Célian Ramis

"Backlash", dans le miroir d'un homme manipulé par le masculinisme

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Pièce de théâtre Backlash, du groupe Vertigo, sur le masculinisme à Rennes 2
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Dans la pièce "Backlash, le groupe Vertigo s’attaque au masculinisme, décortiquant avec brio les mécanismes âpres et insidieux d’un relent conservateur et nauséabond face aux avancées du féminisme.
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C’était mieux avant, parait-il. Pour qui ? Pour quoi ? Adapté de la pièce Angry Alan de Penelope Skinner, le seul en scène Backlash, du groupe Vertigo, s’attaque au masculinisme, décortiquant avec brio les mécanismes âpres et insidieux d’un relent conservateur et nauséabond face aux avancées du féminisme.

 

Kentucky, aujourd’hui. Divorcé, père d’un ado qu’il ne voit jamais, Danny est assistant manager et vit avec Courtney, sa nouvelle compagne. Quelques temps auparavant, il a été licencié d’un boulot bien payé. Ce matin-là, un lundi tout à fait standard, il envisage d’aller courir mais, à la place, il « tombe dans le vortex de Google » qui le fait naviguer d’article en article et sombrer dans les affres du numérique, là où le temps s’arrête et où le cerveau se nourrit avidement de tous les contenus proposés. Dont cette vidéo sur l’Histoire, racontée par Angry Alan, qui prône et revendique le mouvement de défense des droits des hommes. Une blague ? Non, une soi-disant évolution naturelle du mouvement des femmes qui est allé trop loin, jusqu’à imposer à toutes et à tous une société gynocentrée. Ici, « les hommes ordinaires souffrent », lâche Danny, convaincu de trouver dans les paroles de son gourou le sens de son malaise, la source de son inconfort physique et mental, la clé de son émancipation d’homme banal et frustré à un homme puissant et viril.  

PRISE DE CONSCIENCE OU MANIPULATION EFFECTIVE ?

Debout, sur son lit, les bras écartés, Danny goûte enfin à la liberté. Ce qu’il nomme « l’instant pilule rouge » crée le déclic en lui, lui permettant ainsi d’ouvrir les yeux sur son vécu et ressenti : « Les hommes ne sont pas autorisés à exprimer leurs sentiments. Cette douleur dans mes entrailles, c’est l’effet du poids de ma propre histoire ! » Ce n’est peut-être pas de sa faute alors s’il a été licencié ? Si sa femme l’a quitté ? Si son fils lui adresse à peine la parole ? Si sa vie est morne et monotone ? La cage qui l’emprisonne se figure à lui désormais : 

« La pilule rouge ne résout pas le problème mais je suis conscient de la cage. C’est tellement libérateur ! Les choses vont changer ! »

Pièce de théâtre Backlash, du groupe Vertigo, sur le masculinisme à Rennes 2Jusqu’ici, on se serait tenté-es de voir le positif de la situation et de penser en termes d’empouvoirement et d’empuissancement. Une émancipation individuelle nécessaire, au même titre que celle des femmes et des personnes sexisées qui s’affranchissent peu à peu des codes, normes et assignations de genre, dénonçant la construction sociale établie par le patriarcat et inventant de nouvelles manières de penser et de vivre, en dehors du sexisme et de la binarité. Pourtant, on ne se réjouit pas. Car on comprend dès le départ que Danny, paumé et en perte de repères, se jette dans les filets du masculinisme qui utilise la rhétorique du féminisme pour mieux la piétiner et la tourner en discours victimaire, avant de s’approprier celui-ci, au titre d’un soi-disant « sexisme gynocentriste ». 

C’est là toute la sève nauséabonde du « backlash », un concept théorisé au début des années 90 par Susan Faludi dans un livre éponyme qui décortique les réactions machistes et extrémistes, inquiètes des avancées féministes et de la perte des privilèges attribués jusqu’alors aux hommes (blancs, hétéros, cisgenres, valides, riches…). Ainsi, le patriarcat virulent brandit l’égalité acquise entre les femmes et les hommes et sème le trouble dans les esprits : pourquoi les femmes se plaignent-elles alors qu’elles « y sont arrivées » ? Et l’histoire se répète puisqu’en 1991, la journaliste américaine relate des discours, faits et événements similaires à ceux que l’on entend, connait et affronte aujourd’hui.

Des incels aux militants d’extrême droite, en passant par les participants aux stages de virilité, les « mascus » cultivent la haine des femmes et le rejet des féminismes, qu’ils estiment être la cause de tous leurs malheurs. Dans son essai, Susan Faludi écrit : « Lorsque le féminisme est au sommet de la vague, les opposantes ne se laissent pas emporter si facilement par le ressac ; elles résistent de toutes leurs forces, montrent le poing, construisent des remparts et des digues. Et cette résistance crée des contre-courants, fait surgir de redoutables lames de fond. » Elle s’attache à montrer les fluctuations dans l’Histoire américaine des droits des femmes, les levées de boucliers et retours acharnés de bâtons et démontre que non, l’égalité décriée par les masculinistes – et David Pujadas au JT de France 2 qui place l’égalité acquise dans les années 70 en France - n’est pas réelle et loin de l’être. Au contraire, l’époque est plutôt au recul et à la dégradation, un peu partout dans le monde, de la condition des femmes.

LA GUEULE BÉANTE DE LA MÉCANIQUE MASCULINISTE

Pourtant, dans Backlash, Angry Alan vient contrecarrer les faits, blindé et pétri dans des statistiques et données tronquées qu’il modélise et ajuste selon les besoins de son argumentaire. Bérangère Notta et Guillaume Doucet, du groupe Vertigo, ne le contredisent pas. Pas par acceptation ou approbation du discours, bien au contraire. Le duo nous confronte à la mécanique sournoise, nauséabonde et insidieuse du masculinisme et à la facilité avec laquelle elle peut toucher des hommes dont la vulnérabilité inadéquate à la virilité et masculinité toxique a laissé une plaie béante qu’il suffit de frôler pour activer et s’engouffrer dans les méandres d’un esprit agité et brisé. 

Et c’est la performance de Philippe Bodet qui est à souligner et à saluer, tant il incarne à merveille ce personnage floué et embourbé dans les failles de son ego si simple à manipuler qu’il va jusqu’à lâcher 900 dollars pour assister à un week-end de colloque organisé par Angry Alan : « L’écouter en vrai, c’est une belle source d’inspiration ! » En pleine admiration, il se perd dans son enthousiasme et son élan qui l’aveuglent et se déchainent rapidement en rage et en noirceur, se pensant héro des temps modernes « confronté à une grande adversité ». En réalité, c’est le portrait d’un homme un brin ridicule, influençable et écrasé par l’injonction à la virilité qui est dressé dans ce spectacle. Un raté, selon les normes patriarcales, qui pense reprendre sa vie en main, en accusant les féministes et s’adonnant à la mauvaise foi masculiniste qui prône sa résistance « face à l’oppression exercée par le régime gynocratique ». 

Perçant de contre-vérités, le discours de plus en plus acerbe d’Angry Alan – magnifiquement interprété par un Guillaume Trotignon troublant de réalisme néfaste – infuse doucement d’abord, profondément ensuite, en un Danny déconnecté de la réalité de la société et de son rapport systémique à la domination. Difficile de garder son calme, difficile de retenir et de contenir notre énervement. La boule au ventre grandit et affecte tous nos sens.

Pièce de théâtre Backlash, du groupe Vertigo, sur le masculinisme à Rennes 2Ça transpire la mauvaise foi et ça nous explose les neurones et les entrailles. On voudrait lui arracher la bouche à cet Angry Alan qui profite du monde virtuel pour répandre sa haine dans le monde réel. On voudrait le secouer ce Danny qui croit au regain de sa vitalité grâce à cet élan de brutalité et de violence qu’il n’entrevoit même pas. Jusqu’à braquer un fusil sur son fils qui lui s’interroge sur la fluidité des genres. Et la pièce nous laisse là, dans cette distinction entre une partie du monde refusant catégoriquement d’avancer et d’évoluer en regrettant l’ancien temps, le fameux « c’était mieux avant », et une partie du monde s’affichant progressiste et déterminée à s’affranchir des codes et normes du vieux monde patriarcal qui divise dans une guerre des sexes qui n’a pas lieu d’exister si chacun-e peut décider librement et en pleine conscience de son identité.

LES MASCULINISTES FACE À LEURS RESPONSABILITÉS

Ce moment de vacillement, le groupe Vertigo le sous-tend à chaque instant de la pièce, créant des ruptures franches dans une oscillation d’excitation, de stupeur, de colère, d’incompréhension et de tension. L’ambiance mise en scène, teintée de couleurs vives, de musiques enivrantes et de monologues dévorants, saisit l’auditoire qui régulièrement se fait interpeler par le protagoniste qui cherche validation du public. Constamment sur le fil de l’émotion, le spectacle est puissant tant il nous saisit de cette ambivalence entre colère et empathie envers Danny. 

Au fond, il est un pion. Un pion du patriarcat attaqué dans sa chair qui se défend en répandant toute sa haine misogyne par des bras armés tels que Angry Alan ou d’autres influenceurs - qui se doivent d’être mis face à leurs responsabilités - utilisant la confusion ambiante pour déverser leurs frustrations et les transformer en manipulation leur permettant de s’enrichir pendant que d’autres souffrent et meurent de ce rejet brutal et de la violence qui en émane. 

 

  • Au Tambour, université Rennes 2, en partenariat avec le festival Mythos et le festival Sirennes, le 12 avril 2024, et en lien avec la conférence de Mélanie Gourarier, Alpha Mâle : la pensée masculiniste et ses adeptes, dans le cadre des Mardis de l'égalité.

Célian Ramis

Ce sont les féminicides qu'il faut stopper et non les militantes !

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Jeudi 1er avril, des militantes féministes ont appelé au rassemblement place de la Mairie à Rennes, pour dire stop aux féminicides. Les prises de parole ont été interrompues par les forces de l’ordre, contraignant les organisatrices à dissoudre la mobilisation.
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Ce jeudi 1er avril, plusieurs militantes féministes ont appelé au rassemblement place de la Mairie à Rennes, sur fond d'occupation de l'Opéra, pour dire stop aux féminicides et plus largement aux violences à l’encontre des personnes sexisées. Le message est partiellement passé puisque les prises de parole ont été interrompues par les forces de l’ordre, contraignant les organisatrices à dissoudre la mobilisation.

Jennifer, 35 ans, tuée au couteau par son conjoint. Deux enfants ont également été tués (11 et 16 ans). Avril 2020.

Anonyme, 52 ans, retrouvée inanimée après avoir été battue à mort par son conjoint. Mai 2020.

Virginie, 45 ans, tuée par arme à feu par son conjoint gendarme. Juillet 2020.

Anonyme, 37 ans, poignardée puis égorgée par son ex-mari en attente d’un jugement pour violence conjugale. Juillet 2020.

Laetitia, 38 ans, abattue au fusil de chasse par son mari qui a ensuite dissimulé le corps. Octobre 2020.

Anonyme, 76 ans, étranglée par son mari « parce qu’il était à bout de nerfs ». Octobre 2020.

Ces crimes sont inscrits sur les pavés ce midi du premier avril, place de la Mairie, à Rennes. Les passant-e-s s’arrêtent, lisent, repartent ou s’arrêtent quelques minutes, interpelé-e-s par les affiches qui jonchent le sol aux côtés de messages tout aussi forts : « Y’a pas mort d’homme ! y’a juste mort de femme », « Le sexisme tue tous les jours », « Police, justice, classement sans suite : vous êtes complices » ou encore « Dans 2 féminicides, c’est Pâques ».

Le décompte est glaçant : « Déjà 475 féminicides que Macron a nommé les violences faites aux femmes comme grande cause du quinquennat ». Plus d’une centaine de femmes ont été tuées par leur conjoint ou ex-conjoint en 2020. Depuis le 1er janvier 2021, ce sont déjà 27 femmes assassinées par leur compagnon ou ex compagnon, selon le recensement du compte Féminicides par compagnons ou ex.

Récemment, près de Rennes, c’est le meurtre de Magali Blandin qui secoue. Assassinée en février 2021 par son mari, à coups de batte de base-ball. « Comme la grande majorité des femmes tuées par leurs conjoints ou ex, elle avait porté plainte pour violences conjugales (la plainte avait été classée sans suite). Comme la grande majorité des femmes tuées par leurs conjoints ou ex, elle avait demandé de l’aide, mais n’a pas été prise au sérieux. », signale le tract distribué et lu au micro à l’occasion du rassemblement.

LES MOTS ONT UN SENS

La question du langage est centrale. La société n’assiste pas à une libération de la parole de la part des personnes sexisées. MeToo ainsi que tous les mouvements permettant les témoignages massifs dénonçant les violences sexistes et sexuelles ont amené le grand public à les écouter davantage.

Les militantes féministes insistent depuis plusieurs années pour faire évoluer les mentalités à ce sujet : on ne tue jamais par amour. Pourtant, dans les médias ou dans les procédures d’accueil des victimes, dans les enquêtes et les procès, on entend encore parler de « crime passionnel », de « drame familial ». Le tract le mentionne, ajoutant : « Dans la bouche de l’avocat du meurtrier de Magali Blandin, il l’a tuée « parce qu’il tient énormément à la famille ». »

Sans oublier le processus d’inversion de la culpabilité que l’on brandit sans vergogne dans de nombreux cas de féminicides, à l’instar de l’affaire Alexia Daval, tuée par son conjoint Jonathann Daval dont les avocats avaient dressé un portrait de femme castratrice. De quoi légitimer son crime : si elle a ôté la virilité de son époux, celui-ci peut lui ôter la vie.

Durant les prises de parole, les militantes rappellent :

« Ce sont des crimes de possession. Un homme s’octroie le droit de vie et de mort sur sa compagne qui n’a pas le droit selon lui d’exister sans lui. On voulait juste rappeler qu’avec l’épidémie du covid, il y a une explosion des violences masculines faites aux femmes. Selon les données de l’ONU en septembre, le confinement du printemps a fait augmenter ces agressions, ces viols, ces meurtres de 30% en France. »

Et puis, il y a ces phrases que les victimes entendent dans les commissariats ou les tribunaux, visant à les décourager de porter plainte ou d’aller au bout de la procédure : « Ça pourrait changer la vie de Monsieur à tout jamais, c’est pas rien ! » C’est ce dont témoigne cette militante ce midi-là :

« J’interviens aujourd’hui en tant que militante au sein du NPA, en tant que femme, en tant que femme lesbienne, en tant que mère d’une jeune femme, et j’ai aussi été cette enfant qui a grandit au milieu de la violence conjugale. Je repense à ma mère qui quand elle avait tenté de porter plainte contre cet homme violent, le père, elle s’était entendue dire « Vous êtes sure Madame que ce serait pas un gros préjudice pour votre mari ? Il risque la prison quand même. » Alors elle est repartie. C’était il y a plus de 40 ans. Ça n’a pas tellement changé. »

EXIGER DES MOYENS À LA HAUTEUR DU PROBLÈME

Le rassemblement vise encore une fois à réclamer des moyens satisfaisants. Pas des effets de communication ou de « beaux » discours sur l’importance de lutter contre les violences patriarcales. Non, des moyens, des vrais. À la hauteur de l’ampleur et de l’étendue des violences sexistes et sexuelles qui cautionnent qu’une femme meurt tous les 3 jours environ des coups de son conjoint, dont on essaye d’amoindrir le geste.

Les militantes féministes exigent non seulement la mise à disposition de structures d’hébergement pouvant accueillir les femmes victimes de violences conjugales, la formation des agent-e-s de toute la chaine juridico-policière, mais surtout la lutte profonde contre la culture du viol, contre la culture patriarcale visant à réduire les femmes au statut d’objet appartenant aux hommes.

La liste des revendications est longue et non exhaustive : « Dire notre colère ne suffit pas. En tant que femme, comme en tant que personne subissant les oppressions et les violences patriarcales, nous devons nous organiser pour faire entendre notre colère. Et pour obtenir des victoires contre ce système. Nous devons exiger des mesures immédiates, la mise sous protection effective de la victime dès la première alerte, la simplification des démarches pour porter plainte, pour quitter le domicile conjugal, éloigner l’agresseur, l’accès facilité aux services de santé spécialisés, des personnels spécialisés formés en nombre suffisant dans tous les services concernés : police, justice, éducation et bien d’autres, l’application de la loi afin que l’agresseur soit tenu éloigné, des places d’hébergement sécurisés et en nombre suffisant pour les femmes et leurs enfants, un accès au droit d’asile immédiat pour les femmes et personnes LGBTQI étrangères, plus de moyens aux associations féministes et LGBTQI qui assurent les missions de service public d’accompagnement et de soutien, des campagnes régulières d’information et d’éducation populaire, des moyens encore pour la mise en place effective pour l’éducation à la vie sexuelle et affective à l’Education nationale…»

« JE SUIS UNE FEMME ET JE VEUX POUVOIR ME SENTIR LIBRE »

Et puis, il y a ce témoignage de Louise. Exceptionnellement, nous le retranscrivons ici dans son intégralité :

« Je suis une femme, j’ai 17 ans et je fais partie des 97%. Alors que je croyais être invincible, que j’étais sûre de ne jamais subir de violences, il y a deux ans je suis tombée dans le filet d’un violeur. J’en ai parlé avec mes sœurs, chacune d’entre elles m’ont alors confié qu’elles aussi avaient subi des violences. 

La violence, elle a de multiples facettes. C’est difficile de savoir où est-ce qu’elle commence et quand elle s’arrête. Il y a les violences physiques, qui passent par les coups, les gestes qui nous font mal au corps. 

Les violences sexuelles : viols, attouchements, refus d’une contraception, harcèlement de rue, non respect du consentement. En France, 30% des femmes subiront des violences de la part de leur actuel ou ancien compagnon et 97% d’entre elles seront victimes de viol-s ou harcèlement sexuel. 

Il y a les violences psychologiques, qui ne laissent pas de traces visibles mais alimentent un mal être constant. L’agresseur utilise les mots pour détruire sa proie. Il dévalorise son comportement, son apparence, son caractère, sa personnalité. La torture psychologique se fait aussi par des actes qu’on pourrait percevoir comme de la jalousie excessive mais qui sont en réalité néfastes et dangereux. Contrôler la totalité des faits et gestes de quelqu’un, l’empêcher de travailler, d’avoir une vie sociale, d’avoir une indépendance, faire en sorte d’être essentiel pour ne jamais être remplacé, tel est le mode opératoire d’un pervers narcissique. 

Les violences peuvent être économiques lorsque l’agresseur ne paye pas la pension alimentaire, contrôle l’argent de sa victime ou l’empêche d’utiliser son salaire. 

Les mariages précoces et fermés, les mutilations génitales et les exploitations sexuelles sont aussi des violences que les femmes subissent. Dans le monde, environ 650 millions de femmes ont été mariées de force et 200 000 autres sont victimes de mutilation génitale. 

Les violences peuvent avoir lieu n’importe où et n’importe quand. Au travail comme dans la rue, au sein d’un couple comme dans la famille, à l’école comme dans les transports ou même les milieux hospitaliers. Peu importe leur durée, les violences sont anormales et pourtant si banalisées. 

Comment expliquer que 80% des plaintes sont classées sans suite, que les féminicides ont lieu tous les 3 jours ? Comment expliquer qu’au moment où je lis ces mots quelqu’un quelque part en France subit un viol ? Comment expliquer qu’une femme ne puisse pas se sentir en sécurité dans la rue ? Qu’elle ne se sente pas légitime à porter les vêtements qu’elle aime ? Qu’elle soit insultée selon ses pratiques sexuelles ? 

Je suis une femme, j’ai 17 ans et j’ai peur. Il y a tout un tas de choses effrayantes dans la vie d’une adolescente mais les violences que les femmes subissent sont effroyables et m’inquiétent car on n’est jamais à l’abri d’un sifflement ou d’un regard… 

Je suis une femme et je veux pouvoir me sentir libre et en sécurité. Partout et tout le temps. Sensibilisons les plus jeunes pour nous assurer un avenir, éduquons-les loin du patriarcat. Agresseurs, changez de camp ! Battez la société dans laquelle nous sommes enfermé-e-s plutôt que de vous défouler sur nos corps ! »

La mobilisation est interrompue par les forces de l’ordre qui exigent la dissolution de l’assemblée. Les organisatrices ont repoussé ce moment par respect envers la femme qui s’exprime. Le symbole est fort, et il est lourd, pesant. Interrompre la parole des femmes dans l’espace public en usant de son autorité… C’est choquant. Et cela renforce la colère entendue dans chaque prise de parole, y compris dans celles qui n’ont pas pu prendre le micro.

« Si la police était aussi efficace dans les violences faites aux femmes, ce serait vraiment le top ! », sera le mot de la fin et sera accompagnée par une levée des voix en chœur : « Nous sommes fortes, nous sommes fières, et féministes et radicales et en colère ! ». Espérons que la chanson reste dans la tête des flics…