutent deux musiciens français : Robin Vassy, aux percussions sénégalaises et Leïla Renault, à la contrebasse. Vêtus d’habits traditionnels, assis en ligne, ils sont des « musiciens sans frontières », selon le fondateur de la formation. 

Pendant une heure et demi, Nishtiman (signifiant « patrie » en kurde) alterne entre chansons en chœur, duos entre Sohrab et Sara, qui nous régale de sa voix perçante et envoutante, et parties instrumentales. L’unité des musiciens dans leur diversité permet de livrer une osmose musicale délicate et profonde, qui nous saisit et nous maintient dans l’envie de s’en délecter toujours davantage. Parfois dans la collectivité, parfois dans la singularité, chaque membre du groupe partage sans modération et avec générosité son savoir-faire et son talent, faisant résonner les instruments les uns après les autres, sans volonté d’être dans la démonstration et la performance.

VOYAGE MUSICAL AU MOYEN-ORIENT

Leur objectif, c’est celui de sensibiliser à l’esprit de toutes les musiques traditionnelles kurdes, mêlées les unes aux autres, mélangées à d’autres genres orientaux, et alliées à la culture occidentale. L’ensemble fonctionne sans difficultés. Véritable initiation et découverte du patrimoine d’un peuple effacé de la carte géographique, entre autre. Pourtant, dans leurs musiques, ils expriment la gaieté, la joie, la jubilation, le plaisir et la fête. Avec force et sourires.

Il y a de la profondeur dans les mélodies, dans les harmonies de leurs voix, de la rondeur et de la douceur. On vogue volontiers dans les contrées montagneuses du Kurdistan, on voyage au cœur du Moyen-Orient, on danse par moments, et on se laisse bringuebaler par cette mosaïque musicale d’une région à une autre, d’un rythme à un autre, d’un air populaire à une ode amoureuse.

Bercés par la douceur, la puissance et la retenue de la voix de Sara Eghlimi, on pense à celles qui embarqueront deux jours plus tard, le 8 mars précisément – journée internationale des Femmes – dans la caravane féministe qui se lancera alors dans la 4e marche mondiale des Femmes (la marche a lieu tous les 5 ans) en traversant une quinzaine de pays, débutant au Kurdistan pour terminer au Portugal, en octobre 2015.

Un concert ne suffira pas pour saisir toute l’étendue des musiques kurdes, qu’elles viennent de Syrie, d’Irak, d’Iran ou du Turquie mais aura valu une belle mise en lumière de cette culture riche et variée qui incite au voyage et à la réflexion autour d’un patrimoine conservé et uni au travers de valeurs communes, malgré un peuple épars et des régimes politiques ne reconnaissant pas tous la population et culture kurde. Un beau voyage musical.

Célian Ramis

Emma de Caunes construit et déconstruit les Châteaux de sable

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Cinéma Gaumont, Rennes
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Emma de Caunes sera, dès le 1er avril, à l'affiche du film d'Olivier Jahan, Les châteaux de sable. Elle y joue Éléonore, une femme en deuil de son père, déboussolée, amoureuse et en proie à ses peurs de faire un choix.
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 Jeudi 5 mars, l’actrice Emma de Caunes était accompagnée du réalisateur Olivier Jahan afin de présenter leur nouveau film, Les châteaux de sable, en avant-première au cinéma Gaumont de Rennes. Visible en salles dès le 1er avril.

Les châteaux de sable, un titre en référence à la chanson de Brassens, à l’image de quelque chose qui se construit et se déconstruit, à l’enfance. Parce que ce film aborde tous ces points. À travers le personnage principal, interprété par Emma de Caunes, le scénario tisse des situations émotionnellement intenses autour de différents questionnements, notamment l’après-couple, le deuil et la difficulté à faire un choix.

Au départ, l’histoire se veut simple. Éléonore, photographe à Paris, doit se rendre dans les Côtes d’Armor pour y vendre la maison de son père (Alain Chamfort) décédé deux mois auparavant. Elle demande à Samuel (Yannick Renier), son ex-compagnon, de l’emmener. Ils vont partager leur vie à nouveau, le temps d’un week-end. Ni amis, ni ennemis. Ils vont mettre les rancœurs de côté, puis les déballer, s’en libérer, jusqu’à tout presque mettre à plat pour envisager un nouveau départ, ensemble ou séparément.

Olivier Jahan joue subtilement avec les émotions toujours à vif, à fleur de peau, pour maintenir une tension soutenable, et livre ici une vision sans jugements de ses personnages. « À la base, c’est un peu mon histoire. On a tourné dans la maison de mon père, celle dans laquelle il a vécu les dernières années de sa vie. Puis j’ai connu justement les visites pour la vente, l’agent immobilier qui nous parle pendant des plombes de la fosse sceptique… Et il faut se dire qu’il y en a 2 dans la maison ! », plaisante-t-il.

Son film, il en parle avec modestie et fierté. Les yeux brillants, le sourire large et l’envie de transmettre tous les bons moments et souvenirs du tournage rapide et intense. Une aventure à laquelle il a immédiatement convié Emma de Caunes, qu’il connaît bien pour avoir travaillé avec elle à plusieurs reprises.

« Même sans lire le scénario, j’aurais pu lui dire oui, tellement je lui fais confiance. Et je savais qu’il pourrait écrire un rôle quasiment sur mesure pour moi », explique l’actrice.

UN RÔLE SUR MESURE POUR EMMA DE CAUNES

Et ce rôle, elle l’incarne avec une justesse et un naturel qui lui est propre. Puisant dans son vécu pour donner vie à son personnage, elle précise néanmoins, et à juste titre, qu’elle ne ressemble pas à Éléonore. Qu’elle rêvait simplement de cette proposition :

« J’étais tellement contente que l’on me donne un rôle de Femme avec un grand F ! De mon âge ! Éléonore est à une période charnière, elle doit faire un choix, et elle doit avancer. C’est exactement ce dont j’avais envie ! »

Pour l’actrice, le cinéma français n’offre pas suffisamment de rôles aux femmes de 40 ans et plus. Elles sont les femmes de, les personnages secondaires ou les héroïnes de films d’action, en costumes. Trop rare est le visage de la quadra porté au devant de l’écran. Ce phénomène, Emma de Caunes l’interprète de manière personnelle, en fonction de son parcours : « En France, on aime que les gens entrent dans des cadres et y restent. Moi, j’ai un peu brouillé les pistes je pense, en étant comédienne, actrice, djette et en faisant une émission de musique sur Canal +… Et j’ai connu le succès très rapidement et très jeune. Je ne regrette rien mais si je devais refaire certaines choses, je prendrais plus mon temps je pense. Mais chez les de Caunes, on va toujours là où le vent nous porte, on aime faire ce que l'on veut. »

Un point sur lequel elle s’accorde avec Olivier Jahan, absent pendant 15 ans de la réalisation de long-métrage. « J’étais catalogué sélectionneur de la Quinzaine des réalisateurs, et puis j’avais fait un premier film qui n’avait pas trop marché… À une époque, on acceptait que le premier film ne fonctionne pas très bien et on accompagnait les jeunes artistes, maintenant c’est fini. Je suis arrivé à une période où ce n’était plus possible. Donc difficile de faire un deuxième film. », confie-t-il.

UN VOYAGE INITIATIQUE, FÉMININ ET UNIVERSEL

Et à force de persévérance, et un coup de folie qui a transformé une partie de son histoire en un film, Les châteaux de sable éclosent et nous délivrent un instant de vie soigneusement pensé. D’une histoire banale, on passe à un voyage initiatique original -  « couillu et moderne » aussi nous dira Emma de Caunes en rigolant - grâce à l’apport de la narration en voix off. Un procédé qui nous emmène dans les souvenirs des personnages, qui nous renseigne sur qui ils sont et surtout qui nous accompagne dans les différentes réflexions. En laissant le soin aux spectateurs-trices d’interpréter les diverses réactions, et de s’approprier leurs émotions.

C’est ça la force du film. Apporter des pistes de réflexion sans se noyer dans des vérités absolues, banales et dangereuses. Simplement montrer cette femme adulte, déboussolée, qui vient de perdre son père, qui doit vendre la maison familiale. Encore séduite par cette Éléonore qui fait sens en tant que personnage féminin, qui interroge la place d’une femme dans son évolution, mais en tant également que personnage universel, Emma de Caunes s’enthousiasme :

« Elle est magnifique ! Au début du film, c’est une petite fille qui perd son papa et elle termine en étant grandie. Elle a fait un choix et elle avance. »

Le film aborde les difficultés relationnelles père-fille et homme-femme sans lourdeurs et sans superflu. Le talent de ce film, que l’on doit aux acteurs mais aussi au réalisateur et aux scénaristes, réside aussi dans la capacité à garder l’histoire légère tout en partageant des émotions brutes, sans viser l’apaisement que l’on finit malgré tout par ressentir.

Pour le réalisateur, « Les châteaux de sable, c’est un couple déconstruit qui va petit à petit se reconstruire ; c’est la mort d’un être aimé ; c’est l’acceptation du deuil ; le choix de rentrer dans l’âge adulte… C’est tout ça à la fois, on a voulu faire plusieurs points d’entrée dans le film. » Fait dans l’urgence, le film progresse pourtant à vitesse modérée, sans prendre de détours dans les actions montrées, mais sans oublier toutefois de nous conter une histoire intelligente et intelligible, ambitieuse et émouvante.

Célian Ramis

Vers une nouvelle pédagogie à l'école ?

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Maison de quartier de Villejean, Rennes
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Ancienne institutrice et directrice d'école maternelle, Françoise Ancquetil parle de ses luttes menées contre les réformes scolaires, qu'elle juge inégalitaires, formatées et élitistes.
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Le 27 février dernier, le collectif Université Populaire Gesticulante a invité la conférencière Françoise Ancquetil, à la Maison de Quartier de Villejean, sur le thème « L'école est finie ? ». Ancienne institutrice et directrice d'école maternelle, elle est intervenue pour parler de ses luttes menées depuis 2001 contre les réformes scolaires, qu'elle juge inégalitaires, formatées et élitistes.

L'école, Françoise Ancquetil la connaît bien. « Il y a la grande Histoire, moi j'ai ma petite histoire avec l'école, confie-t-elle, au début de sa conférence « L'école est finie ? ». Je suis arrivée à 14 mois dans la cour d'école. » Orpheline, elle a été adoptée par un couple, tous les deux directeurs d'école ; sa mère dirigeait l'école des filles d'un village proche de Rennes et son père, l'école des garçons, au même endroit.

Après ses études dans le secondaire, Françoise se destine à son tour à l'enseignement. Elle passe le concours de l’Éducation nationale et devient enseignante dans une école maternelle, puis directrice de cette même école, située à l'ouest de Rennes. Trente-sept ans plus tard, Françoise Ancquetil a pris sa retraite en septembre 2013. Désormais, elle partage son expérience. Dans les mois qui ont suivi, Françoise s'est formée en tant que conférencière gesticulante à la Scop brétillienne Le Pavé, dissoute le 15 décembre dernier. Une nouvelle Scop, Le Contre Pied, l'a remplacée.

« UN POINT DE VUE : LE MIEN »

De cette formation, « L'école est finie ? » est née. Un titre, quelque peu provocateur, qui interpelle. Pour preuve, ce vendredi 27 février, à la Maison de quartier de Villejean, la salle est presque pleine. Une soixantaine de personnes est venue assister à cette conférence organisée par le collectif Université Populaire Gesticulante.

« Je n'y donne qu'un point de vue : le mien »
prévient dès le départ Françoise Ancquetil.

Pendant une heure et demi, l'ancienne institutrice a expliqué comment elle, son équipe pédagogique et les parents d'élèves sont entrés en résistance contre le système de l’Éducation nationale.

C'est en 2001 que tout a commencé. Confrontée à un problème, Françoise invite le public de la salle à le résoudre, sur un petit papier. Elle n'a pas oublié ses anciens réflexes, le public est redevenu sa classe. Sur un tableau d'école, elle écrit l'énoncé : sur cinq classes, deux maîtres sont en congés. Sachant que chaque classe contient 28 élèves, combien d'élèves seront répartis dans les deux classes restantes ? La réponse : 47, 47 et 46 élèves.

DÉSOBÉISSANCE COLLECTIVE

« Cela a été ma première réflexion collective de désobéissance car avec ces effectifs, on ne pouvait faire que de la garderie, se souvient Françoise. Les enfants étaient obligés de venir en classe mais aucun remplacement ne pouvait être fait... L'équipe pédagogique et moi avons informés les parents de la situation. Ces derniers ont fait signer une pétition, ils ont envoyé un courrier adressé à la mairie, à l'Inspecteur d'académie et aux députés. » Au final, une seule classe a été remplacée. Mais la situation était supportable, selon l'ancienne institutrice.

Autre exemple : en 2007 et 2008, lorsque Xavier Darcos était ministre de l’Éducation, Françoise Ancquetil et son équipe ont lutté contre des réformes scolaires jugées inégalitaires. Une action nationale avait été lancée pour « échanger sur l'école » lors d'une matinée « conviviale ». « Nous devions débattre ensemble du système français mais nous avons également parlé des dangers et des vices cachés de la réforme Darcos », développe-t-elle.

La mise en place des 4 jours par semaine et surtout de l'aide personnalisée obligatoire pour les enfants dits en difficulté inquiète l'équipe pédagogique de son école.

Ils décident de ne pas mettre le dispositif en place, qu'ils considèrent discriminant, contrairement à toutes les autres écoles d'Ille-et-Vilaine.

« Tous les enfants sont en difficulté, certains ont du mal à maîtriser la langue orale, d'autres l'écrit. Il faut tous les prendre »
a répliqué Françoise Ancquetil à l'Inspecteur d'académie.

FORMATAGE AU MONDE DU TRAVAIL

« Je me suis rendue compte qu'il y avait une crise de l'école », atteste Françoise. Cette crise, elle l'explique en partie par les réformes scolaires, impulsées par l'Organisation de Coopération et de Développement Économique (OCDE), depuis les années 90. Et les directives tendent, selon elle, vers une école compétitive et élitiste, loin de la visée émancipatrice et du slogan républicain écrit sur les façades des écoles :

« En 2002, l'OCDE a intégré ce que j'appelle des "gros mots" à l'école : compétences, évaluations, performances et résultats. »

Les réformes scolaires ont suivi ces indications. En maternelle, des fiches de compétences et des fichiers Base élèves, ce que Françoise Ancquetil appelle du « fichage », sont instaurés. Une personne dans le public, interloquée, chuchote : « Cela me fait penser au monde du travail. » L'usage de ce vocabulaire, utilisé dans des logiques d'entreprise, est problématique. L'ancienne directrice s'est opposé à tous ces changements à cause des problèmes éthiques qu'ils soulevaient.

CLASSES MULTI ÂGES

Et la jeune retraitée de l’Éducation nationale les a tous contournés. Au lieu de « livrets de compétences », elle a créé des « livrets de progrès », plus ludiques et accessibles, avec les mêmes données imposées par l'académie.

« Même dans une école traditionnelle, on peut créer, inventer des choses et s'opposer »
martèle-t-elle.

Son avancée la plus significative : les classes multi âges. Depuis 2007, Françoise Ancquetil et son équipe pédagogique ont travaillé pour regrouper les élèves, de petite, moyenne et grande sections, ensemble.

Malgré la réticence des parents au début, les résultats ont été très concluants au bout d'un an. L'apprentissage des élèves se fait plus rapidement. De leur côté, les instituteurs coopèrent entre eux dans un « climat de confiance ». « Avant, on faisait des projets chacun dans nos classes mais là, on se donnait même nos fiches ! », se rappelle Françoise.

 L'école est-elle alors vraiment finie ?

« Elle est quand même bien touchée et bien attaquée, répond l'ancienne directrice d'école maternelle. Une petite lueur d'espoir subsiste tout de même. »

Les attentats à Paris, en janvier dernier, ont renforcé le discours des politiques sur l'école. « J'ai senti qu'on la tenait responsable de ce qui s'était passé. Mais elle n'enferme pas tous les maux de la société », conclut Françoise Ancquetil.

MODÈLE PÉDAGOGIQUE ALTERNATIF

Les questions de religions et de différences culturelles ne sont pas abordées en classe. « Après les attentats, les instituteurs se sont mis à en parler aux élèves. Mais on devrait pourtant parler de ces sujets tous les jours ! Et également valoriser les différences, les cultures des autres. L'école ne joue plus son rôle d'intégration », regrette Françoise.

Désormais, ses collègues et d'autres prennent la relève. Mises en place depuis sept ans, les classes multi âges ont inspiré une autre école maternelle, située également dans l'ouest de Rennes. L'exemple de Françoise montre qu'une autre pédagogie est possible dans les établissements républicains : centrée sur l'élève, basée sur la coopération, la curiosité d'apprentissage et la tolérance de l'Autre.   

 

Célian Ramis

Justine Lévy : "Écrire des livres pour s'en débarasser"

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Espace Ouest France, Rennes
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L’écrivaine Justine Lévy est venue présenter son dernier roman autobiographique, La Gaieté, jeudi 26 février à l’espace Ouest-France de Rennes.
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L’écrivaine Justine Lévy est venue présenter son dernier roman autobiographique, La Gaieté, jeudi 26 février à lespace Ouest-France de Rennes.

« Je nose pas vous regarder. » Salle comble pour Justine Lévy. À l’occasion de la parution de La Gaieté, son quatrième roman, l’écrivaine a rencontré ses lecteurs rennais. Visiblement intimidée, elle n’a que rarement regardé le public, les yeux rivés vers le sol.

Lors de cette rencontre, l’écrivaine évoque la maternité, qui l’a poussée à écrire son dernier roman. « Louise n’était pas du tout faite pour être mère », explique-t-elle, d’une voix douce et posée. Son double littéraire lui a permis de mieux parler d’elle, de manière à peine voilée, avant d’assumer entièrement ses propos.

« Ce nest pas du tout naturel d’être mère. On est programmé pour faire des enfants. Mais les élever, les éduquer Je navais pas réalisé que ce serait aussi difficile »
confie Justine Lévy.

Dans son roman, elle évoque la peur constante qu’elle ressent. Une peur qui ne semble jamais la quitter. Au milieu de l’interview, elle cesse soudainement de parler pour consulter son téléphone portable. Elle s’excuse : « Je vérifie que ce ne sont pas les enfants. Imaginez sil arrive un truc Je suis loin ».

Si elle affirme qu’il n’y a pas d’urgence à écrire, Justine Lévy revendique également le pouvoir salvateur des mots :

« Une des raisons pour lesquelles on écrit des livres, cest pour sen débarrasser, cest pour les poublier. »

Publier et oublier, deux mots en référence à Rien de grave, roman dans lequel elle raconte comment Raphaël Enthoven, son premier mari, l’a délaissée pour Carla Bruni.

Tout au long du rendez-vous, Justine Lévy semble fragile et peu sûre d’elle : « Écrire, cest la seule chose que je fasse à peu près correctement », confie-t-elle, toujours le regard baissé. Assez réservée, elle a répondu aux questions spontanément mais en s’interrompant souvent : « Je ne sais pas comment dire. Je suis meilleure à l’écrit… »

Sa fragilité, elle la revendique presque. Lorsqu’un jeune lecteur l’interroge sur la dernière phrase du roman - « C’est solide un garçon » - et sur sa tendance à idéaliser les hommes, Justine Lévy a répondu :

« Jai besoin que quelquun décide à ma place et il se trouve que cest un homme. »

Mais la fille de Bernard-Henri Lévy a aussi fait preuve d’ironie, flirtant parfois avec la provocation. Interrogée sur la fusillade à Charlie Hebdo et la prise d’otage à l’Hyper Cacher, elle répond malicieusement : « Ah mais oui, je suis juive, cest vrai. »

Quand dans la salle, une lectrice, émue, s’exclame : « J’étais à La Providence avec votre mère. Jai limpression de la voir », Justine Lévy se montre plus silencieuse. Pas sûr qu’elle ait apprécié, elle qui tente continuellement de se libérer des névroses héritées de sa mère, « pas très adaptée à la société ».

DR

À l’Ubu, les femmes s’en mêlent et elles ont bien raison #1

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Ubu, Rennes
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Le 15 mars, les femmes investissent la scène de l'Ubu pour défendre la scène féminine indépendante, dans le cadre du festival Les femmes s'en mêlent.
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Le 15 mars, l’Ubu accueillera le festival Les femmes s’en mêlent pour un concert singulier, placé sous le signe des années 80, avec Shopping et Véronique Vincent & Aksak Maboul. À partir de 18h.

Les femmes s’en mêlent, c’est l’histoire d’un concert parisien organisé le 8 mars 1997 à l’occasion de la journée internationale des Femmes, et qui a bien grandi depuis, déployant ses ailes d’abord sur plusieurs soirées à Paris et à Grenoble pour finir par entamer des tournées dans l’Hexagone. À travers cet événement, c’est la scène féminine indépendante que l’on célèbre. Pour montrer qu’elle est de plus en plus riche, de plus en plus développée, que comme le dit son nom, les femmes s’en mêlent. Aussi dans le milieu de la musique. Avec de la qualité, de l’éclectisme, de la passion et de l’exigence.

SUR LA SCÈNE RENNAISE

Cette année, pour la 18e édition, les femmes se mêlent aussi à la scène rennaise et ça, ça nous réjouit. Également parce que la programmation est alléchante. Shopping, jeune formation british fondée en 2012, nous régale de leurs influences post-punk des 80’s. Leur album, sorti en 2013, Consumer Complaints, marque leur appropriation personnelle du genre musical pour le teinter de modernité et de fraicheur.

Véronique Vincent & Aksak Maboul surfent aussi sur la vague des musiques actuelles influencées par les sonorités rétro. Excepté que leur album, Ex-futur album, sorti en 2014, a été composé au début des années 80, né de la rencontre entre la chanteuse des Honeymoon Killers, Véronique Vincent, et le membre d’Aksak Maboul et directeur de Crammed Discs, Mark Hollander. Aujourd’hui embarqués dans une tournée exceptionnelle, en compagnie de certains musiciens d’Aksak Maboul, le duo vient donner l’écho mérité de cet opus, complètement déjanté, rock et entrainant, grâce au mélange électro-pop, jazz et textes absurdo-loufoques.

La première personne à nous envoyer un mail à l’adresse suivante, redaction@yeggmag.fr, remportera 2 places pour le concert du 15 mars à l’Ubu. Merci de mentionner nom, prénom, adresse, mail et téléphone.

À noter que le dimanche suivant, le 22 mars, les Femmes s’en mêlent débarqueront à l’Antipode avec Rachel Dadd et This is the kit. 

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